Rencontre avec l’auteur Jean-Louis VIOT pour son livre « Le panier à salade » aux éditions Esneval
Jérôme PEUGNEZ : Bonjour Jean-Louis VIOT, pouvez-vous nous décrire votre parcours ?
Jean-Louis VIOT : Je suis ancien policier, actuellement détective privé, Directeur Général Délégué de ESNEVAL-EDITIONS
– POLICE :
Entré dans la police en novembre 1972
Après plusieurs affectations dont l’une de 9 ans au commissariat de police d’Alençon (61), j’ai longuement exercé à DIEPPE où j’ai terminé Commandant Fonctionnel (muté à la Direction Centrale de la Sécurité Publique à PARIS mais restant détaché à DIEPPE où j’ai fait fonction de Commissaire jusqu’à 2008).
– DÉTECTIVE :
Depuis 2008 = détective privé (en tant qu’ancien OPJ de la police nationale j’en ai d’office la qualification professionnelle).
On ne peut obtenir cet agrément et exercer l’activité que dans un délai de cinq ans après avoir quitté la fonction policière, sauf autorisation du ministère de tutelle.
(en cas de dérogation = Commission de Déontologie de la Fonction Publique = possibilité d’exercer mais hors ressort des anciennes compétences territoriales durant 3 ans) – raison pour laquelle mon bureau est à EU (76)
– DIRECTEUR GENERAL DELEGUE ESNEVAL-EDITIONS
Depuis juin 2016, nous sommes 4 associés réunis par la passion de l’écriture et de la littérature à avoir constitué la SAS (Société par Actions Simplifiées) ESNEVAL EDITIONS pour réaliser et promouvoir l’édition d’œuvres intellectuelles destinées à être publiées.
(Esneval Editions, du nom de Gabriel d’Esneval, 1er roman de Gilles LECLERC son fondateur)
– MON PARCOURS LITTERAIRE :
J’écris depuis longtemps… Mon style : roman policier d’atmosphère, d’intrigue, de suspense.
J’ai écrit notamment :
– Le Polletais (1990) (La Vigie)
– La Poudre d’Escampette (1992)
– Une Belle Garce – (Fayard) Prix du Quai des Orfèvres (1994) – édité à 250 000 exemplaires + pays francophones
(Prix du Quai des orfèvres : fondé en 1946 par Jacques Catineau – Originalité : Prix décerné sur manuscrit anonyme – 8ème policier depuis 46 à obtenir le P q O) – 2ème des meilleures ventes nationales le 21 janvier 94)
– édité en Italie sous le titre : « Le Amiche di Veronique » par (Il Giallo Mondadori) (1995)
– édité en Chine (en Mandarin) (2000) par Henan Renming Publishing House » sous le titre : « La Belle Femme Serpent »
– Chantage en Poste restante (2015) (ESNEVAL EDITIONS) – Prix Fondcombe 2015
et puis pour la jeunesse :
– 1515 Code Marignan, L’Orphelinat des Animaux, Le Phare de Pise, Souvenez-vous des Vases de Tatie Kung Fu, Poison d’Avril, La Chaloupe.
– Le Boulevard (Je Bouquine – Bayard Presse)
– Tout Faux Ludo (Casterman) (illustré par Christophe Rouil)
– Les Cent Mille Briques (Casterman) – Illustré par David Sala
. Nominé Prix Jeunesse Télévision (2002)
. Prix des Lecteurs (2003) (53 collèges)
. Prix des Dévoreurs de Livres (2003)
. Prix Délire des Livres (2002 – 2003)
et qui a été lu et étudié dans nombreux collèges de France
– Pinot la Lune (2015) (ESNEVAL EDITIONS)
– Pour les Beaux Yeux de Marion (id)
également :
– conseiller technique sur séries tv (notamment « La Femme d’Honneur » avec Madeleine Sultan et Joseph Périgot (Pierre Legrand)
– Consultant et participation active à des contre enquêtes journalistiques avec Madeleine Sultan et Jean-Charles Deniau (affaire Dominici = suite parution en 97 chez Flammarion du livre de William Reymond, journaliste d’investigation : « Dominici non coupable, les assassins retrouvés » puis « Lettre ouverte pour la révision » – ouvrages visant à la réhabilitation de Gaston Dominici et à la révision du procès sollicité par Alain Dominici, petit fils de Gaston Dominici. – Alain Dominici était bébé à l’époque de l’affaire – 1952 ) – Ce livre de W Reymond sera adapté à la télévision avec Michel Serrault et Michel Blanc).
