Roz NAY : Notre petit secret

Royaume-uni

Notre petit secret est un roman qui possède de nombreux atouts qui en font un thriller très intéressant et vous tiendra en haleine

INFOS ÉDITEUR

Roz NAY - Notre petit secret
[amazon asin=2755633417&template=image&title=Notre petit secret – Prix Douglas Kennedy du meilleur thriller étranger]

Parution aux éditions Hugo & Cie le 18 mai 2017

Traduit par Vincent GUILLUY

Prix Douglas Kennedy du meilleur thriller étranger 2017 – VSD

Angela est interrogée par la police : la femme de son ex petit ami a disparu, et l’inspecteur Novak est persuadé qu’elle en sait davantage qu’elle ne veut bien le dire. Alors, encouragée par Novak, Angela va raconter son histoire. Une histoire qui commence dix ans plus tôt, au lycée de Cove, dans le Vermont, par sa rencontre avec HP, en qui elle reconnaît son âme soeur. Mais le récit d’Angela va révéler un sombre écheveau de trahisons et de pulsions destructrices, au coeur d’un troublant triangle amoureux.

(Source : Hugo & Cie  – Pages : 272 – ISBN : 9782755633412 – Prix : 19,95 €)

L’AVIS DE CATHIE LOUVET

Roz Nay est une romancière britannique. Elle a fait ses études à l’université d’Oxford. Elle a vécu et travaillé en Afrique, en Australie, où elle a rencontré son mari qui est Canadien, aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne. Aujourd’hui, elle vit en Colombie-Britannique avec son mari et leurs deux enfants. Elle partage son temps entre son métier d’assistante sociale spécialisée dans l’adoption et l’écriture.

Le roman

Notre petit secret a été publié en mai 2017 par les Éditions Hugo et Compagnie, dans la collection Hugo Thriller; pour la première fois, Hugo et Compagnie décernaient deux prix du Meilleur Thriller : l’un parrainé par Douglas Kennedy, a récompensé le meilleur thriller étranger (Notre petit secret) ; l’autre, parrainé par Michel Bussi, a récompensé le meilleur thriller français (Le tricycle rouge de Vincent Hauuy).

Notre petit secret est un thriller psychologique sans prologue, ni préambule. Un suspect, un policier. Nul besoin d’une accusation en béton, avec des indices indiscutables. Le jeu se situe ailleurs: tout l’intérêt du roman est de voir de quelle manière Angela va échapper aux griffes de l’inspecteur Novak et se disculper des soupçons qui pèsent sur elle. Car tout est là. Dans ce jeu du chat et de la souris, qui va l’emporter : le chat ? Ou la souris ? Car les thèmes principaux sont la place que la manipulation et le mensonge peuvent occuper dans une relation affective, qu’elle soit amoureuse, amicale ou filiale.

L’originalité de ce roman est qu’il se déroule sur les deux jours que dure l’interrogatoire d’Angela, qui a bien connu la personne portée disparue sur laquelle enquête l’inspecteur Novak. Pendant cette garde à vue, la jeune femme raconte son histoire remontant à dix ans plus tôt, lorsqu’elle a fait la connaissance des différents protagonistes du drame qui se jouera ce fameux jour d’été. Le roman commence par ces lignes : « Je suis au commissariat depuis le début de la matinée, et ils me posent des questions sur Saskia. » (Page 9). Mais afin que le lecteur ne perde pas de vue la situation de départ, les longues séquences-souvenirs alternent avec les questions et les remarques de l’inspecteur Novak.

Sa construction particulière, récit à la première personne n’offrant une perception des choses et des événements qu’à travers le regard de la narratrice, réduisant ainsi la perspective à son seul point de vue, place le lecteur sur le même plan que l’inspecteur qui l’interroge ; comme lui, nous écoutons l’histoire d’Angela, nous observons ses réactions, sauf que nous avons accès aux pensées et aux ressentis de la jeune femme : « Je veux bien dire la vérité, toute la vérité, mais on dirait qu’ils essayent de faire un puzzle en ne s’occupant que d’un seul morceau. » (Page 10). Ce qui est exactement notre cas. L’auteur ne nous donne qu’une partie des pièces du puzzle, à nous de reconstituer l’image finale… Cette connivence aurait-elle pour seul but d’endormir notre méfiance??

