INFOS ÉDITEUR
Parution aux éditions Krakoën en janvier 2012 Parution aux éditions Après lune – poche – en octobre 2013 Les Gueux, c’était l’Enfer. Et c’était aussi le Paradis. Allez expliquer ça… Des années que ça durait. Les Gueux, c’était un no man’s land avec du monde dedans. Ceux qui vivaient là, ils se cramponnaient, vous comprenez, comme des naufragés que un radeau qui prend l’eau qu’on colmatait au système D. On s’arrangeait, fallait bien. Et puis ça a recommencé. Et puis ça s’est arrêté. C’est quand on a compris, quand tout était fini, que tout a commencé. Les trois mortes, c’est sûr, elles n’étaient pas inventées. Alors enfer ou paradis, j’ai plus douté. (Source : Après lune – Pages : 203 – ISBN : 9782352270874 – Prix : 11,00 €) |
L’AVIS DE LAETITIA
Le quai des Gueux, c’est une cour des miracles au bord d’une voie ferrée, l’Eldorado des clodos. Y vivent cinq personnes laissées pour compte par la société. On y trouve Môme, la plus ancienne dont les souvenirs font défaut, Capo, le contestataire qui attend la fin de sa vie comme on attend un train, Boop’ qui n’a pas inventé l’eau chaude mais qui est là pour faire de l’effectif féminin, Boc’, le cuisto et Krishna, l’intellectuel qui a des idées révolutionnaires et sans doute complètement inexactes, mais il a le mérite d’en avoir.
Tout près de leur paradis, trois femmes sont passées sous un train… suicide ?
Luigi, ancien du quai récemment sorti de prison et de passage au bercail est soupçonné. Il va devoir fuir… pourquoi ? Culpabilité ?
Evariste Blond (prononcer le d final à la manière de James Bond) et sa stagiaire Christelle vont œuvrer afin de découvrir la vérité.
Ce livre, je l’ai ressenti comme une observation des conditions de vie des gens de la rue sous couvert de polar. L’intrigue est en toile de fond, ce qui est important dans ce livre, ce sont les personnages du quai des Gueux. Ce sont des personnalités qui chacune dans son genre ne voient et ne verront jamais le monde comme les gens « normaux ». Leur philosophie de vie à la carpe diem n’est pas une image, c’est leur réalité.
« Ces gens ne sont coupables de rien. La société les a rejetés, certes, et certains dans ladite société les voient en victimes, ce en quoi ils ont raison, mais font en l’occurrence un amalgame quelque peu rapide. A bien les observer, il est possible que la vraie victime, ce soit la société. Ils n’ont besoin que d’une chose : qu’on leur fiche la paix, qu’on les laisse mourir en paix. Qu’on les ignore. Et qu’on continue à produire des déchets. Ils se moquent bien des petits tracas qui encombrent les esprits « normaux ». Des gens « bien » (…). La crise, le chômage, le prix du mètre-carré à Paris, celui du litre de gazole, la gueule du chef de service et les visites dominicales de la belle-mère, ils s’en fichent aux Gueux. »
De ce que j’en retiens, c’est que le capitaine Blond, il fait office de figurant dans cette histoire, que les victimes de la voie ferrée ont bien fait de passer sous les roues d’un train transitant par le quai des Gueux et que l’intrigue, bien qu’intéressante, n’est pas forcément indispensable ou plutôt si, en tant qu’accessoire. Oui, comme un accessoire essentiel à un film, genre le colt de Wyatt Earp, mais qui ne fait pas le film.
On peut en conclure que j’ai aimé le côté « humain » de ce polar, que j’ai grandement apprécié qu’il soit un polar « différent » et que je vais regretter ces personnages attachants et déconnectés.
L’AVIS DE STANISLAS PETROSKY
Hervé Sard est né au siècle dernier dans une maternité.
Il boit, mange, et respire tous les jours. Il lui arrive même de se coiffer.
Physiquement, il est d’un quelconque rare. Intellectuellement, c’est pire.
Si l’envie vous prend d’en savoir davantage, il est possible de l’interroger….
