Elsa ROCH : Ce qui se dit la nuit

Avec  » Ce qui se dit la nuit « , Elsa Roch montre tout son talent et elle s’inscrit dans les révélations du thriller français.

Elsa ROCH : Ce qui se dit la nuit
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Présentation Éditeur

Rentrer chez soi.
Tout oublier après le cadavre de trop, vingt ans dans la police à collectionner les «ides»: homicides, infanticides, parricides… À peine quadragénaire, le commissaire Amaury Marsac a l’impression de porter mille ans de noirceur sur ses épaules. Il n’en peut plus. Il fuit Paris direction le village de ses origines.

Mais alors qu’il renoue avec Elsa, son amour de jeunesse, une vieille dame est retrouvée morte chez elle, égorgée et tondue, un morceau de tissu bleu cousu au niveau du coeur.

Cette femme, c’est Marianne, une figure bienveillante de son passé. Horrifié, Marsac s’impose dans l’enquête. De nouveau happé par les sombres coulisses de l’âme humaine, il va devoir démêler passions amoureuses et superstitions, blessures de l’enfance et cicatrices de l’Histoire jamais refermées.

Origine Flag-FRANCE
Éditions Calmann Levy
Date 8 février 2017
Éditions Livre de Poche
Date 7 février 2018
Pages 288
ISBN 9782253092674
Prix 7,40 €

L'avis de Lucie MERVAL

Un flic du 36 au bord de la rupture après l’affaire de trop retourne dans le village de ses origines. Une semaine où sa plus grande blessure ne va pas cesser de le hanter, où des amours « oubliés » vont renaître et la mort va frapper… Marianne, une amie, considérée par la plupart des habitants est retrouvée assassinée. Le flic en lui va alors tenter de faire la lumière sur cette affaire.

C’est une enquête avec les moyens contemporains mais elle est chargée d’effluves du passé, de mystère, d’amour. C’est un roman noir, psychologique qui touche grâce à sa belle galerie de personnages et la plume de l’auteur. En un mot, ce premier roman est hypnotique !

Elsa Roch - ce qui se dit la nuit (mise en scene)

L'avis de Sophie PEUGNEZ

Marsac a fuit Paris à bout de souffle. Usé, dévasté, sa hiérarchie l’a poussé à prendre des vacances. Il a pété les plombs après qu’un père est prétendu que sa fillette de six ans soit tombée accidentellement par la fenêtre. L’âge qu’avait la sœur d’Amaury lorsqu’elle a disparue laissant une plaie béante chez son frère que le temps n’arrive pas cicatriser.
Elsa est psy à la brigade des mineures. Elle est en plein burn-out. Ecoeurée par la violence subie par les enfants notamment de la part de leurs proches. Mais elle ne peut s’effondrer totalement, elle doit tenir pour sa sœur Manon, petite fille enfermée dans un corps de femme. Un accident de naissance ne lui a permis le même développement intellectuel que les autres.

Cela fait dix ans qu’ils ne sont pas vus mais le trouble qu’ils éprouvent l’un envers l’autre est toujours aussi fort. Mais aucun de ses deux êtres à fleur de peau n’arrive vraiment à faire un pas l’autre.
Et pas vraiment le temps de s’occuper à renouer avec le passé ou à savourer l’air de la campagne. Marianne, une femme âgée a été retrouvée la gorge tranchée, tondue et un morceau de tissu cousu sur la poitrine. Qui a pu commettre ce crime odieux ? Ses propres imbibés du soir au matin ?
Elle savait guérir avec les plantes. Mais certains la surnommaient la sorcière, crachaient sur son passage et l’insultaient.

Marsac qui devrait être un simple touriste ne peut inactif. Il éprouvait des sentiments profonds pour cette femme. Dans ce pays de taiseux, de « on-dit », il va devoir gratter la surface, ne pas se laisser voiler la face par ses souvenirs. Et surtout ne pas laisser le fantôme de Solène tétaniser son esprit.
Et ses investigations sont loin de réjouir les flics locaux qui pour le canaliser lui ont mis un jeune adjoint dans les pattes.

Avec «Ce qui se dit la nuit » publié aux éditions Calmann-Levy et aux éditions Le Livre de poche, Elsa Roch montre tout son talent et elle s’inscrit dans les révélations du thriller français. Le ton est juste sans fioriture. Elle arrive à rendre le parler « des locaux ». Son texte s’ancre dans la campagne profonde et les traditions sont encore très vivantes. Aller voir le rebouteux guéri des maux pour lesquels la science modern ne peut rien. Avoir peur d’une malédiction. Le poids de la rumeur. Elle donne la parole aux taiseux. Elle rend hommage aux doigts fripés, aux visages burinés par les ans et le grand air. Avec tendresse et lucidité.