Jean-Charles Deniau et Madeleine Sultan rapporteront nos travaux d’enquête dans leur livre « Dominici, c’était une affaire de famille » où la plupart des allégations de William Reymond seront démontées avec preuves à l’appui. Ce travail fera l’objet d’un documentaire « L’affaire Dominici : ses mystères, ses impasses, ses mensonges » diffusé dans le cadre de l’émission télévisée « Docs et débats » animée par Gérard Carreyrou.
JP : Comment vous est venu l’envie d’écrire ? A quelle période ?
JLV : J’ai commencé à écrire très jeune. J’étais ado. A 10, 12 ans, j’écrivais de très nombreux poèmes. A 14 ans, je me suis lancé dans 2 romans policiers jamais achevés.
Pour moi, l’écriture a toujours été une passion. Je me souviens que lorsque je n’étais pas 1er voire second en « rédac » ou en « disserte » au ; bahut, j’étais dépité. Sans me vanter, ça ne m’est arrivé qu’une fois, je crois…. je n’étais que 3ème.
JP : Quelles étaient les lectures de votre enfance ?
JLV : Quels bons souvenirs ces lectures d’enfance avec les collections de la bibliothèque rose puis verte. Enid Blyton avec le « Club des cinq » et le « Clan des sept ».
Et puis très vite, je me suis imprégné de Gilbert Cesbron (« Il est plus tard que tu ne penses », par ex.). Puis Pierre Benoit, Jean-Paul Sartres, Simenon….
Par la suite, j’ai été très influencé par les romans de Charles Exbrayat. Je crois les avoir tous lus.
Evidemment j’ai lu tout « Borniche » et les bouquins d’autres confrères ainsi que les différents « Prix du Quai des Orfèvres ».
JP : Quel est votre « modus operandi » d’écriture ? (Votre rythme de travail : le matin, soir, combien de temps…)
JLV : Non, il n’y a rien d’établi. Je ne m’impose rien. J’écris quand j’en ai envie. L’écriture doit être un plaisir, non une contrainte. J’écris principalement dans la journée. La nuit, je dors… même si mes personnages et mon histoire ne quittent plus mes pensées. Alors, pour moi :
COMMENT NAIT UN ROMAN, UNE HISTOIRE
L’inspiration d‘abord : où piocher cette inspiration ? Quelqu’un a dit un jour : « vivre est une source suffisante d’inspiration ! »
En fait, l’inspiration découle directement du pouvoir d’observation que l’on a.
Comme le disait Blaise Cendrars (écrivain suisse et français mort en1961 à Paris) :
« Je ne trempe pas ma plume dans un encrier mais dans la vie »
L’inspiration vient des spectacles de la vie, de l’environnement, des histoires ou des évènements de tous les jours, de certaines circonstances, de personnages rencontrés, de situations données, de conversations, des conditions d’existence ou du sort de quelqu’un.
Ainsi, par exemple, dans « Une belle garce » le vieux COUSSINELm’a été inspiré par un personnage que j’avais rencontré avant d’écrire ce roman.
Il peut s’agir aussi d‘un déclic : exemple pour mon roman « Les Cent mille briques » destiné aux ados : quand j’ai su que ce nom était celui que les anciens du coin donnaient à la prison de Rouen, ça m’a donné l’idée d’en faire le titre de mon histoire que je n’avais pas encore bâtie dans ma tête.
Et puis, évidemment, l’envie de romancer, de créer une histoire fictive en y intégrant le maximum d’éléments crédibles piochés dans la vie réelle.
COMMENT ECRIRE UN ROMAN (selon moi)
Il faut d’abord l’intrigue : Un thème, un sujet, une histoire qui a pris forme dans la tête. Une intrigue fruit de l’inspiration dont on vient de parler.
- Des personnages : il faut créer leur identité, leur CV, leur physique. Il faut les faire vivre et vivre avec.
Mes personnages, je les imagine à partir de personnes que j’ai pu croiser dans ma vie et qui peuvent correspondre au rôle que je veux leur donner. Ou bien, et le plus souvent, pour créer une personnage, je mélange plusieurs caractéristiques de différentes personnes que je connais ou que j’ai pu croiser dans mon existence. - Un plan = comme pour la construction d’un édifice : d’abord le gros œuvre : définir le fil conducteur, la trame ; puis le second œuvre pour définir les chapitres, puis les finitions, ou l’habillage. Ce sont ces paragraphes que l’on va insuffler dans les chapitres.