C’est ainsi que vous trouvez la bio d’Hervé SARD sur son site, ça vous explique un peu le bonhomme…
Hervé SARD est un garçon discret, gentil et surtout humaniste. Notre première rencontre en réelle date de la sortie de l’Exquise Nouvelle, nous avons sympathisé, Hervé a accepté de travailler sur mes illustrations pour « D’où viens-tu Béru » (*), puis de participer à un autre grand projet dont je vous reparlerai dans ces colonnes…
Pour l’heure nous allons parler de son dernier livre en date, aux éditions Krakoen ; « Le crépuscule des Gueux »
Moi quand je prends les transports en commun, souvent je lis, j’aime ça, comme beaucoup, Hervé lui, non, il ne doit pas lire quand il prend le RER, il regarde le paysage, pas le beau paysage, non, celui dont on a un peu honte, les camps de fortune des miséreux, des éclopés de la vie. Il les observe et s’en inspire, puis il vous transcrit le tout dans un roman, bien orienté de noir, un livre fleuri de désespoir.
Bien sur il y a une enquête policière, une intrigue, mais elle ne sert que de faire valoir à une analyse de ma misère de ce XXIème siècle. Au départ de la lecture on entre dans ce No Man’s Land qu’est le quai des « Gueux », un campement fait de bric et de broc, une vie en communauté qui nous donnerai presque envie de raccrocher le costume et la cravate et de vivre aussi au gré de la nature, sans argent, sans taxe, sans rien d’obligeant. Mais plus on avance dans le livre, plus l’on découvre le revers de la médaille, le coté obscur, la détresse et la misère des hommes, que l’on se demande comment l’on peut tomber comme cela, du jour au lendemain dans le « monde de la cloche », puis surtout on se demande si un jour, cela ne peux pas nous arriver…
Sans aucun voyeurisme, sans aucune compassion excessive nous pénétrons dans leur monde, dans leurs angoisses, leurs attentes, leurs peurs, leurs vies…
Un bel ouvrage, sur l’exclusion, sur le respect de l’être humain, même et surtout quand il est à la rue, et remarquez le titre, Hervé SARD à mis une majuscule à Gueux…
Le quatrième de couverture :
« Les Gueux, c’était l’enfer.
Et c’était aussi le paradis. Allez expliquer ça… Des années que ça durait. Les Gueux, c’était un no man’s land avec du monde dedans. Ceux qui vivaient là, ils se cramponnaient, vous comprenez, comme des naufragés sur un radeau qui prend l’eau qu’on colmatait au système D. On s’arrangeait, fallait bien. Et puis ça a recommencé. Et puis ça s’est arrêté. C’est quand on a compris, quand tout était fini, que tout a commencé. Les trois mortes, c’est sûr, elles n’étaient pas inventées. Alors, enfer ou paradis, j’ai plus douté. »
Le début de la préface de Joël Gastellier, qui en dit long sur le livre :
« Longtemps je me suis assis sur les banquettes des trains de banlieue qui acheminaient le lumpenprolétariat des cités dortoirs jusqu’au pavé parisien. La grisaille se succédant à elle-même, il me fallait tout de même reconnaître l’existence d’un monde insoupçonné le long de ces voies. Mais je n’y ai jamais vraiment porté attention. Demandant à Hervé Sard d’où lui était venue l’idée d’ancrer son polar dans un campement de SDF près d’une ligne de RER, sa réponse me désarma quelque peu : la simple observation de lieux semblables, le regard hors-cadre de celui qui interroge son époque. À l’heure où les amateurs de « noir » déplorent la dérive du genre vers toujours plus d’hémoglobine, irriguant un amoncellement plus ou moins probant de scènes chocs, il est toujours réjouissant de tomber sur un roman plus enclin à dépeindre un milieu, à jeter la sonde là où nous ne mettons jamais les pieds. Si les conséquences apparaissent plus spectaculaires à mettre en mots, l’attachement aux caractères, aux motivations qui agissent les personnages, confère à l’écrivain ce rôle majeur que n’hésitait pas à souligner Roland Barthes : celui justement d’interroger. Dès les propos liminaires, “Le crépuscule des Gueux” nous fait violence. Qu’est-ce qu’une société générant tant d’inégalité? »