Philippe LAGUERRE : Manhattan Marilyn

Philippe LAGUERRE - Manhattan Marilyn
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Présentation Éditeur

Ancienne Marine en Irak, Kristin Arroyo découvre dans les affaires de son grand-père décédé – un célèbre portraitiste – des clichés inédits de Marilyn Monroe. Aidée par un photographe, elle décide de monter une exposition.

Malheureusement, rien ne se passe comme prévu : une mystérieuse organisation s’en prend à eux. Pourchassée, traquée, la jeune femme va rapidement comprendre que son destin est lié à celui de Marilyn Monroe et s’efforcer de reconstituer les derniers jours de l’égérie hollywoodienne afin de percer le mystère qui entoure sa disparition.

Origine Flag-FRANCE
Éditions Critic
Date 19 mai 2016
Pages 348
ISBN 9791090648562
Prix 19,00 €

L'avis de Cathie L.

Manhattan Marilyn a été publié par les éditions Critic en 2016. Son style est fluide, agréable à lire. Sa construction, plus complexe, alterne les nombreuses scènes d’action dans lesquelles la tension dramatique nous pousse à tourner les pages pour savoir si… Chut, à vous de le découvrir !!; avec des scènes plus intimistes chargées d’émotion comme lorsque Marilyn s’adresse au public du Madison Square Garden :

« Un silence s’était abattu dans le Madison. Un silence pesant, dont elle avait joui une brève poignée de secondes. Arrivée devant le micro, elle l’avait tapoté du majeur, comme pour savoir s’il fonctionnait bien. Un geste simple, inutile -des techniciens avaient vérifié le matériel tout l’après-midi-, mais dans l’assemblée tous les spectateurs avaient retenu leur souffle ». (Pages 14-15)

=> Un moment qui me fait regretter d’être née trop tard !!

Ainsi, Manhattan Marilyn est à mon sens un roman difficilement classable, tant les thèmes abordés sont riches et divers: thriller social ? Thriller politique ? Thriller policier ? Un peu des trois sans doute. Mais indéniablement un thriller qui s’appuie sur une documentation sérieuse et de réelles connaissances, notamment en ce qui concerne certaines techniques photographiques bien détaillées :

« Il commença la partie la plus minutieuse du travail, agrandissant d’abord le personnage puis se concentrant sur le journal. Il déposa la feuille blanche dans le premier bac où la photo apparut lentement. Ensuite il la plongea dans un deuxième rempli d’eau puis dans un troisième. Un véritable travail d’artiste qui avait disparu avec l’arrivée du numérique. » (Page 83).

Les thèmes développés dans Manhattan Marilyn:

L’impact de l’image, du travail du photographe, même si aujourd’hui il a notablement évolué :

« Au départ, la jeune femme ne vit pas bien où se situait l’art …Mais, après quelques minutes passées à les examiner, elle dut admettre que réussir de telles photographies n’était sans doute pas à la portée du premier venu. Il se dégageait de chacune d’elles une véritable alchimie entre la ville et les personnages. » (Page 43).

L’aspect social du roman avec une image de l’Amérique bien loin du rêve américain, même si aujourd’hui ce concept a perdu de sa force :

« Après avoir décroché une bourse à force de sueur, elle avait quitté son quartier pour l’université de New-York qu’elle avait fréquentée pendant deux années sans obtenir le moindre diplôme, écœurée par les professeurs ou le regard des autres étudiants plus fortunés, qui ne travaillaient pas le soir dans des fast foods pour un salaire de misère. Pour eux, elle était l’Hispanique: elle avait reçu une aide financière non pas pour son intelligence, mais à cause des quotas. » (Page 25).

Il y est également question de solitude, d’égoïsme, de marginalité avec l’évocation de tout un monde caché qui peuple les sous-sols de New-York (au passage, clin d’oeil à Relic, thriller de Preston and Child faisant également allusion à ces hommes et ces femmes qui vivent dans la clandestinité dans les couloirs de l’ancien métro new-yorkais).

