Interview de Ghislain GILBERTI

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Ghislain GilbertiMuriel LEROY : Pouvez-vous vous décrire en quelques mots pour vos lecteurs ?

Ghislain GILBERTI : Je suis auteur aux Editions Anne Carrière (Pocket pour le format poche, le premier étant déjà disponible) de trois romans classés dans la catégorie thriller, mais que je situerais plus entre policier et roman noir, avec un côté psychologique et social marqué. Ces trois romans publiés sont « Le Festin du Serpent » (2013), « Le Baptême des Ténèbres » (2014) et « Le Bal des Ardentes » (2015).

Je n’écris pas uniquement dans ce registre et suis en train de faire en sorte que paraissent mes autres travaux, romans noirs, roman sociaux, poésie moderne, essais, etc. Ma palette est relativement large et c’est tout à fait par hasard que ce soit dans le milieu du polar français que j’ai eu la chance de percer en premier grâce aux éditions Anne Carrière qui m’ont donné ma chance.

ML : D’où vous est venue cette passion de l’écriture ?

GG : De la lecture, principalement, mais aussi et surtout de l’envie de transmettre à d’autres ce plaisir et ce réconfort que, depuis mon enfance, j’ai pu trouver dans les livres. Sans entrer dans les détails, je n’ai pas eu une enfance facile, loin de là, et la lecture était pour moi le seul vrai moyen de m’évader et de rester sain d’esprit.

J’aime la sensation de créer une œuvre… C’est comme un enfantement intellectuel et psychique. La gestation est longue, le travail souvent difficile et douloureux. Mais quel bonheur que de voir cet ouvrage imprimé, de la tenir entre les mains en sachant qu’il sera lu. C’est miraculeux.

ML : Que lisiez-vous  étant enfant puis adolescent ?

GG : Très tôt, je me suis frotté aux classiques avec Hugo, Flaubert, Miller, Kafka, Milton, ainsi qu’à la poésie, durant l’adolescence principalement, avec Artaud, Maïakovski, Aragon, Rilke, Michaux, etc. Enfin, le trio infernal de la Beat Generation (William Burroughs, Allen Ginsberg et Jack Kerouac) allait me faire l’effet d’un séisme littéraire. S’en s’ont suivi James Fogle (auteur de « Drugstore Cowboy »)

Je ne suis tombé dans l’univers de la littérature policière que très tard, il y a moins de dix ans. Dante, Dostoïevski, Zweig, Houellebecq, Despentes, Bret Easton Ellis, Chuck Palahniuk (auteur de « Choke » et de « Fight Club ») ainsi que le livre culte de Charles Duchaussois « Flash ou le grand voyage »…

Je lis vraiment de tout, sans compter les essais et documents nécessaires à la mise au point et au réalisme de mes ouvrages.

ML : Avez-vous une méthode de travail spécifique ? Que vous faut-il pour écrire (ambiance, musique, lieu) ? Surtout connaissez-vous d’avance la trame complète de l’histoire avant d’écrire ?

GG : En effet, j’ai une façon très précise de travailler et de nombreuses conditions sans quoi je n’y parviendrais pas. Tout d’abord la documentation par les essais, les livres traitant d’histoire ou de sciences sociales, de droit, de psychologie, de médecine légale, etc. Je dois aussi me rendre autant que possible dans les endroits sur lesquels je compte écrire. Ensuite un plan relativement précis est mis en place (même s’il n’est finalement que rarement suivi, car les personnages en décident souvent autrement) puis des morceaux choisis qui sont écrits dans le désordre pour former un patchwork qui sera rassemblé, relié par la suite.

Je n’écris que le matin, en principe de 3h à 14h. C’est là que je suis le plus efficace. La tranquillité des premières heures, le cerveau qui s’éveille et se montre plus performant, voilà ce qui est bon pour moi. Les après-midi sont dédiés à la relecture, toujours avec trois ou quatre jours de recul par rapport à ce qui a été fait le jour même.

ML : Pour revenir à vos romans, comment passe-t-on d’un roman à l’autre ?

GG : Avec une certaine fatigue et une relative souffrance, suivie d’une période de petite dépression. Mais le fait de replonger au centre d’un nouveau projet efface rapidement tout ça. Bien entendu, entre deux romans, il m’arrive de me laisser aller à la saisie de mes poèmes qui remplissent de nombreux cahiers et carnets. C’est aussi une manière de faire la coupure entre un roman et le suivant.

ML : Que cherchez vous à démontrer à travers vos livres ?