L’intrigue

Saskia Parker a disparu la veille au soir. Aussitôt, les soupçons de la police pèsent sur Angela Parker, qui l’a bien connue. Pourquoi elle précisément ? On ne le sait pas avant la page 69 quand l’inspecteur lui déclare qu’elle est interrogée en tant que témoin assisté, qu’elle n’est pas mise en examen…enfin, pas encore. Mais d’emblée, la jeune femme pose une question cruciale : « Vous voulez vraiment savoir ce qui s’est passé ? » (Page 12)… Et le lecteur de crier : « Ouiiiiiiiiiiii, nous voulons TOUT savoir !!! »

Les parents d’Angela Petitjean, qui ont longtemps bourlingué à droite, à gauche, ont décidé de se poser à Cove, une petite ville du Vermont, lorsqu’elle était encore enfant. A quinze ans, elle entre au lycée. Élève brillante, elle est néanmoins différente des autres ados avec lesquels elle ne cherche pas spécialement à se lier ? Jusqu’à ce qu’elle fasse la connaissance de H.P., un beau garçon aux yeux bleus qui fait craquer toutes les filles du lycée. Très vite, il se montre très protecteur avec Angela qui restera son amie intime jusqu’à ce qu’elle devienne sa petite amie à la fin de l’année de Terminale.

Partie faire ses études à Oxford où elle rencontre Freddy Montgoméry, brillant étudiant en biochimie, devenu son meilleur ami, Angela n’oublie pas H.P. qui lui rend visite au printemps suivant accompagné de son copain de toujours Ezra. C’est là qu’ils feront la connaissance de Saskia, jeune Australienne, qui deviendra la femme d’H.P. ; se noue alors une relation malsaine entre les trois jeunes gens, une sorte de triangle amoureux qui les mènera jusqu’au clash inévitable… Jusqu’à la disparition de Saskia…

Les personnages

  • Angela Petitjean : narratrice ; 26 ans, cheveux noirs longs ; très jolie fille mais n’a pas conscience de sa beauté ; ne cherche pas particulièrement à se faire des amis, même à Oxford ; ne sort pas souvent le soir.
  • H.P. Parker : grand, mince, la peau mate, les cheveux blonds, yeux bleu clair ; très musclé ; capitaine de l’équipe de natation à 17 ans; toutes les filles se jetaient littéralement à ses pieds.
  • Saskia Parker : frêle, de petite taille, des boucles blondes, des taches de rousseur sur le nez; prof de snowboard quand ils la rencontrent.
  • Ezra : meilleur ami de H.P. ; cheveux coupés court sur les côtés, simulant une fausse iroquoise ; dents blanches, visage bronzé avec des fossettes aux joues ; yeux marron ; des origines italiennes.
  • David Petitjean : père d’Angela, acteur amateur ; a fait ses études à Yale. Passe tout son temps à la bibliothèque de Cove où il travaille ou dans son bureau pour ses recherches sur la Grèce antique.
  • Shelley Petitjean : mère d’Angela ; actrice amatrice; physique (poitrine osseuse) qui correspond à sa personnalité froide comme un glacier : « petit à petit, elle vous pétrifie et vous prend tout. » (Page 88).
  • Inspecteur J. Novak : spécialisé dans les homicides.
  • Freddy Montgoméry : porte une chevalière au petit doigt ; cheveux coupés très court, un peu ventripotent ; étudiant en troisième année de biochimie.

Angela et ses parents : entre sa mère qui ne pense qu’à lui inculquer de bonnes manières : « Chérie, on ne dit pas quoi », on dit « je te demande pardon ». Et boire du yaourt, ça fait garçon manqué » (Page 30), et son père qui ne s’occupe que de ses recherches « Il connaissait tout d’Orphée et rien de moi » (Page 30), rien d’étonnant à ce que Angela soit une adolescente renfermée, qui ne cherche pas le contact avec les jeunes de son âge.

Angela et H.P. : Sa personnalité introvertie peut expliquer l’ attachement presque viscéral qu’elle éprouve pour H.P. et sa difficulté à tourner la page lorsque ce dernier se marie avec Saskia. Elle ne peut tout simplement pas envisager de se trouver, de respirer loin de lui, comme deux âmes sœurs : « Entre H.P. et moi, c’était le bonheur total. Ce n’est pas une histoire d’amour. Ou à tout le moins, ce n’est pas uniquement une histoire d’amour. C’est aussi une histoire d’une extrême dépendance. C’est ça que vous devez comprendre. » (Page 86) => Car c’est sans doute là et pas ailleurs que réside le nœud de l’intrigue, dans la personnalité de la jeune femme…

Les lieux

Le récit se situe principalement dans deux endroits n’ayant rien en commun, ni la situation géographique, ni l’architecture, et encore moins l’histoire : l’un, la petite ville de Cove, en Nouvelle-Angleterre, plus précisément dans l’état du Vermont, un endroit perdu au fin fond de l’Amérique dont le centre-ville est composé « d’une quincaillerie, quelques bars (…) La patinoire ressemblait à un abri anti-aérien datant de la Guerre froide. » (Page 17).