Le personnage de Manon est très émouvant et troublant en même temps. Jusqu’à quel point est-elle consciente de ses actes ? Et dans son univers, quelles sont ses priorités ? L’expérience d’Elsa Roch en temps que psy spécialisée dans les troubles autistiques amène vraiment une justesse sur le comportement de cette femme-enfant.

Tant de choses à dire sans vouloir déflorer les mystères du récit. Comment ne pas évoquer cette petite fille juive dans les camps qui va voit sa famille mourir et qui veut vivre.
Il y a une dimension quasi-mythologique dans son thriller. Les « ides » sont les divinités du foyer que Marsac veut fuir. Ne plus vivre au milieu des homicides, infanticides, matricides, parricides, suicides… Marsac figure héroïque qui refuse de l’être. Son talon d’Achille, sa jeune sœur Adèle qui a disparu et il est écrasé par le poids de la culpabilité. Son flic a la fois la profondeur et le charisme d’un personnage comme Wallander d’Henning Mankell et en même tems il y a vraie modernité dans le traitement.

Extrait de la page 247 : Echange entre Ghislain (journaliste) et Marsac :
« Ghislain sourit encore. Ce flic n’était pas banal. Un vieux bouquin de Dostoïevski petit format dépassait de la poche droite de son blouson.
(…) Et puis flic, ce n’est pas mon trip. Jouer les héros, je ne sais pas faire.
Nous n’avons pas besoin de héros. Des héros, il y en a plein les cimetières.
Des flics aussi. Vous avez besoin de quoi, alors ?
D’hommes et de femmes, qui cherchent. Et qui trouvent. De préférence la vérité. »

Un alliage subtil entre une culture classique et une tonalité très actuelle. De nombreuses références littéraires et musicales notamment au grand Jacques m’ont séduite car elles s’intègrent subtilement au texte. C’est une invitation à la découverte, à la stimulation intellectuelle.

Un des thèmes forts de l’œuvre d’Elsa Roch que l’on retrouve à la fois dans «Ce qui se dit la nuit » et dans «Oublier nos promesses » est celui de l’absent. Lorsque les absents prennent plus de place que le présent. Devoir se lever, mettre un pied devant l’autre malgré la douleur de la perte (ou l’absence de réponse), avec un être cher disparu qui est comme un membre fantôme. La douleur peut s’amplifier tout à coup, tout occulter alors que lorsqu’on regarde, il n’y a que le vide. Etre mutilé d’une partie de soi-même alors que c’est parfaitement invisible aux yeux des autres.

Habile thriller qui évoque les zones d’ombre de chacun et fait frissonner. Les pistes se dessinent, trouverez-vous la bonne ? J’avoue je n’avais pas vu. Juste noté la référence d’un passage qui me plaisait beaucoup et je me suis aperçue ce soir que c’était l’une des clefs du récit. Je suis totalement bluffée et séduite.

Il y a des auteurs comme Elsa Roch où l’on se dit pourquoi je ne l’ai pas lu avant et je n’ai qu’une envie en parler et inviter d’autres lecteurs à vibrer à travers ses livres

La chronique vidéo

Elsa Roch en chronique vidéo

Chronique vidéo sur « Ce qui se dit la nuit » et « Oublier nos promesses »...

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C’est un roman noir, psychologique qui touche grâce à sa belle galerie de personnages et la plume de Elsa Roch.

L'avis de Yannick P.

Mon 1er roman d’Elsa Roch pour une fine descente dans le mal qui ronge les autochtones berrichons.

Dès les premiers chapitres, le prologue nous projette dans un camp de concentration. Une fille de cinq ans. L’immonde, l’infect. Puis le chapitre 1, la découverte du commissaire Amaury Marsac, du 36. Il est à bout. Trop de cadavres sont passés sous ses yeux. Un besoin le pousse à revenir parmi les bocages du Berry lieu de son enfance. Une enfance particulière marquée par la disparition de sa sœur Solène. Il arrive alors qu’un crime barbare vient d’être perpétré sur la personne de Marianne Touret. Cette herboriste était proche quand Amaury a perdu Solène.

Dans la brume berrichonne, la noirceur prend alors ses aises autour d’une kyrielle de personnages. Chacun est porteur d’une lourde charge. Le passé. Leur passé. La violence est souterraine, pesante, jamais gratuite. Peu de liens avec l’époque, l’auteur fait fi de la technologie, de l’hémoglobine gratuite. C’est bien un roman autour des hommes et des femmes, de ce qu’ils ont dans la tête dont il s’agit.

