INFOS ÉDITEUR
Parution aux éditions Chloé des Lys en décembre 2015 Après deux recueils de contes bizarres et un premier roman » Les 10 petites négresses » qui a connu un joli succès, l’auteur se lance, cette fois, dans un thriller dont il refuse de résumer le scénario. Car un mot, une phrase risqueraient de dévoiler le canevas de cette histoire incroyable ! (Source : Chloé des Lys – Pages : 448 – ISBN : 9782874598937 – Prix : 20,00 €) |
L’AVIS DE CATHIE L.
Bob (Baudouin) Boutique de son vrai nom (non, non, ce n’est pas un pseudo) est un libraire belge, administrateur des éditions Chloé des Lys et fondateur d’Actu-TV, émission web-TV d’activité culturelle. Passionné d’écriture, il est l’auteur de deux recueils de contes bizarres (dixit l’auteur lui-même) et d’un roman » Les dix petites négresses ». 2401 est son premier thriller.
Le roman
2401 a été publié en 2015 par les éditions Chloé des Lys, maison d’éditions belge implantée à Tournai, éditant de la poésie, des BD, des nouvelles, des biographies, des romans ainsi qu’une revue littéraire intitulée « Les petits papiers de Chloé ».
2401 est écrit au présent dans un style direct proche du langage journalistique ; car Bob Boutique, grand raconteur d’histoires, ne s’encombre pas de procédés stylistiques superflus. Attention, cela ne signifie pas que le style soit bâclé, bien au contraire, car le roman est très bien documenté. Mais en ouvrant la première page de 2401, c’est comme si on venait s’asseoir confortablement dans un bon fauteuil, en face de Bob, prêts à l’écouter nous raconter son histoire. Et laissez-vous porter par la magie de thriller qui revêt parfois les oripeaux de la fable, voire du conte fantastique, avec par ci par là une petite touche de poésie, juste de quoi vous faire rêver un peu dans ce monde de brutes :
« Une vague lumière à l’écume orange s’étale doucement sur les hautes parois rocheuses plongeant dans le même temps le fond de la vallée dans la pénombre. » (Page 221).
Thèmes : la visée humaine en est très profonde, preuve en est les thèmes abordés : la lâcheté ; la corruption ; l’exploitation de la détresse humaine ; le regard de la société sur le handicap physique ou mental, mais aussi la réponse apportée à ces handicaps ; le concept que chacun d’entre nous cachent des squelettes dans son placard. Dans ce thriller très riche et très original, Bob a imaginé une société secrète dont les membres ne seraient pas mus par les habituels moteurs :
« Le corbeau n’a rien à voir avec la religion, la philosophie ou la politique. Il n’est pas une secte mais une organisation secrète qui prend et qui donne. Vous avez le droit de demander n’importe quoi, n’importe quel service légal ou pas, pour autant que vous acceptiez d’en offrir un de même valeur. Donc, pas d’argent, l’opération serait nulle, puisque vous devriez donner autant de billets que vous en recevriez en retour (…) Il n’y a pas de limite morale. Vous donnez, vous recevez… vous donnez beaucoup, vous recevrez beaucoup. A vous de vous situer. » (Pages 43/44)
=> Avec pour obligation évidente de ne JAMAIS en parler ni poser de questions.
Pour autant, même s’il est clair que l’auteur ne se fait aucune illusion sur ce dont l’homme est capable par appât du gain ou goût du pouvoir et de la puissance, aucune trace de cynisme ni de cruauté gratuite. Le ton reste léger, même quand Bob évoque les « monstres » qui vivent dans l’hôpital psychiatrique du docteur Strassen, tissé de répliques bien sonnées et d’un humour grinçant mais jamais méchant, de ce genre-là, par exemple :
« Comme quoi, rien n’est plus dangereux qu’une femme, que vous l’invitiez dans votre trou de célibataire (et ça commence toujours en tout bien tout honneur) ou la laissiez tomber comme une crêpe. De celles qu’on retourne d’un coup de poêlon en l’air, bien chaude, et qu’on ramasse alors brûlante sur le nez. » (Page 55)…
ou de celle-là:
« Les commissaires et inspecteurs des deux pays voisins sont rassemblés autour d’une immense table de réunion avec des IPad flambants neufs du côté fromage (les Hollandais) et de vieux BlackBerry du côté frites (les Belges) » (page 79)…
ou celle-là :
« Elle passe donc la journée à la fenêtre de sa chambre (il fait délicieux) à lire un thriller de Christine Blondet, une sombre histoire de templiers modernes bien plus excitante que notre récit. Passons. » (Page 101)
=> Petite question: qui se cache sous ce nom à peine déguisé de « Christine Blondet » ? Vous séchez ? Rendez-vous dans la rubrique « passion thrillers » de Blog Critique Littéraire…
L’intrigue
Monsieur Jacques Durieux, brave retraité qui coule des jours heureux dans le bon village de Chamy sur Semois, reçoit une lettre anonyme plutôt inhabituelle: pas de demande de rançon, pas d’argent…Françoise Laloux, pharmacienne qui officie dans le même paisible village, reçoit une lettre identique. De même les « soeurs Renard, Lise Deroubaix caissière dans la ville d’à côté et Alain Birnbaum, le médecin.