L’autre, la prestigieuse université d’Oxford, en Angleterre, avec son cachet, son histoire millénaire, son rayonnement international, ses codes et ses rites ancestraux ; c’est comme si on se retrouvait plongé dans un autre univers, issu directement du passé sans que rien, ou presque, n’ait changé. « Une vieille église, argentée par les siècles, domine toute la place. Sous vos pieds, des pavés polis par des millions de passages. (…) Plus d’une centaine de vélos rouillés, beaucoup avec des paniers d’osier, sont garés le long de ses grilles noires, sans que personne ne les vole. »

Ce lieu revêt une importance toute particulière dans l’histoire car il symbolise l’ouverture possible d’Angela au monde, la possibilité cachée quelque part au plus profond d’elle-même de s’affranchir de sa dépendance à H.P.. On peut d’ailleurs se poser la question suivante et ré-écrire le scénario et explorer les différentes possibilités et leurs conséquences, comme au cinéma: si Angela était restée à Oxford, cette histoire se serait-elle produite ? Ou pas ? « …je n’ai aucune affinité avec Cove. A Oxford, le déclic s’est fait à la minute où j’y ai posé le pied (…) Ce jour-là, pour la première fois, j’ai passé une porte qui s’ouvrait dans une porte. les entrées de tous les collèges sont d’immenses portes de bois qui restent toujours fermées à clé, des clés de fer du Moyen-Age. Je n’avais encore jamais vu de porte dans une porte : j’avais l’impression d’être dans un livre pour enfants, où les souris vivent dans les plinthes. » (Page 93). => Le symbolisme de la porte est ici très fort que je ne peux m’empêcher de faire le rapprochement avec le passage du livre de Lewis Carroll quand Alice devenue trop grande ne peut sortir par la porte de l’endroit où elle se trouve. Selon l’Encyclopédie des symboles, la porte symbolise l’accès à un espace dérobé (une autre vie possible pour Angela si elle était restée à Oxford ?), l’entrée dans un espace fondamental.

Dans la Rome ancienne, le dieu Janus avait pour mission de surveiller l’Entrée et la Sortie représentées par la porte de Janus (porte d’entrée se disait janua en latin) qui était double, tout comme le dieu lui-même qui avait deux visages, car on pouvait la passer dans les deux sens ; elle était également une porte symbolique qui permettait de passer d’une année à une autre, d’une phase d’un cycle à une autre, mais surtout la porte qui introduisait les deux voies que l’on pouvait choisir sur son chemin de vie : janua caeli, porte du ciel ; janua inferi, porte des royaumes souterrains… certainement la voie qu’Angela a choisie.

Mon avis

Indéniablement, Notre petit secret est un roman qui possède de nombreux atouts qui en font un thriller très intéressant : des personnages en proie à des émotions intenses, difficilement ou pas du tout maîtrisées, même si je pense que parfois le personnage de H.P. reste un peu trop simpliste, sans réelle implication dans les événements dont il est le centre; une intrigue qui monte crescendo; un suspense savamment distillé autour de deux questions complémentaires : qu’est-il arrivé à Saskia ? Angela est-elle coupable ou innocente ? Si elle est innocente, comment parviendra-t-elle à se sortir des griffes de l’inspecteur ? Très vite, on comprend que pour avoir la réponse à cette question, il va falloir boire la coupe jusqu’à la lie ; certes, le fil est bien ténu mais il nous tient quand même en haleine.

Pas de véritable enquête dans ce thriller : on ne sait pas vraiment sur quelles bases Angela est soupçonnée responsable de la disparition de Saskia; on ne sait pratiquement rien des investigations policières, si d’autres protagonistes ont été interrogés, ce qui ressort des confrontations évoquées par l’inspecteur. Car, malgré un début qui commence comme une insignifiante bluette entre adolescents, ne vous y trompez pas : Notre petit secret est un roman très noir, un jeu du chat et de la souris très bien maîtrisé par l’auteur, reposant sur une double ambiguïté : Angela est-elle juste une femme amoureuse d’une jalousie maladive et malsaine ou est-elle à son insu manipulée par le couple Parker ?  Angela est-elle la seule responsable de la disparition de Saskia ou est-elle manipulée par sa mère et Freddy, qui semblent, à la fin, bien s’entendre ?

Qui de l’inspecteur ou d’Angela est le véritable maître du jeu ? Comme le dit la jeune femme, dans « le jeu du chat et de la souris, la seule façon de gagner pour la souris est de se jeter volontairement dans la gueule chat. » Vous voulez vraiment le savoir ?? Lisez le livre….

 

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