Le contexte social et politique: Manhattan Marilyn nous offre une chronique de l’Amérique d’Obama dévoilant l’envers du décor : l’occupation du parc Zuccotti par les membres du mouvement de contestation OWS remettant en cause, par des actions pacifiques, le grand Capital, responsables selon eux de la pauvreté endémique, des millions de chômeurs, de la crise financière et des multiples maux gangrenant la société occidentale. Même si ce mouvement n’existe pas tel que décrit dans le roman, Philippe Laguerre propose ici une prise conscience, une amorce de réflexion :

« Alors oui, nous n’avons pas de leader, pas de programme politique à proprement parler, mais nous avons des idées. Dans le parc, nous nous réunissons pour approuver toutes les décisions démocratiquement. Pas par un vote majoritaire, mais par un large consensus. Loin de votre système politique dominé par les lobbies et les medias. » (Page 79)

=>Certes, le discours de Kristin n’est pas innovant mais chaque pierre ajoutée à l’édifice contribue à le rendre plus visible, plus fort…

L’intrigue

Kristin Arroyo, suite à sa rencontre avec le photographe Nathan, exhume d’anciens clichés pris par son grand-père, également photographe professionnel, parmi lesquels elle découvre des photos inédites de Marilyn Monroe, notamment un cliché où la star posait sur le quai d’une station de métro avec en arrière plan un homme lisant son journal, ou cet autre pris devant Cap Canaveral alors qu’à cette date tout le monde, y compris son agent, la croyait à Los Angeles.

C’est alors que Nathan propose à Kristin de monter une exposition originale : réunir les deux expositions sur OWS et une autre sur Marilyn à New-York en une seule sous le titre « Deux femmes rebelles à New-York » :

« Mon idée n’est pas tant de produire deux expositions que de trouver une angle original pour les deux. D’arriver à ce que l’une pousse l’autre vers le haut, et vice versa. Réfléchissez-y : quel meilleur moyen de promouvoir OWS que de lui attacher une figure comme Marilyn ? » (Page 57).

Pourtant, rien ne se passe comme prévu : par un malheureux concours de circonstance, Kristin est recherchée par la police pour le meurtre de Nathan, retrouvé assassiné dans les locaux de sa galerie, toutes les photos de l’exposition ayant disparu. Qui a assassiné le photographe et surtout pourquoi ? La seule solution pour la jeune femme est de se rendre invisible afin de mener son enquête pour se disculper.

Juste avant de mourir, Nathan lui avait laissé un message sur son répondeur. Qu’avait-il découvert de si important pour lui téléphoner à deux heures du matin ? Sa découverte avait-elle un lien avec les tueurs qui la poursuivaient dans toute la ville ? L’intérêt du FBI pour cette affaire avait-il un rapport avec les clichés inédits de Marilyn ? Si oui, quel secret recelaient-ils au point de tuer des gens ?

Les personnages

  • Kristin Arroyo : 1m82, corps athlétique, cheveux longs, visage bronzé avec une cicatrice de trois centimètres juste sous l’œil droit ; caractère farouche et déterminée, prête à aller au bout de ses convictions ; 34 ans ; fille d’un émigré mexicain ; a grandi dans les rues de Brooklyn ; renfermée, ne fait pas facilement confiance ; ancienne marine en Irak.
  • Nathan Stewart : photographe professionnel ; très talentueux ; sait écouter les autres et tenir compte de leurs remarques ; couvert de dettes.
  • Edward Pyle : Grand-père maternel de Kristin : photographe professionnel parcourant le monde; décédé en 1978 d’un cancer, deux ans avant la naissance de Kristin.
  • Michael Pear : ami de Nathan, bénévole à la fondation Monroe; trentenaire, quelques rides au coin des yeux ; très séduisant, beau parleur, sûr de lui ; études dans une prestigieuse université ; patron de sa propre entreprise lançant de jeunes entreprises ; collectionneur de tout objet ayant trait à Marilyn.
  • Thomas Goodman : jeune Canadien membre de OWS ; musicien ; ami de Kristin.
  • Joseph Carneglia : fils d’un chef mafieux.
  • Charles Tobia : lieutenant de Joseph Carneglia.
  • Ian Foutain : 28 ans, en paraissant vingt de plus ; ancien marine qui avait servi sous les ordres de Kristin ; une jambe en moins suite à un accident de mine ; vit dans les sous-sols du métro new-yorkais.
  • Norman Dyers : agent du FBI ; grand et sec.
  • Paul Beato : agent du FBI ; petit, chauve et ventripotent ; partenaire de Dyers.
  • Daniel: frère de Michael de cinq ans son aîné; un des dirigeants de Fordham, l’université jésuite de New-York.
  • Clyde Kaplan : ancien général de l’armée américaine ; conseiller auprès d’entreprises liées au Pentagone ; à la tête du « Triangle de Fer ».
  • Tyler Hoffman : copain d’université de Michael ; véritable geek, ne vit que pour sa passion de l’informatique.
  • James Powell : un des sept membres du conseil du « Triangle de Fer ».
  • Marilyn Monroe : invitée vedette du roman dans lequel Philippe Laguerre cite de nombreuses anecdotes la concernant.

