Colin DEXTER : enquêtes de l’Inspecteur Morse – 08 – Mort d’une garce

Royaume-uni

INFOS ÉDITEUR

Colin DEXTER - enquetes de Inspecteur Morse - 08 - Mort une garce
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Parution aux éditions 10/18 en décembre 2003

Traduit par François Mazin

Pendant une convalescence à l’hôpital, l’inspecteur Morse fait la lecture d’un rapport d’enquête relatif à une affaire qui s’est déroulée en… 1859. Persuadé de l’innocence des deux hommes qui ont été pendus pour le meurtre d’une jeune femme, l’inspecteur Morse va utiliser toutes les ressources de ses merveilleuses petites cellules grises – et l’aide du sergent Lewis – pour étayer sa conviction. Mort d’une garce réjouira les amateurs d’énigmes. Ce puzzle extraordinaire, après avoir plongé le lecteur dans l’univers des romans de Thomas Hardy, lui fournit le mot de la fin dans une chute brillante.

(Source : 10/18 – Pages : 247 – ISBN : 9782264020178 – Prix : – €)

L’AVIS DE CATHIE L.

Mort d’une garce est le huitième opus de la série des enquêtes de l’Inspecteur Morse écrit en 1989. Mais il est tout à fait possible d’en suivre le récit sans avoir lu les romans précédents. Ce roman s’inscrit dans la veine des romans à énigme, appelés aussi « whodunit », dans lesquels on retrouve l’ambiance des romans d’Agatha Christie ou de Patricia Wentworth :  les enquêteurs glanent les indices à partir desquels ils réfléchissent bien plus qu’ils n’agissent (Voir l’article sur le Whodunit publié dans la rubrique « Policier : histoire du genre » du présent blog). Toutefois, Colin Dexter ajoute sa touche personnelle en accordant plus d’importance à la psychologie des personnages.

Les chapitres sont courts avec de nombreux dialogues et beaucoup d’humour, comme dans cet extrait au cours duquel Lewis rend visite à Morse cloué sur son lit d’hôpital : « Alors, reprit Lewis gaiement, comment vont les affaires ? Qu’est-ce qui ne va pas, selon eux ? -Ne va pas ? Tout va bien! C’est juste une erreur d’identité. -Allons, sérieusement? fit Lewis en souriant. – Sérieusement ? Eh bien, ils m’ont mis à un régime de grosses pilules rondes et blanches qui coûtent deux livres pièce, si l’on en croit les infirmières. Est-ce que vous vous rendez compte que vous pouvez avoir une petite bouteille de bordeaux tout à fait correcte pour ce prix ? – Et la nourriture? Est-elle convenable? – La nourriture ? Quelle nourriture ? A part les pilules ils ne m’ont rien donné. »

Originalité

Mener une enquête avec pour base de départ un récit fictif écrit par un vieil homme sur un événement réel survenu en 1859.

Le style

Le style un peu maniéré au vocabulaire souvent recherché ne gâche en rien l’habileté du romancier à susciter l’intérêt du lecteur qui tourne page après page avec une certaine fébrilité afin d’en savoir plus.

« Bien que certains témoignages fussent à l’époque contradictoires touchant quelques points individuels dans la suite fatale d’événements décrits plus bas, le motif général, tel qu’il se présente ici est – et a toujours été- incontesté. » (Page 68)

« La pensée de la boisson commençait à requérir l’attention de notre patient qui, avec un soin et une circonspection infinis, se versa un doigt de scotch dans le verre posé à son chevet, noyé dans autant d’eau. » (Page 82)

=> Tout ça pour dire que Morse, bien qu’hospitalisé, continue à boire de l’alcool !!

Cela dit, Mort d’une Garce dégage le charme faussement désuet des ambiances so british!, et toute l’intelligence de Colin Dexter est d’utiliser ce charme afin de proposer une enquête labyrinthique qui entraîne le lecteur dans les méandres des incertitudes, des questionnements, des états d’âme et des lumineuses déductions de l’inspecteur Morse. Et la façon magistrale avec laquelle il manie les changements de style selon le récit en cours ou les différentes lectures de Morse est remarquable !

En ce qui concerne la narration, le contexte hospitalier est rendu avec tellement de justesse qu’on pourrait presque s’écrier : « Ça sent le vécu !! » Tous ceux qui ont fait un jour cette triste expérience seront certainement d’accord avec moi…

L’intrigue

Suite à un malaise causé par un ulcère à l’estomac, l’inspecteur Morse est hospitalisé en urgence, le foie et l’estomac gravement endommagés par l’alcool et le tabac. Alors qu’il vient d’être installé dans la salle commune, l’un des patients, le vieux Wilfrid Deniston, décède.

Confortablement installé dans son lit, Morse, ayant besoin de distraction lorsqu’il ne sombre pas dans une douce torpeur due aux médicaments, observe son environnement: ses voisins perfusés, ceux qui meurent, les allées et venues des infirmières dispensant les soins, les visiteurs… Mais l’inspecteur, homme cultivé et intelligent, habitué, à des activités plus intellectuelles, ne tarde pas à mourir d’ennui. Ainsi, quand son assistant, le sergent Lewis, lui apporte deux livres, il les accepte avec soulagement.

