INFOS ÉDITEUR
Parution aux éditions Fleuve Noir le 16 octobre 2016 Parution aux éditions 10/18 le 19 octobre 2017 Traduit par Françoise SMITH Hiver 1975, Berlin-Est. Karin Müller et Wesner Tilsner, officiers de police, sont dépêchés au cimetière près du mur de Berlin, afin de mener une enquête sur le meurtre d’une adolescente. Les journaux affirment que la jeune fille a été fusillée par une patrouille frontalière de l’Ouest, alors qu’elle fuyait vers l’Est. Toutefois, l’autopsie prouve que la scène de crime a été modifiée. (Source : Fleuve – Pages : .. – ISBN : 9782265115644 – Prix : 20,90 €) |
L’AVIS DE SOPHIE PEUGNEZ
Février 1975. Une une jeune fille est retrouvée tuée au pied du mur de Berlin Est. Chose très surprenante, il semblerait qu’elle est reçu des tirs venant de Berlin Ouest. Or il serait plus logique qu’elle ait voulu fuir de l’autre côté.
Karin Müller et son adjoint Werner Tilsner sont dépêchés sur cette enquête mais on leur précise bien dès le départ que c’est un sujet sensible. Un des premiers soucis est que les deux coéquipiers se sont réveillés dans le même lit alors qu’ils ont respectivement un conjoint. Ils ne se sont pas comportés comme de simples camarades. Et tout se sait un jour en RDA (ou DDR en allemand – Deutsche Demokratische Republik). Les deux policiers de la brigade criminelle (la Krio ou Krimipolizei) vont devoir mener leurs investigations tout en étant obligés de collaborer avec la puissante et effrayante Stasi (Sécurité d’Etat). Il y a forcément une portée politique à cet événement. Et au moindre faux pas, on peut leur retirer l’affaire. Qui tire vraiment les ficelles et dans quel but ? Enquêter près du mur est toujours un climat particulier.
Non seulement Karin a commis un écart de conduite dans sa vie de couple mais de plus, sa relation de de couple est vraiment en danger. Son mari Gottfried éprouve le besoin d’aller se confier et de chercher des réponses à l’église en pleine période où règne le communisme et où le maitre absolu est l’Etat. C’est un enseignant, son comportement doit être irréprochable. Un an auparavant il avait été déjà envoyé dans un centre maison de correction sur l’île de Rugen. Endroit pour que de jeunes têtes brulées retrouvent la voie de la raison. Dans la réalité un lieu inhumain avec des châtiments et des comportements inadmissibles. La terreur, la privation, l’isolement et d’autres actions qui donnent des envies de suicides.
« Stasi Child »de David Young publié aux éditions Fleuve Noir se déroule donc sur deux périodes très proches : 1974 et 1975. La guerre froide bat son plein. Alors que Berlin Ouest est une ville riche, dynamique, Berlin Est est sous le joug de l’Etat. De la Stasi qui contrôle tout. Je suis moi même née en 1974, j’étais adolescente lorsque le mur de Berlin est tombé en 1989, je n’ai pu retenir mes larmes car en tant que germanophone, j’avais été choqué en cours d’allemand de voir des personnes que l’on fusillé car ils voulaient franchir un mur.
C’est toute cette époque qui est retranscrite parfaitement dans le roman. Un communisme dans les pays de l’est qui faisait régner la peur. Où le contrôle était omniprésent. Les intellectuels enfermés en prison ou pire encore. La police secrète qui gère tout même la vie privée de ses concitoyens. Et parmi eux, tous ceux qui étaient des agents peut-être malgré eux. Comment les juger ? quel choix auriez-vous fait pour un peu de liberté ou pour continuer à vivre. « Stasi Child » sans dénaturer l’intrigue offre une immersion dans la vie de jeunes qui ont du mettre leur vie au service de leur Patrie et devenir des agents. Trahissant ainsi les plus proches d’eux mais les maintenant parfois également en vie.
Récit passionnant mais si je dois vous avouer qu’il y a des passages que j’aurai aimé plus limpide. Nous sommes dans les codes du roman d’espionnage avec lesquels j’ai grandi. J’ai pu m’empêcher de penser à Tom Clancy ou Robert Ludlum, deux auteurs de romans policiers que j’ai dévoré étant ado.
Alors qu’aujourd’hui les tables des libraires s’enrichissent de thrillers, de romans noirs, de romans de suspense mais aussi des romans, je pèse ou je cherche mes mots, du terrorisme. C’est intéressant de pouvoir lire des ouvrages sur une histoire proche : celle de la guerre froide. Un conflit semble chasser l’autre. Mais c’est en puisant dans son passé, en le connaissant mieux que l’on peut construire son avenir. C’est bien que David Young propose ce récit qui permettra peut-être à une nouvelle génération de comprendre ce qui a pu se passer à Berlin (ville que je chérie tout particulièrement). Un mur est tombé là-bas. Mais il en reste d’autres à abattre.
Pour avoir arpenter cette belle cité, j’ai aimé retrouvé le nom des quartiers « Mitte » et autres. Les descriptions du Mur et plutôt des murs est un vrai témoignage.
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Stasi Child, sous couvert d’une enquête criminelle, décrit de façon minutieuse ce qu’était la vie dans les pays communistes, particulièrement en RDA. On ne peut s’empêcher de penser au film de Florian Henckel La vie des autres (2007).
Système pervers qui place les individus dans des situations insupportables pour les pousser à la faute et les convaincre de trahison. La collaboration avec ses propres bourreaux pour les aider à démasquer d’autres traitres apparait alors comme la seule porte de sortie pour échapper au pire.
Dans ces conditions, la confiance, la base de tout lien social est rompue, et la société toute entière bascule dans l’absurde et la déraison, autorisant les comportements les plus vils.
Le roman est long, comme un jour sans fin, précis, détaillé, mais jamais ennuyeux. le récit restitue ce que vivent ses personnages, s’interrogeant sans arrêt sur les objectifs poursuivis par ceux qui les gouvernent, doutant de leur entourage, s’épuisant à trouver en eux la force de continuer.
Stasi Child est le premier roman de David Young. Attendons la suite.
Lien : http://desecrits.blog.lemonde.fr/2016/10/10/cetait-a-berlin-en-1975/