La structure, le canevas est en place. Il n’y aurait plus qu’à suivre le plan, le cheminement. Mais, comme dit : Giorgio Agamben (philosophe italien). « Ecrire serait si triste si l’on ne déviait jamais de son plan ».
Parfois chemins détournés pour intrigue, pour emmener le lecteur par la main sur des chemins détournés (un peu comme si on lui bandait les yeux)
JP : Lorsque vous écrivez la première ligne de vos romans en connaissez-vous déjà la fin ?
JLV : En général, oui, même si je peux y aboutir par d’autres chemins que ceux prévus dans mon plan. Comme je le dis plus haut.
JP : Dans vos romans, y a-t-il des personnages qui existent vraiment, dont vous vous êtes inspiré ?
JLV : Je crois que je réponds à cette question juste avant.
JP : Le parcours a t-il été long et difficile entre l’écriture de vos livres et leur parution ?
JLV : Comme beaucoup d’auteurs, c’est forcément la galère. Rares sont ceux qui parviennent rapidement à être édités à compte d’éditeur. En ce qui me concerne, j’ai obtenu le « Prix du Quai des Orfèvres » ce qui m’a ouvert de nombreuses portes. J’ai été édité à 350000 ex. chez Fayard. Ensuite, j’ai été édité pour les « ados » chez Bayard Presse, puis Casterman. J’ai eu beaucoup de chance.
En 2015, j’ai rencontré Gilles LECLERC qui venait de créer : ESNEVAL-EDITIONS
J’ai adhéré au projet pour promouvoir des nouveaux talents.
Comme je le disais, bon nombre d’auteurs n’ont pas la chance d’être édités, il leur reste alors l’édition à compte d’auteur et l’autoédition.
A ESNEVAL EDITIONS, nous mutualisons nos efforts pour la promotion de ces nouveaux auteurs. Nous nous battons depuis 2016.
Dans tous les cas, le secret de la réussite passe par la diffusion et la distribution.
Malheureusement, il faut savoir qu’un :
– distributeur = prend 50% (mais s’occupe du pourcentage libraire)
– qu’un libraire prend 30%
Restent les annonces, les pubs, les articles dans les médias et surtout les réseaux sociaux
Les auteurs, comme la maison d’éditions, doivent faire du networking en mettant en place des stratégies, en allant à la rencontre du public (salon, conférences, dédicaces etc).
Nous apprenons à nos auteurs la mutualisation et les bases du marketing.
Qu’il opte pour l’édition traditionnelle, l’édition indépendante ou l’édition à compte d’auteur, l’auteur sera toujours le meilleur agent commercial pour son livre : personne que lui n’en fera meilleure promotion.
Cela n’a rien de dégradant pour un auteur : toutes les stars de la littérature sont souvent des génies du marketing.
Bien sûr nous avons nos « vitrines » comme AMAZON, la FNAC ; mais ce ne sont que des vitrines qui ne rapportent rien au niveau des ventes pures.
Pour résumer très succinctement, sur un livre de 20 euros vendu par ces réseaux, il ne reste que 1,80 euro à partager entre l’éditeur et l’auteur.
Quant au numérique : Il faut savoir que cela coûte très cher : normes américaines. Pour un livre, il faut compter de 350 à 450 euros pour le mettre en ligne. Et on nous prend 40% sur les ventes.
JP : Pouvez nous parler de votre livre « Le panier à salade » aux éditions Esneval, qui relate votre vécu au sein du commissariat de Dieppe ?
JLV : JUSQUE LA, DES ROMANS, ALORS : POURQUOI LE PANIER A SALADE ?
D’abord la pression de l’entourage, évidemment quand je racontais toutes ces histoires, ces affaires, ces anecdotes… on me disait : « tu devrais écrire un bouquin là-dessus ! » Personnellement, je n’étais pas très « partant » pour ce genre d’exercice. Moi, je préfère le roman, les histoires que j’invente…
J’ai cédé… Le plus dur c’était de décrire les anecdotes, les situations cocasses, certains collègues « hauts en couleurs », sans ternir l’image de l’institution policière que j’ai servie fièrement.
Comme je le précise d’ailleurs dans mon livre, pourquoi ce titre « Le Panier à salade », qui fait allusion au fourgon de police bringuebalant aux vitres grillagées baptisé ainsi par analogie avec le panier en fil de fer dans lequel nos grand-mères secouaient leur salade. Et qui est, dans une seconde acception, une chronique qui rassemble un mélange de faits bien réels, un assortiment d’évènements parfois tragiques et surtout une succession d’affaires, d’histoires et d’anecdotes assaisonnées d’humour.