Le cœur de Ce qui se dit la nuit, d’Elsa Roch tourne autour de ses personnages. Tous sont sincères. Ils ont leurs failles. Ils sont pétris de doutes. Le thriller se drape d’un air de roman psychologique et parfois même philosophique où les non-dits et les mensonges confèrent une ambiance particulière. Chaque fêlure, la moindre fissure devient un interstice qu’il faut combler.

Dans une écriture soignée, Elsa (Roch), dessine leurs secrets. Elle les esquisse avec finesse Marianne, Manon la sœur d’Elsa, dont le cerveau a subi un manque d’oxygène à la naissance. Manon est une belle jeune femme. C’est la lumière de ce roman, elle est faite d’innocence, elle voit le monde à travers ses yeux d’enfant. Elle a la fragilité de la flamme d’une bougie, toujours à deux doigts de se sentir souffler. Pourtant elle confère un puissant flot d’humanité. Et il y a Elsa. L’amour inavoué d’Amaury, qui se dévoue à sa sœur. Côté hommes, ils sont plus triviaux. Les deux fils de Marianne, violents et alcooliques. Les Vieux, Ferdinand et Henri sentent le local, le terroir. Des hommes du cru, encore sensibles aux superstitions, à la sorcellerie. Et au milieu, des flics perdus entre conjectures et hésitations. Quand ils s’ouvrent, c’est pour constater leurs errements sur leurs métiers et leurs relations aux femmes.

Nous sommes loin des thrillers violents. Tout est plus subtil. Ce qui se dit la nuit, est un polar. A côté de Marsac, il y a Marianne, sa mort. Avec Marsac, on cherche la vérité sour les rainures, on doute de la faiblesse des uns, de lâcheté des autres. Chacun semble porter ses fautes et ses secrets. J’ai mis de côté ce qui pouvait me réjouir, me faire sourire. Pourtant, le tout est plaisant. Le côté grave confère à ce polar psychologique une onctuosité dramatique. Tout comme les citations de Philippe Léotard, ce blessé de la vie, qui précèdent chaque chapitre. Ils sont délicieux de nostalgie.

L'avis de Léa D.

Après avoir entendu de bonnes critiques, j’étais très curieuse de découvrir la plume de Elsa Roch !

Amaury Marsac est commissaire, et alors qu’il n’a qu’une quarantaine d’années, il a l’impression d’avoir vécu le double avec les horreurs qu’il côtoie dans son métier. Il décide de quitter Paris pour retourner dans le village où il a grandit. Là-bas, il renoue avec Elsa, son amour de jeunesse. Mais la mort ne va pas le laisser s’en tirer comme ça : une vieille dame est retrouvée morte. Cette dame, c’est Marianne, une femme qu’il connaissait. Marsac s’impose sur l’enquête, plaidant sa connaissance de l’endroit et de la victime, ainsi que son rang.

Passion, superstition, vieilles blessures… Cette enquête ne sera pas de tout repos !

Ce qui se dit la nuit nous plonge dans l’histoire d’un petit village secoué par un meurtre horrible. Dans un si petit endroit, les rumeurs vont bon train, tout le monde a son avis sur la question et parle de cette affaire. Et tout le monde a surtout son avis sur les personnes coupables, sans se soucier de l’enquête en cours !

Avec ce roman, Elsa Roch s’inscrit dans les très bonnes découvertes : Ce qui se dit la nuit est un polar rural très bien construit du début à la fin, prenant, fouillé, et très bien écrit. Chacun des personnages sonnent juste : il y a Marsac, rongé par son travail et la disparition de sa sœur. Elsa, toute dévoué à sa sœur Manon et très pudique. Manon est une jeune femme fragile, innocente, une âme d’enfant. Et puis, il y a les gens du cru : souvent avinés, certains sont des brutes, d’autres sont des rebouteux, il y a tout une galerie de différents personnages chez Elsa Roch !

La vérité n’est pas facile à découvrir, elle se cache, il y a des failles, des blessures, le tout subtilement présenté.

Je recommande vivement Ce qui se dit la nuit !

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2 Commentaires

  1. ?Je loue le talent de Sophie Peugnez qui a si bien parlé de mes romans ! Un immense merci à elle, a Zonelivre, sans oublier Lucie Merval pour sa magnifique chronique de Ce qui se dit la nuit. ?

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