PRÉSENTATION ÉDITEUR
Mère. Héroïne. Menteuse. Tueuse ?
Le métier de Laura consiste à soigner les troubles de la parole. Dans sa profession, elle est reconnue et admirée. Elle a pourtant plus de difficultés quand il s agit de faire parler sa fille de trente ans, qui semble collectionner les échecs en tout genre.
Il aura suffi qu elle l invite au restaurant pour avoir une vraie discussion mère-fille,
Il aura suffi qu un gamin armé entre en scène,
Il aura suffi d un unique coup de couteau,
Pour que tout bascule.
Andy vient de voir sa mère tuer un homme. Sans une once d hésitation. Efficace. Calme.
Andy vient de comprendre que sa mère n est peut-être pas celle qu elle prétend.
Et, maintenant que les masques tombent, la voix de ces deux femmes pourrait bien ne plus jamais se faire entendre.
Origine |
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Éditions | HarperCollins |
Date | 3 avril 2019 |
Éditions | HarperCollins poche |
Date | 1 avril 2020 |
Traduction | Eve Vila |
Pages | 544 |
ISBN | 9791033903789 |
Prix | 8,30 € |
L’AVIS DE CATHIE L.
Son vrai visage, Pieces of her dans la version originale parue en 2018, a été publié en 2019 par les éditions Harper Collins. Le style est très agréable à lire. Les nombreux dialogues, les descriptions sobres, à coups de phrases simples, sans détails superflus, contribuent à rendre le récit particulièrement vivant :
« La promenade en bois était moins longue que ce qu’Andy avait imaginé. Elle retourna d’un bond sur la route à sens unique, qui longeait les demeures du front de mer. L’asphalte était solide sous ses pieds. Le rugissement de la mer s’estompa peu à peu derrière les maisons immenses. Le long de cette portion de route, la côte décrivait un virage pour épouser l’extrémité de l’île. Le pavillon de sa mère se dressait à quelques huit cent mètres de là. » (Page 109).
=> Ce qui compte est de créer une ambiance, d’immerger le lecteur dans l’intrigue, qu’il suive les faits et gestes des protagonistes, qu’il s’imprègne des lieux avec aisance, non comme un spectateur passif mais comme un personnage faisant partie intégrante de l’histoire.
Thèmes : Les enfants doivent-ils porter le poids des actions de leurs parents, bonnes ou mauvaises ? Le passé revient toujours sous une forme ou une autre. Connaît-on vraiment nos proches, ceux que nous aimons ? Savons-nous tout de leur vie ? Se faire sa place à l’ombre d’une mère belle, intelligente et brillante. La relation complexe mère/fille analysée avec beaucoup de finesse :
« A l’évidence, elle était mortifiée. Encore à l’âge où on ne voulait pas de mère à moins d’être en manque d’argent ou de compassion. Andy se souvenait de ce tiraillement qui ne remontait pas à si loin que ça…Andy réprima un élan vachard en se levant de table. Plus elle vieillissait, plus il lui était difficile de résister à l’envie irrépressible de devenir sa mère. Bien que, avec le recul, Laura lui ait souvent donné de bons conseils. » (Pages 28-29).
L’intrigue
2015. Andy, trentenaire, retourne vivre avec Laura, sa mère, brillante orthophoniste, atteinte d’un cancer du sein. Sa situation est bien peu reluisante :
« J’ai trente et un ans, je n’ai pas eu un seul vrai rendez-vous en trois ans, j’ai soixante-trois mille dollars de dettes pour un diplôme que je n’ai jamais obtenu et j’habite un studio au-dessus du garage de ma mère. » (Page 23).
Afin d’avoir une discussion mère/fille, Laura emmène Andy déjeuner dans un restaurant. C’est alors que tout bascule : Laura tue d’un coup de couteau un jeune braqueur, dont le père shérif a été tué six mois plus tôt dans un braquage de banque, après qu’il ait abattu deux femmes. Comment la famille du jeune homme va réagir ? Que va-t-il se passer pour Laura ?
Soudain, Andy réalise, horrifiée, que sa mère n’est peut-être pas celle qu’elle prétend : « Laura avait paru trop calme… Trop calme et méthodique tout du long, surtout quand elle avait levé la main droite pour la placer sur l’épaule de Jonah… Jonah Helsinger était-il toujours une menace quand Laura l’avait tué ? » (Pages 63-64).
Comment expliquer le soudain changement d’attitude de Laura ? Pourquoi exige-t-elle que sa fille déménage de chez elle le jour même sous le prétexte qu’elle doit voler de ses propres ailes? Quels secrets cache cette femme qu’elle croyait sans histoire ? Andy se retrouve alors engagée dans une course contre ses poursuivants, contre le passé de sa mère qui la rattrape, contre ses propres échecs et ratages…
En conclusion
Je remercie les éditions Harper Collins grâce auxquelles j’ai eu le plaisir de découvrir Karin Slaughter, romancière américaine pleine de talent. J’ai particulièrement apprécié la façon dont elle distille le suspense à petites doses, dans des allers-retours entre le passé d’un groupe de jeunes gens et le présent d’Andy et Laura. Qui sont-ils? Quel lien avec les deux femmes ? Le lecteur ne parviendra à reconstituer le puzzle qu’en collectant les indices disséminés çà et là, en un jeu de piste passionnant.
J’avoue m’être parfois agacée à l’encontre d’Andy et de son incapacité à réagir lorsqu’elle se trouve confrontée à certaines situations, notamment dans la scène du restaurant. Le contraste avec sa mère est tellement saisissant que l’on se surprend parfois à penser : « Mais allez Andy. Réponds, ou fuis, ou bats-toi… En tout cas, ne reste pas là, sans rien dire, comme pétrifiée !! » . C’est ce qui rend le récit intéressant : des personnages humains, confrontés à des situations extrêmes qu’ils ne savent pas toujours gérer avec lucidité et sang-froid. Comme dans la vie réelle…
Néanmoins, Son vrai visage, malgré ses 572 pages, se lit d’une traite, emportés que nous sommes par ses mises en scène travaillées : « Andy était paralysée, trop terrifiée pour se ressaisir, trop choquée pour faire quoi que ce soit à part regarder mourir sa mère. Laura tendit la main comme si elle pouvait bloquer le couteau. La lame trancha directement le centre de sa paume. Laura ne s’effondra pas, ne poussa aucun cri: ses doigts enveloppèrent le manche du couteau. Aucune lutte. Le meurtrier fut trop surpris. » (Page 36), son suspense, ses rebondissements, tenaillés au ventre par la question lancinante : comment tout ça va-t-il finir ?