Un troisième recueil lui est également offert par la veuve de Wilfrid Deniston, décédé la veille. Cette dernière,  afin de remercier le personnel soignant et certains des patients, dont Morse, pour leur gentillesse avec son mari, leur offre un exemplaire du petit ouvrage intitulé Meurtre sur le canal d’Oxford, une histoire criminelle que le vieil homme a passé sa vie à rédiger à partir des Registres d’Assises d’Oxford de 1860 et des parties du procès rapportées dans le Jackson’s Oxford Journal d’avril 1860. Le petit ouvrage est remisé dans la table de nuit.

Quelques jours plus tard, l’inactivité lui pesant de plus en plus, et les livres apportés par Lewis se révélant finalement bien peu intéressants intellectuellement, Morse reprend le petit ouvrage rangé dans le tiroir de sa table de nuit et en commence la lecture. Seules quelques pages seront nécessaires pour éveiller son intérêt: Wilfrid Deniston relate l’histoire d’un viol et d’un meurtre commis sur la personne de Joanna Franks en 1859. Très vite, l’intérêt du policier est mis en alerte: les incohérences qu’il décèle dans le procès des trois marins coupables, dont deux seront pendus, hantent ses rêves. En proie à de nombreuses questions, notamment sur les circonstances particulières du meurtre de Joanna Franks qui, tout à tout, apparaît comme victime ou comme allumeuse, Morse, et afin d’occuper ses longues heures d’oisiveté, décide de reprendre l’affaire point par point.

Commence alors l’enquête la plus originale de la littérature policière : secondé par Lewis et par Christine Greenaway, la fille de son voisin de lit, bibliothécaire à la Bodleian Library d’Oxford, qui assureront les déplacements et recherches nécessaires à la reconstitution des faits, Morse oublie ses ennuis de santé, son inactivité forcée et la surveillance serrée exercée par l’infirmière-chef. Depuis son lit d’hôpital, il réunit tous les éléments et indices afin de constituer un nouveau dossier et l’histoire qu’il reconstitue soigneusement ne raconte pas la même chose que les archives du procès…

Les personnages

Peu de personnages dans ce roman intimiste, centré sur la personnalité de son personnage principal, l’inspecteur Morse, ce qui ne les empêche pas d’être aussi intéressants et complexes que des personnes réelles.

  • Inspecteur Morse, célibataire d’une cinquantaine d’années qui, malgré une silhouette bedonnante, use de son charme auprès des femmes qu’il aime séduire. Très cultivé, il est passionné par les arts et la littérature; c’est mélomane averti… et un grand buveur de bière !! Il séduit par sa gentillesse, ses yeux doux, sa capacité à écouter les autres et son humanité. Cela dit, Morse se montre parfois caustique, voire railleur, surtout avec son assistant Lewis qu’il bouscule aisément, sur lequel il déverse parfois sa mauvaise humeur, mais jamais de manière vulgaire ou agressive. J’ apprécie particulièrement sa dérision et son humour britannique.
  • Superintendant Strange, supérieur hiérarchique de Morse.
  • Sergent Lewis, équipier de Morse, marié.
  • Christine Greenaway, bibliothécaire à la Bodléienne, la plus prestigieuse des bibliothèques d’Oxford; établie en 1602, elle porte le nom de Thomas Bodley, son fondateur. »Si elle venait à chercher pour de bon un autre mari, il faudrait que ce fût, d’une manière ou d’une autre, quelqu’un qu’elle pût respecter : respecter pour sa conversation, son expérience, son intellect, son savoir ou…et bien tout sauf son orgueil pour ses prouesse sexuelles. » (Page 85).

Les lieux

Dans tous ses romans, Colin Dexter rend un hommage à sa ville d’adoption à laquelle il voue une réelle passion, la mettant en scène de façon à l’intégrer harmonieusement à l’intrigue. « Descendue à Cornmarket, elle marcha jusqu’à Carfax, tourna à droite dans Queen’s Street, traversa ce quartier piétonnier plein de monde vers Bonn Square et juste après l’immeuble de Selfridges, elle s’engouffra dans la Westgate Central Library. » (Page 128).

Mon avis

Toute l’originalité de ce roman est l’enquête menée à partir des extraits d’un ouvrage fictif, écrit par un personnage romanesque, relatant des faits considérés comme réels dans une fiction par un inspecteur de police hospitalisé, donc complètement immobilisé. Du coup, tout repose sur ses facultés à interpréter des éléments tangibles et sur ses facultés de réflexion, seulement avec l’aide de deux assistants.

Nous nous retrouvons ainsi sur un pied d’égalité avec Morse puisque nous avons accès aux mêmes documents que lui. Seulement voilà !! Tout le monde ne s’appelle pas Morse dont l’expérience et l’esprit lucide et aiguisé fait la différence avec nous pauvres lecteurs…Avec en prime le charme désuet de la cité historique d’Oxford.

En conclusion, je conseille vivement la lecture de ce roman très divertissant, aux nombreuses qualités, qui a en plus le mérite de nous faire passer un très bon moment tout en exerçant nos petites cellules grises…

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Ecrivain de romans historiques, chroniqueuse et blogueuse, passionnée de culture nordique et de littérature policière, thrillers, horreur, etc...

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