GG : La nature réelle du corps social, ses zones d’ombre ignorées ou inconnues par la masse. C’est vraiment ce qui m’importe le plus. Il y a deux mondes qui coexistent sans se croiser, ou alors par accident : le monde normal et son négatif que je nommerai « la Marge ». C’est une facette du monde aussi riche qu’effrayante, avec ses codes, sa culture underground et criminelle, ses lois plus proches de celle de l’échelle de prédation animale. Dans cette autre polarité de notre monde, même si ça peut paraitre effrayant, les valeurs sont plus naturelles ; Darwin écrase Einstein.

Le monde actuel ne dispose plus d’enclaves physiques, alors les éjectés, les parias, les criminels, les rejetés et autres disjonctés, se rassemblent dans la marge pour en faire une source de microcultures aussi nombreuses que différentes. C’est un peu comparable à une « Tortuga » sociale. J’y ai vécu étant jeune et ce que j’en ai tiré est assez riche pour écrire une bonne centaine de romans.

ML : Sont-ils inspirés de faits réels ou totalement Fictifs ?

GG : Il y a toujours des éléments réels, déformés et distordus, l’inclusion de vraies personnes que l’on manipule un peu pour en faire des personnages. Pour le polar, on est dans une réalité déformée et remodelée en fiction. En revanche, pour mes textes pas encore (ou jamais) publiés, principalement « Dynamique du Chaos » (disponible directement en ligne gratuitement, téléchargement sécurisé, en format pdf), on s’approche dangereusement de périodes sombres de ma vie pour effleurer le récit autobiographique.

ML : Une bande son pour écrire en toute sérénité votre roman ? A moins que le silence suffise ?

GG : Le silence est la principale ambiance sonore quand j’écris, bien que, de temps à autre, je trouve une musique qui colle bien à une scène et me sert de son ambiance pour la rédiger ou corriger le rythme. Mes gouts musicaux étant très éclectiques, ça peut varier du trop-hop (Portishead, Tricky, etc.) au métal (Motorheäd, Ministry…) en passant par le rock folk (Herman Düne, Mason Jennings…), la noise (Sonic Youth principalement) l’electro (trop de références) et le hip-hop (Cypress Hill, Dope DOD…)

ML : Avez-vous d’autres passions en dehors de l’écriture (Musique, peinture, cinéma…) A part votre métier, votre carrière d’écrivain, avez-vous une autre facette cachée ?

GG : Je travaille le dessin au fusain et autres outils avec le projet de me jeter dans le grand bain en travaillant la peinture sur toile. Je suis également musicien, bassiste, ce qui a occupé mes années de jeunesses avec quelques groupes locaux. Je suis parolier de plusieurs groupes, dont Malevolentia (black metal), The Fall of Time (metal technique et conceptuel) et Fuck an Angel (projet naissant alliant trip-hop et noise). Je suis un cinéphile incorrigible et curieux de tout ainsi que rôliste (Jeux de rôles sur table ou grandeur nature, en aucun cas informatique). .

ML : Sur quoi travaillez-vous aujourd’hui ? Avez-vous des projets ?

GG : Oh oui… trop ! Je travaille sur ma prochaine sortie aux éditions Anne Carrière, un roman qui va couper avec mes trois précédents (surprise…). Un remake d’Alice au Pays des Merveilles version sombre et distordue, illustrée par Laurent Baudelot et incluant des travaux photographiques et infographique d’Elodie Pacios : « Dernière Sortie pour Wonderland ».

Je suis également en cours de rédaction d’un essai sur les psychopathes dans le crime organisé qui doit être préfacé (quel honneur) par Stéphane Bourgoin, spécialiste mondialement connu et reconnu des tueurs en série et auteur de « Serial Killers ». J’ai du pain sur la planche donc et ma situation actuelle m’a fait prendre beaucoup de retard sur mes travaux. Les menaces djihadistes dont j’ai été victime (à cause de mon roman « Le Festin du Serpent ») ont en effet rendu mon quotidien plus difficile. Mais la situation est en train de s’arranger et je pense reprendre mon rythme de travail normal rapidement, en m’exilant quelques temps  l’étranger dans un premier temps.
En effet, je ne compte pas céder à ce type de menaces et à ces entraves à la liberté d’expression. Je vais continuer d’écrire et ne surtout pas accepter d’être une victime de plus de la terreur ambiante.

ML : Avez-vous un site internet, blog, réseaux sociaux où vos lecteurs peuvent vous laisser des messages ?

GG : J’ai en effet une page officielle sur Facebook, ainsi qu’une par roman publié.  Un groupe a été créé pour mon roman en ligne, Dynamique du Chaos, ainsi qu’un autre : fans de Ghislain Gilberti. Mon adresse mail est hurledesanges@yahoo.fr

ML : Merci Ghislain Gilberti d’avoir répondu à nos questions et à bientôt.

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