INFOS ÉDITEUR
Parution aux éditions Christian Bourgeois le 3 mai 2012 Parution aux éditions Points le 17 mai 2013 Traduit de l’allemand par Olivier Mannoni Johann Friedrich von Allmen est ruiné. Quand un fabuleux diamant rose disparaît, un mystérieux homme d’affaires le charge d’espionner l’escroc russe Sokolov. De la Baltique à la Suisse, entre palaces et villas, le dandy détective et son majordome enquêtent avec décontraction. Plongé dans les méandres de la finance internationale, Allmen n’a qu’une obsession : récupérer le bijou… et son train de vie ! (Source : Points – Pages : 216 – ISBN : 9782757830239 – Prix : 6,50 €) |
L’AVIS DE CATHIE L.
Allmen et le diamant rose ( Allmen und der rosa Diamant en version originale), traduction réalisée par Olivier Mannoni, a été publié en 2012 par les éditions Christian Bourgeois.
Le ton est frais, subtil, tout en légèreté et en humour presque « so british »! Un vrai régal !! Il est clair que l’auteur a éprouvé beaucoup de plaisir à concevoir cette histoire, plaisir communicatif !!
Thèmes : le monde de la finance et de la spéculation internationales et des combines louches.
Le roman, assez court, se compose de chapitres courts, écrits à la troisième personne, privilégiant les point de vue d’Allmen, dont on suit les investigations. Afin d’établir une cohérence avec ses aventures précédentes, le roman fait parfois allusion à des événements directement issus de Allmen et les libellules.
« A la table où se retrouvaient les trois commerçants, le quatrième siège était encore vide. En mémoire de l’antiquaire Tanner, auquel les coupes aux libellules avaient jadis coûté la vie. » (Page 48)…
« Allmen sursauta en entendant frapper à la porte à une heure aussi tardive. Depuis qu’on lui avait tiré dessus, il ne s’était jamais plus senti vraiment détendu dans la bibliothèque de verre » (Page 71).
L’intrigue
Alors qu’il se trouve à nouveau à court d’argent (pas facile de mener grand train quand on est fauché !!), on lui propose de toucher une très grosse somme s’il retrouve un diamant rose qui a disparu très récemment, au cours d’une soirée privée. Le propriétaire du diamant, devant l’insuccès de l’enquête menée dans son entourage, demande à Montgoméry, son commanditaire, de confier l’enquête à Allmen dont la mission est de retrouver le voleur, un certain Sokolov, et de le prendre en filature.
L’affaire semble trop importante pour la toute jeune « Allmen International Inquiries, mais Allmen, efficacement secondé par Carlos, n’en est quand même pas à son coup d’essai. Ainsi, les deux hommes se lancent à la poursuite du voleur, un dénommé Sokolov, ce qui conduira Allmen à sortir de sa zone de confort en fréquentant des lieux, il faut le dire, pas très classes et à séjourner dans un hôtel des bords de la Baltique, à l’ambiance surannée et très « mer Noire » de l’entre-deux-guerres, attestée par la présence de ressortissants russes.
Bientôt, Allmen se trouve confronté à de nombreuses questions: pourquoi l’Américain qu’il a repéré au Viennois se trouve également à l’hôtel ? Existe-t-il un lien entre lui et Sokolov ? Fait-il partie des Américains qui se sont présentés à l’immeuble d’appartement d’affaires, à l’agence immobilière, au Lonely Nights et chez le gérant de serveurs, semblant suivre Allmen à la trace ? Le surveille-t-il ?
Allmen International Inquiries : à proprement parlé, vu qu’il en est le principal investisseur financier, l’agence d’Allmen appartient à Carlos, mais, parce que ce dernier est réfugié clandestin, le registre du commerce a retenu Allmen comme propriétaire. L’affaire du diamant rose tombe à pic pour donner à leur entreprise une importance accrue :
« Au cours des deux années qui avaient suivi la fondation de l’entreprise, son champ d’activité s’était pour l’essentiel limité à la Suisse. Et à ses affaires d’ampleur assez modeste (…) Il s’agissait de tableaux et d’œuvres d’art de cinquième zone, recherchés par des commanditaires travaillant dans le secteur des arts et des antiquaires. » (Page 12).
Les personnages
- Johann Friedrich von Allmen : dandy désargenté, un « croisement » entre Arsène Lupin, Sherlock Holmes et Rouletabille, avec toutefois sa personnalité bien à lui ; collectionneur d’art, gourmet, lecteur averti, Allmen aime les belles et bonnes choses de la vie ; il a appris la sténo uniquement pour le prestige auprès de ses camarades et de son père, en a fait son code secret; aime les mystères; plus doué pour les langues (il en parle une petite dizaine) que pour les chiffres : parler d’argent est tellement vulgaire !! « Le décompte des frais était un sujet de discussion permanent. Collecter les notes allait contre la nature d’Allmen. C’étaient des histoires de boutiquiers. L’homme du monde se moquait bien de savoir à quoi il avait consacré son argent. » (Page 38). C’est un homme d’habitudes: tous les matins, il prend un café au lait accompagné d’un croissant au Viennois, tous les après-midi il fait une sieste, ce qui le rend prévisible.