Que peut bien signifier cette pluie de lettres anonymes adressées à de braves citoyens qui, bien entendu, n’ont rien à se reprocher, ni dans le présent, ni dans le passé. Alors quoi ? Mais Renée et Monique Renard sont bien décidées à ne pas se laisser faire et découvrit, à l’aide du médecin et du curé qu’elles entraînent à leur suite, quel corbeau se cache derrière.
Toute cette histoire pourrait se résumer à une vaste farce bourgeoise, dans le genre vaudeville, mais n’oublions pas que nous sommes dans un thriller ; et qui dit thriller, dit frisson, angoisse, tension dramatique…Aussi, quand la piste de l’attentat permet aux policiers de remonter jusqu’à Chamy, la blague prend des allures de drame. Fini de rire !!!
Les personnages
- Jacques Durieux : retraité de son poste de secrétaire adjoint du ministère des travaux publics, président du football club de Chamy ; homme soigneux à la réputation d’un bon citoyen, sympathique, le cœur sur la main, toujours prêt à aider dans les associations.
- Françoise Laloux : pharmacienne, morphinomane ; magnifique crinière rousse avec quelques cheveux gris.
- Monique Renard : « soeur » de Renée; femme effacée, qui se contente souvent d’écouter, mais particulièrement futée, déterminée et sans scrupules lorsqu’il s’agit des intérêts de son couple.
- Renée Renard : « soeur » de Monique, l’homme du couple, grande gueule, impulsive.
- Alain Birnbaum : médecin de famille, apprécié de tous et toujours disponible ; installé dans le village depuis quatre ans ; a vécu au Congo où il était infirmier à l’Union Minière.
- André Schneider : directeur de Biolact, la laiterie industrielle de Chamy, gendre du propriétaire de la laiterie.
- Lise Deroubaix : caissière au supermarché Priba de la ville d’à côté ; grande et jolie blonde d’une trentaine d’années.
- Roger Fléron : mari de Lise, ancien para, du genre » je tape d’abord, je parle après ».
- L’abbé Sauvageon : curé de Chamy ; grand, mince, cheveux blancs qui lui tombent sur les épaules ; seule une petite croix en argent épinglée sur le revers de son col indique qu’il fait partie du clergé ; homme moderne qui possède un IPad et envoie des mails à ses ouailles.
- Johann Verdriet : commissaire à la Kmar, Maréchaussée Royale des Pays-Bas ; spécialisé dans le grand banditisme et donc le terrorisme; mène son boulot d’une main de fer qui lui vaut d’être surnommé » le Bouledogue » ; la quarantaine, 1m75, athlétique, blond avec des taches de rousseur sur le nez ; parle couramment l’anglais et le français ; un boss un peu rude mais très humain.
- Arie : inspecteur de l’équipe de Verdriet ; 25 ans ; taillé comme une armoire à glace, le crâne rasé ; déconneur de première, ronchonne souvent mais devient une machine de guerre quand l’action devient nécessaire.
- Koen : second inspecteur de l’équipe de Verdriet ; grand et mince (1m90), cheveux blond roux.
- Lieve: 22 ans, cheveux courts en brosse, joli visage, très maigre ; stagiaire très prometteuse ; têtue, électron libre, tout comme son boss.
- Jean Roteur : boss du service central anti-terrorisme de la police fédérale belge.
- Karim Chaouani : spécialiste « islam » de l’équipe belge ; petit, rondouillard, lunettes et calvitie naissante ; parle flamand, anglais et français ; toujours tiré à quatre épingles.
- Annie Raedemaeckers : inspectrice du service de Chaouani ; experte en arts martiaux.
- Inge Den Phu : autre stagiaire du service de Verdriet ; apparence de petite poupée asiatique : cheveux noirs coupés à la Mireille Mathieu.
- Arnold Breitner : directeur commercial de la filature Breitner.
- Egon Strassen : chef de la clinique psychiatrique du même nom, psychiatre de renom international ; fait partie du conseil bourgeoisial de la ville de Sion ; homme intègre et austère, véritable scientifique qui se consacre tout entier à son hôpital ; pas de famille, ne sort presque jamais. Très âgé, calvitie prononcée, haute stature, longue barbe grise.
- Ludo Maes : inspecteur de l’équipe belge ; grand blond (1m90), cheveux nattés dans le dos, sec, tout en muscles longs, visage dur.
- Docteur Larcier : sous-directeur de la clinique Strassen ; petit, l’air insignifiant.
- Rolf Uti: chef de la police de Sion; sorte de bûcheron roux, très velu ; brutal et grossier avec ses subordonnés, comme avec tout le monde du reste.
