Sophie Loubière : Une minute de silence

Le 17 novembre 2008, à l’Assemblée nationale, une minute de silence est observée en hommage à Jean-Marie Demange, député de la neuvième circonscription de Moselle. Quelques heures plus tôt, l’ancien maire de Thionville a pourtant tué son ex-maîtresse, Karine Albert, d’une balle dans la tête, avant de retourner l’arme contre lui. Mais, à la tribune, rien ne filtre de cette tragédie donnée en place publique, depuis le balcon d’un appartement.

Dix-sept ans plus tard, Sophie Loubière enquête sur ce drame tombé dans l’oubli. Dans sa quête de vérité, elle replonge dans une époque où le mot « féminicide » n’existait pas encore, retrace les faits, recueille des témoignages et dissèque les fragilités personnelles du meurtrier, ainsi que les mécanismes sociaux et politiques qui ont rendu son geste possible.

De son écriture sensible et poignante, Sophie Loubière rompt le silence. Oscillant entre l’intime et le collectif, son ouvrage offre une contribution puissante et nécessaire à notre compréhension des violences faites aux femmes et souligne la nécessité de travailler à la prévention du crime.

« Une Minute de silence est un récit captivant, non seulement sur le meurtre et les événements qui y ont mené, mais aussi sur le silence qui a suivi, un « silence » qui a duré bien plus qu’une minute. » Thomas H. Cook

Le geste d’un fou ?

Non, le geste d’un homme désespéré, qui a perdu son poste de maire à Thionville, commune chère à son coeur, qui a perdu le goût de l’ambition et celui de vivre et qui voit sa maîtresse lui échapper en voulant le quitter. Jean-Marie Demange, avant de se donner la mort, va exécuter froidement Karine Albert d’une balle dans la tête en plein jour du haut du balcon de l’appartement de celle-ci et devant des témoins choqués par la scène qui se déroule devant leurs yeux.

Quelques heures plus tard, une minute de silence est observée au sein de l’Assemblée nationale en hommage au député d’une circonscription de Moselle. Pourtant, cette affaire sera vite oubliée. Quid de la victime, quid de son meurtrier ? Personne au sein du gouvernement, ne revient sur le sujet.

Sophie Loubière, ancienne journaliste et autrice de nombreux romans, dont les sujets sont très souvent ancrés dans un certain «réel de vie», revient sur cette affaire. La romancière veut faire la lumière sur cette tragédie, le meurtre réalisé avec froideur d’une femme en 2008, à une époque où le mot «féminicide» n’est pas encore présent dans le langage quotidien. Tant de choses passées sous silence sur ce tragique fait divers. Sophie Loubière va alors enquêter de son propre chef afin de découvrir qui était vraiment Jean-Marie Demange, qui était Karine Albert, les gens que tous deux côtoyaient et faire la lumière sur cette affaire criminelle. Au fil des pages, l’autrice nous pousse à nous interroger sur cette violence faite aux femmes, sur les non-dits, les interrogations et l’incompréhension devant de tels drames, trop présents dans la vie quotidienne des Français et cela à travers l’union de Demange et Karine Albert. Elle veut aussi prévenir avec ce fait divers, sur ce que l’on peut faire pour éviter de tels drames.

Une minute de silence poignant, fort, dérangeant, qui tape là où ça fait mal. Les féminicides sont un sujet encore, malheureusement, trop actuel et trop souvent dans les médias. Ce livre est à découvrir pour que chacune et chacun s’interroge sur ces violences faites aux femmes. Il est urgent d’agir pour que cela cesse.