- Carlos : jardinier majordome guatémaltèque aux réparties latines figurant, lui, le fidèle Watson en plus intuitif, plus guindé aussi ; il travaille à mi-temps comme homme à tout faire de l’entreprise fiduciaire qui a racheté à Allmen la villa Schwarzacker ; autant Allmen a la manie du gaspillage, autant Carlos se montre pingre ; s’occupe de la comptabilité de l’agence et réalise pour elle des investissements ; c’est lui qui a créé le site internet de Allmen International Inquiries
- Tommy Grant : ancien camarade de Chaterhouse; bon gars, un peu lourdaud, devenu avocat pour le cabinet Grant Associates.
- Montgoméry : yeux bleu translucide, visage bronzé, cheveux courts prématurément gris ; porte un costume bien taillé d’homme d’affaires, marche d’un pas assuré ; environ 38 ans,un peu plus jeune qu’Allmen.
- Artiom Sokolov : mince, cheveux châtains clairsemés et ramenés en arrière, yeux enfoncés dans leurs orbites ; né en 1974 à Ekaterinebourg ; 1m90, 85 kilos ; a fait des études d’ingénieur électronicien et possède un diplôme d’informaticien ; travaille en free-lance dans les les technologies de l’informatique ; russe; ouvert et direct.
- Esteban Schuler : assez jeune, cheveux courts un peu plus longs sur le front, coiffés en hérisson ; utilise une eau de toilette agressive ; vice-président assistant de l’agence immobilière « Immobilus ».
- Maria Moreno : dépasse Carlos d’une demi-tête bien qu’elle ne soit pas grande ; yeux noirs en amande, très jolie ; comme Carlos, ne possède pas de permis de séjour ; femme de chambre.
- Ernst Neuenhauser : gros homme, plutôt jeune, visage blanc ; gère des serveurs informatiques.
- Vanessa : très rousse avec des reflets d’or ; peau blanche; élégante et jolie mais on devine déjà les traces que l’âge laissera sur son visage; porte beaucoup de bijoux en or aux poignets et aux doigts.
- L’improbable duo formé d’un aristocrate déchu à la recherche de son lustre d’antan associé à un réfugié guatémaltèque sans papiers ni permis de séjour reconverti en jardinier et majordome très stylé.
Les lieux, les ambiances
Le délicieux contraste entre une Suisse d’une autre époque et la Suisse moderne, très à la page, se retrouve dans la description des lieux dans lesquels se déroule l’histoire : d’un côté, la maison du 19 Spätbergstrasse, une « villa des années 60, à l’architecture plutôt ratée. Elle était construite dans un mélange de style campagnard anglais et tessinois qui n’avait pratiquement aucun précédent dans la région (…) une dizaine de mètres seulement la séparait de l’épaisse haie de thuyas qui délimitait le terrain et la rue. A l’ouest, à l’avant du bâtiment, elle disposait en revanche d’un espace assez large. De là, on devait avoir une belle vue sur les lacs et les montagnes. Du point de vue du style, la maison était marquée par ses arches en brique, ses ferronneries d’art, ses parquets et ses sols en pierres décoratives » (Page 51).
« La maison disposait de onze pièces, d’un sauna, d’un bar en sous-sol avec soupirail en cul-de-bouteille, d’un bowling automatique, d’une cave à vin climatisée, d’un office et de pièces réservées au personnel. » (Page 54).
L’envers du décor : Kolbhausen « se situait derrière les collines, à l’est de la ville, sans vue sur le lac, et cette banlieue était mal desservie par les transports en commun. La Schwarzkirchstrasse se trouvait dans un petit quartier pavillonnaire, entouré par des exploitations agricoles, une petite usine de boîtes de conserve et un atelier de réparation de matériel agricole. » (Page 58).
Mon avis
Malgré la présence d’éléments rappelant l’atmosphère des romans policiers de l’entre-deux-guerre, ne nous y trompons pas : il s’agit bien ici d’une histoire contemporaine avec informatique de pointe, techniques de spéculation de haute volée et confrontation avec des hommes de main aux méthodes tout ce qu’il y a de plus moderne.
Détournant avec beaucoup de finesse les codes du genre, Martin Suter poursuit les aventures de Johann Friedrich von Allmen avec beaucoup de brio et d’irrésistible humour. Un livre élégant et réjouissant, à l’image de son sympathique auteur qui, décidément, excelle à décrire les relations de classe en vigueur en Suisse. C’est jouissif, délassant, vite lu et…on en redemande, encore et encore !!
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