Rencontre avec l’auteur Pierre Pouchairet à l’occasion de la sortie de son dernier roman L’or vert de Sangha, aux éditions Alibi.
Jean-Marc VOLANT : Bonjour Pierre Pouchairet. Tout d’abord un grand merci d’avoir bien voulu répondre à mes questions pour Zonelivre. Sur le site, nous vous connaissons bien en tant que lecteurs et chroniqueurs et ce, depuis vos premiers polars en Terre sainte édités chez Jigal et votre arrivée chez Palémon avec quelques romans déjà publiés dans la maison d’édition bretonne. Avant d’aborder votre dernier roman paru, pourriez-vous présenter pour celles et ceux qui ne vous connaissent pas encore ?
Pierre POUCHAIRET : Bonjour, merci de me recevoir.
J’ai un passé de flic. J’ai commencé dans la police en 1980, ma première affectation a été la Police judiciaire de Versailles où je suis resté pendant six ans dans une section criminelle chargée d’enquêter sur des meurtres. J’ai ensuite été à la Police judiciaire de Nice, dans les stups. C’est ce qui inspire une grande partie de mes romans. Et puis, par la suite, j’ai représenté la police française à l’étranger : Liban, Turquie… Petit retour en France, deux ans à la PJ de Grenoble et encore l’étranger, Afghanistan pendant 4 ans et demi puis le Kazakhstan et l’Asie centrale. En retraite depuis dix ans, j’ai pris la plume pour me lancer dans l’écriture de polars. Marié à une Bretonne, j’ai un pied à terre dans le Finistère, mais je continue à voyager, cette fois pour suivre ma femme qui travaille à l’étranger. On a passé cinq ans en Cisjordanie et quatre années au Cameroun. Tous ces lieux ont donné naissance à des romans.
JMV : De la Terre sainte aux terres bretonnes, il y a un long, très long voyage à effectuer, que ce soit par avion ou dans l’écriture de romans : comment passe-t-on de la fureur, de la dureté d’un pays comme Israël et Jérusalem aux terres plus calmes du Finistère et de ce changement d’éditeur ?
PC : Le fait est qu’en Bretagne nous habitons à l’Ile-Tudy, qui est aussi le lieu de résidence d’un auteur phare du polar : Jean Failler, le père d’un personnage de policière nommée Mary Lester, publié aux éditions du Palémon. Jean est mon héros en terme d’écriture. Il a commencé à écrire à 52 ans et trente ans plus tard, il sort le 60e tome de son héroïne. Il m’a proposé d’écrire pour cette maison d’édition bretonne. L’idée m’a séduit et j’ai fait muter Léanne, l’héroïne de «Mortels Trafics» à la P.J. de Brest où elle mène, depuis maintenant presque cinq ans et dix romans, des enquêtes avec deux copines d’enfance : Vanessa, une psychologue et Elodie, une médecin légiste. Ces trois personnages récurrents sont la base de la série « Les trois brestoises ».
JMV : De temps en temps, vous vous autorisez un petit pas de côté en publiant chez d’autres éditeurs, chez Fayard, chez Filature(s) avec deux romans publiés, également chez Plon, et tout récemment chez Alibi avec votre dernier roman «L’or vert du Sangha». Il y a une vraie envie de publier ailleurs pour faire découvrir à vos lectrices et lecteurs d’autres univers du roman policier ?
PC : En parallèle, je n’ai jamais cessé d’écrire des romans plus internationaux et peut-être un peu plus noirs chez d’autres éditeurs. Mon dernier est sorti chez Alibi, mais ce n’est pas, à proprement parler un nouvel éditeur, puisqu’il s’agit toujours de Dargaud/Media Participation, la même maison où sont parus mes deux romans précédents sous l’appellation «Filature(s)».
Au préalable, j’ai effectivement écrit chez Plon, dans la collection «Sang Neuf», sous la direction de Marc Fernandez que j’ai suivi lorsqu’il est parti chez Dargaud pour travailler avec Alice Monéger. Ce n’est donc pas vraiment un changement puisque je suis resté avec la même équipe.
Il y a eu Fayard pour le Prix du quai des Orfèvres, ce n’est pas un choix d’éditeur. Le prix est attribué sur remise d’un texte qui est toujours publié par Fayard.
Et puis j’ai effectivement commencé chez Jigal, où j’avais un contrat pour cinq livres et qui fut honoré.
JMV : Parlons de votre dernier roman paru récemment et que j’ai, pour ma part, beaucoup apprécié. On se retrouve dans une autre ambiance que celles des enquêtes de nos trois Brestoises (chez Palémon) : beaucoup plus dure, plus sombre et dans un climax de danger. Même si ce roman est une fiction, il n’est pas très éloigné d’une réalité actuelle. Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire évoluer vos nouveaux personnages dans ce pays (fictif certes) d’Afrique et dans un contexte très particulier où rôdent trafics et corruptions en tous genres ?