Les lieux
L’essentiel de l’action se déroule principalement en Belgique, dans le petit village de Chamy sur Semois, et en Suisse, dans la ville de Sion. Dans 2401, les descriptions de lieux n’occupent pas une place prépondérante ; quelques phrases suffisent pour poser le décor et permettre au lecteur de se les représenter afin d’y situer les événements ; rien de plus, car Bob, en bon conteur qu’il est, ne s’encombre pas de détails inutiles, juste le temps de nous faire regretter de ne pas avoir le bonheur de connaître ces lieux enchanteurs… Ainsi, « les gens qui connaissent Chamy et son environnement de forêts de hêtres et d’épineux ne manquent pas de faire une halte le long de la Semois dès que le temps le permet. » (Page 30)
Sans oublier toutefois de situer les lieux à leur juste échelle, toujours avec la pointe d’humour qui caractérise son style :
« Le stade de Chamy, comme l’appellent pompeusement les joueurs, ressemble grosso modo à une prairie dont on vient de sortir les vaches, sauf que l’herbe est rasée, qu’il n’y a plus de flattes (bouses), qu’on a délimité un terrain à la craie et qu’on a posé, à chaque bout, des piquets blancs avec un filet pour recevoir les ballons. » (Page 85)
L’ambiance « village de province » est décrite d’une façon savoureuse qui rappelle celle des films de Pagnol :
« Sur la petite place de Chamy (vous vous souvenez, au bord de la Semois) entre l’église et la maison communale, les braves dames commencent leurs conversations par « vous avez appris? » et commentent avec force gestes et roulement d’yeux le suicide de cet abbé qui était quand même un peu curieux, vous ne trouvez pas…rien que sa façon de marcher… » (Page 209)…
« Et que dire de ces superbes villages de pierre aux toits d’ardoises avec une ferme à l’entrée, une autre à la sortie et la douce odeur du crottin dans l’air ? » (Page 96)
Pour autant, vous auriez tort de ne pas prendre Bob au sérieux, car l’histoire qu’il raconte est tout sauf drôle ; il est donc tout à fait capable de planter un décor sans se laisser aller à ces petites pointes d’humour que j’aime tant… quoique… Je vous laisse juge :
« Sion est une jolie petite ville de quelques dizaines de milliers d’habitants qui a les pieds dans l’eau du Rhône et la tête dans la haute montagne valaisanne. Avec des noms ronflants comme le Breithorn, Le Mont Rose, les Dents du Midi et surtout, un peu plus loin près de la frontière italienne, le fameux Cervin… » (Page 162).
Et que dire de sa capacité à dresser un décor digne d’un film d’épouvante :
« Les flammèches orange ondulent légèrement et projettent des ombres mouvantes sur un groupe de moines en capuche (appelons-les comme ça) assis au milieu de la salle autour d’une longue table en bois massif sur laquelle six enveloppes attendent les invités(…) Une pendule sonne quelque part. Il est onze heures. » (Page 41).
Mon avis
2401 réunit dans ses 448 pages tous les ingrédients qui constituent non pas les bons, mais les excellents thrillers, car tout ici est à sa place ; pas de fausse note, pas de fioritures, pas de descriptions inutiles. Le lecteur en a pour son argent, et pas une seconde ne s’ennuie. Au moment où il ouvre la première page, il met non pas le doigt mais tout le bras dans l’engrenage, et fébrilement tourne, tourne les pages jusqu’à la dernière.
Il y trouvera du mystère : « Une grosse voiture sombre, une Mercédès, apparaît au bout de l’avenue et s’immobilise sans bruit devant chez elle, en double file, feux clignotants. » (Page 39) ; des rebondissements inattendus; des scènes d’action où le lecteur ne peut s’empêcher de crier : « Attention derrière !!! » et un suspense haletant, notamment l’opération commando de la deuxième partie, où là on passe aux choses sérieuses… On est vite happé par l’enquête menée par le commandant Verdriet et son équipe: vont-ils s’en sortir ? Si oui, car on compte sur la bienveillance de l’auteur, comment vont-ils procéder ??
Il y trouvera également de la dérision et des scènes cocasses qui donnent au roman une touche personnelle et originale, avec, disséminés un peu partout, les clins d’œil adressés au lecteur, établissant une sympathique complicité : « Vous avez déjà compris que ce n’est pas dans ce bouquin que vous trouverez de superbes descriptions littéraires (…) On ne joue pas dans la même division. Nous, on raconte une histoire et si vous êtes arrivés jusqu’ici, c’est qu’on ne la raconte pas trop mal ou que vous êtes masos. » (Page 198)… « Vous trouvez l’auteur un peu grossier ? D’accord, mais comme dirait l’éditeur de ce livre: grossier parfois, mais vulgaire, jamais. » (Page 210) Je dirais : grossier peut-être, mais certainement doué pour raconter des histoires, drôle sans balourdise, fin observateur de la nature humaine et un talent certain pour la mise en scène.
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