Rencontre avec l’auteur Georges SALINAS à l’occasion de la sortie de son roman « Le chat d’Oran » aux éditions Mareuil en janvier 2019
Jérôme PEUGNEZ : Bonjour Georges Salinas, pouvez-vous me décrire votre parcours ?
Georges SALINAS : Bonjour. Je suis marié depuis plus vingt-huit ans avec Catherine, une femme formidable et j’ai deux enfants adorables Matthieu et Marie, de 27 et 24 ans. Nous formons une famille unie. Je suis policier depuis plus de 30 ans, d’abord comme officier puis comme commissaire depuis 2003. J’ai fait l’essentiel de ma carrière dans la police judiciaire à Paris, au 36 quai des orfèvres, à la brigade criminelle, aux stups et surtout à la BRI, dans la lutte contre le grand banditisme et le terrorisme, où j’ai passé au total 22 ans. J’étais chef adjoint à la BRI en 2015 durant la période des attentats et j’ai mené avec mes hommes toutes les opérations d’envergure comme Hyper Cacher ou le Bataclan. Aujourd’hui, je suis chef des protections du gouvernement et des personnes menacées au service de la protection (SDLP), une autre facette du métier de policier passionnante. Le chat d’Oran est mon premier livre.
JP : Comment vous est venu l’envie d’écrire ? A quelle période ?
GS : L’envie m’est venu d’abord à la mort de mon père en 2007. J’avais besoin de lui rendre hommage. Il me racontait les opérations qu’il avait menées durant la guerre d’Algérie. J’étais impressionné par son parcours, ayant été lui-même blessé plusieurs fois. L’Algérie lui manquait et il en parlait avec beaucoup de nostalgie malgré les événements déchirant des années 60. Mais je n’avais pas le temps, pris par mon travail. J’ai réellement commencé à écrire en 2014. En pleine écriture, j’ai perdu ma mère et là j’ai compris combien elle me manquait. J’ai compris aussi comment elle-même avait vécu ces événements. Et puis il y a eu les attentats de 2015. Ma famille, mon épouse Catherine et mes deux enfants Matthieu et Marie ont subi, dans l’ombre de ces jours funestes, les mêmes angoisses et douleurs que mes parents. Ma famille m’a soutenu dans mon travail de policier et dans mon écriture et je lui dois beaucoup. Les attentats m’ont rappelé ce que me racontaient mes parents. J’ai compris alors que la douleur du terrorisme n’avait jamais disparue, elle n’avait fait que se réveiller en 2015.
JP : Quelles étaient les lectures de votre enfance ?
GS : J’adorais les livres de science-fiction. Tous les soirs, dans mon lit, je dévorais ces histoires d’anticipation qui me faisaient rêver. J’ai été bercé par Jules Verne, Pierre Boule, Asimov, Ray Bradbury. Plus tard je me suis intéressé aux romans à suspense comme ceux de Tom Clancy, ou Arthur Conan Doyle. J’ai toujours aimé les livres, ils m’ont accompagné tout au long de ma vie et m’ont servi à m’évader quand le temps était trop lourdement chargé de nuages.
JP : Quel est votre « modus operandi » d’écriture ? (Votre rythme de travail ? Connaissez-vous déjà la fin du livre au départ ou laissez vous évoluer vos personnages ?)
GS : J’écris le soir et le week-end. Je prépare mon histoire, mais je ne m’interdis pas de changer en cours d’écriture. J’ai un fil conducteur malgré tout et je prépare le caractère de chaque personnage qui peuvent aussi évoluer. Je m’inspire des gens au fil des rencontres mais la plupart des personnages sont totalement imaginaires.
JP : Le parcours a t-il été long et difficile entre l’écriture de vos livres et leurs parutions ?
GS : C’est mon premier livre et j’ai pris le temps d’écrire pour aller dans le détail. Ce livre s’appuie sur de véritables événements et les recherches ont été longues. Ma famille m’a aidé dans cette recherche du détail et je me suis appuyé sur de véritables spécialistes de cette période troublée, en particulier ma belle sœur qui est professeur d’histoire. Ensuite j’ai envoyé mon manuscrit au début de l’année 2018 à quelques éditeurs dont certains étaient intéressés. Finalement en juin j’ai eu la chance de rencontrer mon éditeur, Louis de Mareuil qui a été formidable avec moi. Il m’a donné ma chance et a cru en moi. Je l’en remercie. Les choses se sont mises en place immédiatement.
JP : Pouvez nous parler de votre roman « Le chat d’Oran » ?
