Val McDERMID : Skeleton Road

Royaume-uni
Val McDERMID - Skeleton Road
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  • Éditions Flammarion le 14 mars 2018
  • Éditions J’ai Lu le 13 mars 2019
  • Traduit par Arnaud Baignot, Perrine Chambon
  • Pages : 512
  • ISBN : 9782290170151
  • Prix : 8,30 €

PRÉSENTATION ÉDITEUR

Des ouvriers découvrent dans le centre historique d’Edimbourg les restes d’un cadavre au sommet d’un immeuble. A qui appartient ce squelette, et comment est-il arrivé jusque-là ? C’est à l’inspectrice Karen Pirie qu’est confiée la résolution de l’énigme. Bientôt, elle va devoir s’enfoncer plus loin qu’elle ne l’aurait cru dans l’histoire tragique des Balkans, là où couve encore la violence de crimes de guerre inavoués. Val McDermid signe avec Skeleton Road un polar captivant et parfaitement maîtrisé, hanté par le souvenir sanglant des guerres de Yougoslavie des années 1990.

L’AVIS DE LAURENT FABRE

Il n’est pas obligatoire d’avoir lu les précédents (Quatre garçons dans la nuit et Sans laisser de traces), la découverte d’un squelette (d’où le titre éponyme non traduit) dans un endroit quasi inaccessible va devenir le point de départ d’une enquête hors-norme, de celle qui pousse chacun à une forme d’introspection, à une réflexion sur le poids de la culpabilité et de cette irrépressible envie de vengeance, Skeleton Road n’est pas qu’un polar de plus pour aborder notamment un conflit majeur des années 90, un énième cold-case pour reprendre la terminologie anglo-saxonne, c’est avant tout une histoire d’hommes et de femmes qui ont juste essayé de suivre leur conscience, qui ont vu leur destin brisé, un jour, entre le bien et le mal, dans le meilleur ou dans le pire, l’addition sera lourde à l’arrivée mais une chose émergera, plus rien ne sera jamais comme avant …

« Nous portons tous notre histoire en nous … »

A la fois passionnante et d’une grande profondeur psychologique, l’intrigue ne cesse de surprendre, un plaisir de lecture que de se délecter encore de cette plume à la fois intense et d’une acuité visuelle impressionnante, un style ouvertement tournée vers l’empathie de ses protagonistes, sans jugement de valeurs ni , faire parler les fantômes du passé, décrypter les sentiments humains dans ses entrailles, c’est la signature de celle qui mérite de porter la casquette de Reine mondiale du crime, ni plus ni moins.
Dans toutes les nuances du crime à l’imparfait, le travail de fond qu’attendent les investigateurs, quand la déduction se mêle à la technique légale, telle une miraculeuse alchimie des mots, plusieurs pistes se dessineront pour captiver et emporter certains secrets dans l’oubli, le récit sème la confusion dans le coeur tourmenté des crevasses, l’observation d’une âme morte en dit souvent plus long que celle des vivants, par ses blessures mortelles rien ne saurait dissimuler à jamais les stigmates indélébiles pour hanter dans l’éternel la noirceur des jours et des vies …

« Nous sommes tous des créatures sociales »

L’espoir fait vivre, savoir c’est comprendre comme de mettre de la matière sur une source encore à la fleur de l’âge, des mots sur l’indicible, un polar respectant le rythme indifférent au temps qui passe, à ce qui peut toucher et déchirer les humains, la narration alterne avec les prismes d’une époque et l’appel du présent, le deuil incomplet, l’indifférence d’un monde qui tourbillonne pour parer au plus urgent, la course aux résultats, soulever des questions cruciales pour s’interroger sur la nature du devoir, celui de rétablir la mémoire et d’apporter un nouvel éclairage, une dimension à la hauteur de l’enjeu, gratter à la surface des choses ne suffit pas, l’auteure confirme sa prédisposition à équilibrer son histoire, à insuffler une vapeur contagieuse pour souffler le chaud et le froid, à flirter avec la vitesse à deux temps ou à quatre temps, la mélodie peut revêtir différentes tonalités, les dernières pages ne démentent pas cette capacité rare à pousser le lecteur dans un faux-rythme pour le réconcilier avec l’art du crime parfait …

« Savoir vous empêche d’espérer … »

L’autre point fort des intrigues machiavéliques de Val McDermid, sa propension à creuser l’histoire en la rendant universelle, au-delà de l’évocation d’une guerre ethnique, l’ombre de l’indépendance du Royaume-Uni, l’amorce d’une nouvelle ère dans les rapports sociaux-économiques, les rapports complexes combinés aux sentiments ambivalents, les interactions entre les personnages ne manquent pas de mordant pour déstabiliser et faire oublier la lancinante et fastidieuse quête d’indices, il n’en faut pas plus pour rectifier la mire et ouvrir la brèche de révélations inattendues.

La vie et la mort, l’absolu et le néant … et si c’était l’inverse, cette volonté de traquer la vérité pour démêler le vrai du faux ne se situerait-elle au-delà des rancoeurs et de la vengeance ?
Quand les squelettes se mettront à parler, les vivants se tairont …

La fracture entre le passé et le présent, c’est un peu la métaphore d’un monde en proie aux doutes existentielles, à l’héritage parfois peu reluisant qu’il faut composer et supporter, en observant la couverture symbolique, je ne peux m’empêcher à la fragilité de la vie humaine, aux affres du destin, un jour sans suivi d’un jour avec et ainsi de suite, l’incertitude et la remise en question de notre propre fonctionnement, entrelacement de valeurs disparues avec une société en quête de repères et d’indicateurs, la raison de vivre a un prix …

Un talent qui n’a pas fini de me surprendre … depuis plus de 20 ans, depuis Le Chant des sirènes (1997), une preuve s’il fallait encore la trouver et si vous ne l’avez pas encore découverte, vous ne voyez pas passer les quelques 500 pages qui se lisent comme du petit lait, ne pas aller plus vite que la musique, un pas après l’autre, le fruit de votre patience trouvera peut-être sa récompense au bout de … la nuit !

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