Les lieux

Toute l’action du roman se situe dans la ville de New-York, ce qui n’en fait pas pour autant un décor ordinaire, non ! Je ne sais si Philippe Laguerre y a séjourné dans sa vie (je lui poserai la question), mais il est indéniable qu’il la connaît très bien. Les différents lieux dans lesquels Kristin se rend sont inextricablement liés à son enquête et, de ce fait, décrits de manière à ce que le lecteur puisse en saisir la substance et la richesse, que ce soit un aperçu général de la ville :

« New-York n’avait pratiquement pas changé depuis les dix années passées loin de la grosse pomme. De toute façon, il était facile d’y circuler grâce au système de quadrillage des avenues numérotées du nord au sud et des rues d’est en ouest. » (Page 38)

…le quartier où vit Nathan :

« Et maintenant elle avançait dans le quartier de Hell’s Kitchen (…)aujourd’hui, la « cuisine de l’enfer » ne méritait plus son nom. L’ancien quartier chaud avait été réhabilité et était désormais réputé pour ses restaurants et studios de télévision. » (Pages 41-42).

Ou quand Kristin est pour suivie par les sbires de Carnegli a: « Dix mètres au-dessus de la rue se tenait la High Line -immense parc urbain de deux kilomètres carrés, interdit aux voitures et aménagé sur les anciennes voies ferrées aériennes. » (Page 111)… auxquels elle tente de fuir en marchant « d’un pas rapide jusqu’à Port Authority. Située à côté de Times Square, la grande gare routière de New-York observait chaque jour des dizaines de bus aller et venir de toutes les villes alentour, et parfois même de plus loin. Dans les années soixante-dix, le quartier abritait tout ce que la ville comptait de drogués et de prostituées. Mais la municipalité avait entrepris diverses opérations de nettoyage pour expulser cette faune malencontreuse et la remplacer par les hordes de touristes désirant loger près de Times Square ou des théâtres de Brodway. » (Page 123).

Mon avis

Assurément, Manhattan Marilyn est un roman intelligemment construit autour d’une hypothèse très audacieuse mais si bien amenée qu’elle se tient, bien qu’une Fondation telle que décrite dans le roman n’existe pas. Les liens avec des événements historiques du passé sont tout à fait crédible sans sombrer dans la théorie gratuite du complot.

« Le Triangle de fer » n’existe pas, tout au moins officiellement, bien que de nombreuses rumeurs au fil des années y aient fait allusion, rumeurs intelligemment relayées par le roman : Philippe Laguerre donne au lecteur des pistes de réflexion qu’il lui appartiendra ensuite de creuser ou non, ce qui est le propre des fictions, n’est-il pas ?

Le petit + : chaque chapitre commence par une petite note qui précise le lieu et le moment, très pratique pour s’y retrouver !! Les scènes d’action sont bien construites; les personnages crédibles; l’intrigue bien ficelée. Manhattan Marilyn constitue le moyen de vivre par roman interposé une passionnante enquête et de faire connaissance avec une New-York inédite, parfois déroutante, en compagnie d’une des plus grands stars américaines, ce qui ne gâte rien, bien au contraire !

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Cathie L.https://goo.gl/kulVbu
Ecrivain de romans historiques, chroniqueuse et blogueuse, passionnée de culture nordique et de littérature policière, thrillers, horreur, etc...

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