GS : L’histoire débute à Oran durant la guerre d’Algérie. Un policier pied noir dans une unité anti terroriste va devoir affronter les combattants du FLN qui commettent des attentats. François Delarocha va devoir éliminer une cellule terroriste en prenant tous les risques y compris en mettant en péril sa famille. Blessé et victime d’un attentat contre lui, il est rapatrié en France juste avant l’indépendance, dans un pays qu’il ne connaît pas et qui connaît mal les pieds noirs. Il va être rattrapé par ces ennemis et à nouveau confronté à ses adversaires sur le sol français pour un combat sans merci pour sauver sa vie et sa famille. Il devra s’allier avec un de ses ennemis jurés pour réussir.
L’action des militaires et des Algériens du FLN a souvent été traitée et analysée alors que l’histoire fait l’impasse sur l’implication des policiers. Ce qui m’a paru important et nouveau dans cette histoire, car jamais traitée, c’était de montrer la vie d’un policier pied noir et de sa famille à Oran et leur capacité de résilience face à la guerre, en Algérie comme en Métropole. Sa perception globale de l’Algérie Française, sa fuite et sa réadaptation en France, ainsi que le regard des métropolitains m’ont semblé autant de sujets intéressant à raconter. Le point de vue de terroristes repentis ou toujours en action me paraissait essentiel. L’histoire essaie de montrer l’affrontement de deux camps, pour des idées parfois peu claires, chacun étant sûr de son droit.
Je raconte l’histoire d’hommes et de femmes emportés dans un conflit dont ils ne maîtrisaient pas toujours la finalité. Ils étaient les acteurs impuissants d’un jeu politique terrible. Ils participaient par leurs actions à la grandeur de l’âme mais aussi à sa plus grande noirceur. En lisant cette histoire, nous replongeons dans le passé, un passé tellement proche du présent.
JP : Dans votre roman, y a-t-il des personnages qui existent vraiment, dont vous vous êtes inspiré ?
GS : Je me suis inspiré de mes parents et d’histoires que me racontaient ces derniers. Je me suis inspiré aussi de mon frère aîné. D’autres personnages sont totalement fictifs et ont été créés dans mon imagination. Je voulais des femmes et des hommes de caractère, car dans un affrontement sans merci, comme j’ai pu le vivre à travers mon métier, mais aussi dans ma famille, seuls les forts et audacieux subsistent. Ils ont peur pour leur famille, pour eux, mais ils sont courageux et n’hésitent pas à prendre des risques parfois au péril de leur vie. Ils ont conscience du danger, mais agissent quand même, parce qu’il n’y a pas d’autre choix.
JP : Avez-vous reçu des remarques surprenantes, marquantes de la part de lecteurs, à propos de vos romans ?
GS : Ceux qui ont lu mon livre ont aimé ce voyage très documenté à travers le temps et le rythme mené tambours battants du livre. Beaucoup aiment les personnages.
JP : Avez vous d’autres passions en dehors de l’écriture (Musique, peinture, cinéma…) A part votre métier, votre carrière d’écrivain, avez vous une autre facette cachée ?
GS : J’adore le cinéma. J’essaie d’y aller le plus souvent pour garder cette magie. Je suis assez nostalgique de cette période ou aller au cinéma était vraiment une sortie qui vous emportait loin de vos racines et de vos repères . Le film qui m’a le plus marqué est Forest Gump. Je suis passionné par l’original et le non conforme m’interpelle. Cette vision je l’ai dans tous les domaines. J’aime la passion, le risque et la loyauté. C’est sûrement pour ça aussi que j’ai choisi un métier de policier d’action.
JP : Avez-vous des projets ?
GS : A part mon métier qui me prend beaucoup, je suis dans l’écriture d’un deuxième livre qui sera une suite . J’ai aussi d’autres projets d’écritures sur d’autres thèmes ainsi que plusieurs scénarios.
JP : Quels sont vos coups de cœur littéraires ?
GS : Certains livres m’ont plus marqués que d’autres. J’ai été touché par « Les bienveillantes » de Jonathan Littel et dernièrement une relecture plus classique de Rousseau « les rêveries du promeneur solitaire. Je compte lire le dernier Houellebecq. Encore un esprit génial tourmenté !
JP : Une bande son pour lire en toute sérénité votre roman « Le chat d’Oran » ? A moins que le silence suffise ?
GS : Je préfère le silence dans ce monde bien trop bruyant.
JP : Avez-vous un site internet, blog, réseaux sociaux où vos lecteurs peuvent vous laisser des messages ?
GS : Pas encore. Mais je ne suis pas contre la création d’un blog dédié. Je verrai avec mon éditeur.
JP : Merci Georges Salinas d’avoir pris le temps de répondre à mes questions.
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