Bien entendu, l’image du flic boissonneur, d’habitude ou de convivialité, reste anecdotique, vraisemblablement surannée et aucunement représentative de l’ensemble de l’institution.
Pendant longtemps, les flics n’avaient pas de psychologue. Leur seule cellule psychologique, c’était le débriefing autour de l’apéro.
Pourquoi le Panier à Salade ?
JLV : Comme la Police Judiciaire ou la Police aux Frontières, entre autres, la Sécurité Publique est l’une des grandes directions actives de la Police Nationale. C’est d’elle dont dépendent tous les commissariats de France qui assurent en permanence protection, assistance et maintien de l’ordre public. C’est elle qui gère toutes les interventions de police-secours. C’est elle qui arrive la première sur l’événement.
Si elle gère les dossiers de police administrative, elle traite également les enquêtes judiciaires qui ne sont pas spécifiquement dévolues aux autres services spécialisés comme ceux de la fameuse et légendaire PJ si souvent mise en scène au cinéma, à la télé ou dans les polars.
En raison de la grande diversité de leurs missions, les services de Sécurité Publique sont considérés comme les « généralistes » de la Police Nationale. Des femmes et des hommes à tout faire qui ne tiennent pas toujours la vedette, loin s’en faut.
C’est pourquoi : « Loin des films et polars qui mettent en scène des supers flics, exemplaires ou borderline, audacieux ou déjantés, loin de « MR 73 », de « 36, Quai des Orfèvres » d’Olivier Marchal ou de « L.627 » de Bertrand Tavernier, loin des grands services de Police Judiciaire ou de renseignements, loin des unités spécialisées ou des unités d’élites, j’ai voulu raconter dans le Panier à Salade, et à travers des situations et des personnages parfois déjantés, quelques passages de vie en commissariat au gré des temps.
Comment c’est fait l’écriture de ce livre ? Comment se souvenir de toutes ces histoires ?
JLV : Déjà, vous avez, dans ce livre, des faits de nature à marquer la mémoire d’un flic. Horreur, drame, situations cocasses… tout ça ne peut que rester imprimé dans une mémoire. Ensuite, le fait de rencontrer régulièrement des anciens avec lesquels nous évoquons inévitablement les vieux souvenirs, les détails, parfois oubliés, reviennent au galop.
Pouvez-nous nous confier une anecdote qui a marqué votre carrière ?
JLV : Le Panier à salade en est rempli… Ce qui marque un flic, du moins pour moi, ce sont les situations dramatiques, de déchirement, d’horreur…, les cris d’une mère à qui on annonce que sa gamine de 15 ans est passée sous les roues d’un 35 tonnes…. par exemple.
Avez-vous reçu des remarques surprenantes, marquantes de la part de lecteurs, à propos de vos livres ?
JLV : Les critiques sont très élogieuses et j’en suis ravi. J’ai eu 2 réactions marquantes de lecteurs.
Une femme, d’abord. Elle m’a adressé un mail pour me remercier d’avoir parlé avec beaucoup de décence et d’humanité du suicide d’un collègue avec son arme de service dans le commissariat. Cette femme était une proche de la victime.
Un homme, ensuite. Il m’a donné rendez-vous pour que je lui dédicace mon bouquin qu’il venait d’acheter. Une « vieille connaissance »… Il m’a rappelé une affaire où je parle de lui sous le ton de la boutade…
JP : Avez vous d’autres passions en dehors de l’écriture (Musique, peinture, cinéma…) A part votre métier, votre carrière d’écrivain, avez vous une autre facette cachée ?
JLV : Oui. Mais elle le restera. Elle est d’ordre philosophique.
JP : Avez-vous des projets ?
JLV : Un futur bouquin, évidemment.
JP : Quels sont vos coups de coeur littéraires ?
JLV : J’aime beaucoup les romans de Giacometti / Ravenne.
Évidemment, j’aime les romans de nos auteurs édités chez ESNEVAL. Je ne peux en citer un en particulier car ils sont tous bons.
JP : Avez-vous un site internet, blog, réseaux sociaux où vos lecteurs peuvent vous laisser des messages ?
JLV : Je n’ai qu’un FB pour l’instant. Je vais faire un blog très prochainement.
Voilà, j’espère avoir répondu à vos attentes.
Bien cordialement
Jean-Louis Viot
JP : Merci Jean-Louis VIOT d’avoir pris le temps de répondre à mes questions.
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