PC : Ce roman est dans la lignée de mes autres romans plus internationaux. Un style dans lequel je n’ai jamais cessé d’écrire depuis dix ans : « Une terre pas si sainte », « A l’ombre des patriarches », « La prophétie de Langley », « La filière afghane », « Mort en eaux grise », « Tuez-les tous mais pas ici », « Larmes de fond », « La consule assassinée » et maintenant « L’or vert du Sangha ».
Comme je vous l’ai dit, je viens de passer quatre ans au Cameroun. Il était normal qu’il en sorte un roman. L’idée de départ m’a été donné par la radio. J’écoutais une émission parlant du Kevazingogate. J’ai compris qu’il s’agissait d’un scandale qui a secoué le Gabon. 353 containers de Kevazingo, un bois rare qui pousse au Cameroun et au Gabon, avaient été saisis par les douanes gabonaises et volés dans la même nuit dans le port où ils étaient entreposés. J’ai trouvé ça tellement énorme que j’ai décidé d’écrire là-dessus. A partir de là, je me suis documenté sur les exploitations forestières africaines, la déforestation et le trafic de bois rares, souvent à destination de la Chine.
JMV : Evoquons, si vous le voulez bien, votre travail d’écrivain. Comment choisissez-vous vos sujets ? Vos personnages ? la struture d’un récit ? Combien de temps passez-vous devant votre ordinateur (ou machine à écrire, si ça se trouve, vous êtes de la vieille école) par jour ?
PC : Les sujets s’imposent souvent à moi en lisant l’actualité, en écoutant la radio, en discutant. Un auteur est un peu une éponge qui s’imprègne de ce qu’il entend ou voit. Pour l’écriture, j’écris en journée (pas la nuit ou très tôt comme font certains) et presque quotidiennement lorsque je suis chez moi, où dans les transports. Je n’ai pas de temps imposé, ça peut être une heure comme dix heures, mais j’aime bien arriver à écrire un millier de mots par jour. Et tout se fait sur ordinateur, quel confort !
Pour les personnages, c’est pareil, il s’agit souvent de gens que j’ai croisé ou que je connais. Par exemple, Claire Dorval, l’héroïne de « L’or vert du Sangha » est inspiré par une journaliste que j’ai connue en Afghanistan. Je n’ai pas de plan, ou très peu. Je connais la fin du récit et son début, ensuite tout peut arriver au détour d’une page.
JMV : Je voudrais que vous racontiez ce que vous avez ressenti quand Olivier Marchal, ancien policier et réalisateur de talent, a voulu adapter pour le petit écran, «Mortels trafics», paru chez Fayard et Prix du Quai des Orfèvres en 2017… Quand pourrons-nous voir cette adaptation ?
PC : Ça ne s’est pas passé comme vous l’imaginez.
A l’origine, un producteur s’est intéressé au livre et a pris les droits auprès de Fayard dans l’espoir de créer une série de plusieurs épisodes avec pour réalisateur Olivier Marchal. Le projet n’est pas allé à son terme, mais Olivier a voulu poursuivre. Il en a parlé à Gaumont et l’idée a été de réaliser un film avec ce nouveau producteur, puis ensuite Amazon.
L’adaptation sortira le 4 novembre prochain sur Amazon Prime. Attention le film ne suit pas entièrement le livre, c’est une adaptation, mais une super adaptation dont je suis très content.
Quel a été mon sentiment ? L’idée de voir son roman adapté est juste un rêve pour un auteur. Ce fut une immense joie. Le fait que ce soit par Olivier Marchal est pour moi bien particulier. Outre le fait que c’est génial d’être adapté par celui qui est un des plus grands réalisateurs de polars en France et en ce moment, il y a un truc bien particulier entre Olivier et moi. Nous avons commencé ensemble à la PJ de Versailles au début des années 80. Jeunes flics, encore des gamins, on a bossé ensemble et on ne s’était pas revu avant cette aventure 40 ans plus tard.
JMV : Beaucoup de vos lectrices et lecteurs connaissent votre goût pour la musique et en particulier d’un certain groupe british des 60’s. Travaillez-vous en musique ou préférez-vous le silence du tapotis de votre clavier ?
PC : J’écoute toujours de la musique, du rock, du blues, du jazz, du classique, de la variété… Tout, sauf des chanteurs français en écrivant. S’il y a des paroles en français, ça trouble l’écriture.
JMV : Pour conclure cet entretien, avez-vous quelque chose de particulier à dire à vos nombreux lecteurs ?
PC : Merci de me suivre et d’être fidèle à mes écrits. C’est vous qui me donnez envie d’écrire.
Bon voyage en Afrique ave«L’or vert du Sangha »
JMV : Merci pour ce temps consacré pour Zonelivre et je vous laisse maintenant nous répondre au petit questionnaire de Proust
En savoir plus sur Zonelivre
Subscribe to get the latest posts sent to your email.