Chapitre 1 : : Le marché de Noël

12 décembre.

L’hiver s’était installé en maître en Normandie. Un froid mordant balayait les plaines du Calvados, recouvrant la campagne d’un givre délicat. Les arbres dénudés, figés sous un ciel perlé de gris, semblaient chuchoter des secrets anciens, portés par une brise glaciale.

À Caen, la ville vibrait pourtant d’une chaleur particulière. Les rues pavées du centre historique résonnaient de rires et de conversations animées, tandis que les passants emmitouflés dans leurs écharpes s’affairaient à leurs emplettes. La lumière dorée des réverbères se mêlait à l’éclat coloré des guirlandes, et un parfum mêlé de marrons chauds, d’épices et de sapin flottait dans l’air.

Sur la place Saint-Sauveur, cœur battant du marché de Noël, l’agitation était à son comble. Les chalets en bois, illuminés de guirlandes scintillantes et ornés de flocons brillants, formaient un petit village éphémère bruissant d’activités. Ici, un marchand de pain d’épices vantait ses douceurs avec un sourire gourmand. Là, un artisan souffleur de verre émerveillait les badauds avec ses créations délicates. Plus loin, un vendeur de vin chaud remplissait des gobelets fumants, l’arôme enivrant réchauffant les cœurs.

Madeline Polmes, ancienne flic à la retraite, se faufilait à travers le marché de Noël, place Saint-Sauveur. Les guirlandes scintillantes et la musique festive semblaient danser autour d’elle, mais pour Madeline, l’ambiance n’était jamais aussi légère qu’elle en avait l’air. Elle aimait moins Noël que l’odeur des marrons chauds et du vin épicé qui se mélangeait à l’air frais. À ses yeux, les festivités n’étaient qu’un masque étincelant dissimulant les travers humains qu’elle avait passé une vie à traquer.

Elle hésita un instant, le regard perdu dans la foule bigarrée, avant de se diriger vers le Café-Librairie de Sophie Freyja, niché dans une rue adjacente. Là, la chaleur et le parfum promettaient un réconfort temporaire.

En entrant, elle aperçut Sophie derrière le comptoir, concentrée à préparer des tasses de vin chaud pour quelques clients installés. La librairie, décorée de guirlandes dorées et de petites figurines de Noël, respirait une atmosphère paisible et chaleureuse. Sophie leva les yeux en entendant la porte s’ouvrir, prête à offrir son sourire habituel, mais celui-ci s’effaça presque immédiatement en croisant l’expression de Madeline.

Une tension subtile s’installa dans l’air, brouillant un instant l’esprit joyeux du lieu.

Sophie :
« Qu’est-ce qui ne va pas ? »

Madeline :
« Guillaume Roussel est mort. »

Sophie s’immobilise un instant, le bruit des tasses s’arrêtant. Elle fronce les sourcils, un choc évident traversant son visage.

Sophie (murmurant) :
« Guillaume ? Mais… c’est impossible. Ce n’est pas possible. »

Madeline hoche la tête, la gravité de la situation se lisant sur ses traits.
« Je viens de l’apprendre. Il a été retrouvé mort au chalet de pain d’épices. On parle d’un accident, mais ça me semble trop simple. Et je crois qu’il y a autre chose derrière tout ça. »

Sophie reste un moment sans voix, son esprit cherchant à assimiler cette nouvelle. Guillaume, l’ancien copain de lycée qu’elle avait perdu de vue depuis des années, un visage qu’elle n’avait jamais imaginé associé à la mort prématurée. Il avait été un visage familier dans les rues de Caen, une figure réconfortante du passé.

Sophie (se forçant à respirer profondément) :
« Tu es sûre ? »

Madeline (regardant autour d’elle avant de se pencher un peu plus près de Sophie) :
« Selon mes anciens collègues, il s’agirait d’un empoisonnement, Sophie. Mais il y a des détails qui rendent tout ça bien plus étrange. »

Sophie se tourne, fixant Madeline avec un mélange de doute et d’inquiétude, avant de se forcer à respirer lentement pour apaiser la vague d’émotions qui la submerge. Elle regarde les tasses de vin chaud qu’elle sert habituellement avec tant de plaisir, mais ce soir-là, tout semble figé. Elle réalise que ce qu’elle pensait être une soirée tranquille de Noël est devenu le début d’une enquête bien plus sombre.

Sophie :
« Guillaume… Il n’avait pas de raison de mourir comme ça. »

Madeline :
« Justement. Il n’y a jamais de raison ‘de mourir comme ça’. Mais il y a toujours une vérité qui attend d’être trouvée. Et crois-moi, Sophie, elle n’est jamais aussi simple qu’elle en a l’air. »

Elle prend une gorgée du vin chaud que Sophie lui a servi, savourant brièvement le goût sucré et épicé qui semble apaiser l’âpreté de ses pensées. Le silence qui suit est chargé de non-dits, comme si les mots retenus flottaient entre elles.

Sophie, toujours debout près du comptoir, fixe le mur couvert de livres derrière Madeline. Les souvenirs de Guillaume affluent dans son esprit, et une résolution s’ancre doucement en elle.

Sophie (se retournant brusquement vers Madeline, le regard déterminé) :
« Faisons-le ensemble. Je sais que tu veux savoir ce qui s’est passé. Et moi aussi. Tu as l’expérience, et moi… j’ai mes contacts ici. On pourrait former une équipe, non ? Juste pour cette fois. »

Madeline (hausse un sourcil, amusée) :
« Une équipe, hein ? Moi, une vieille flic à la retraite, et toi, une libraire qui sait préparer un vin chaud parfait ? »

Sophie (sourire en coin) :
« Exactement. Et ne sous-estime pas la puissance du vin chaud parfait, Madeline. »

Madeline pose sa tasse, un sourire esquissé sur les lèvres. Ses yeux pétillent d’une lueur malicieuse, mais aussi d’une sincère reconnaissance.

Madeline :
« Tu sais quoi, Freyja ? Pourquoi pas. Mais si on fait ça, je tiens à poser une règle. »

Sophie :
« Laquelle ? »

Madeline (croisant les bras) :
« Le vin chaud. Tu es responsable de le garder en stock. Et on le boira chaud, pas tiède. »

Sophie éclate de rire, brisant la tension qui s’était doucement installée.

Sophie :
« Marché conclu. Alors, coéquipière, par où on commence ? »

Madeline prend une grande inspiration, son regard se durcissant légèrement alors qu’elle fixe la porte, au-delà de laquelle le marché de Noël scintille dans la nuit froide.

Madeline :
« Par là où commence toujours une enquête : en posant les bonnes questions. Et crois-moi, Sophie, celles-ci ne vont pas plaire à tout le monde. »

Chapitre 2 : : Secrets sous les guirlandes

Le lendemain matin, le marché de Noël vibrait de vie et de lumières, transformant la place centrale de Caen en un tableau féerique. Les chalets, décorés de guirlandes lumineuses et de branches de sapin, semblaient rivaliser de créativité. Sophie jeta un regard admiratif vers un chalet décoré de pommes de pin dorées et de branches de sapin enneigées. Une vendeuse y disposait soigneusement des figurines de Noël en céramique. L’air était saturé des effluves de marrons chauds, de vin épicé et de sucre caramélisé, enveloppant les passants dans une douce chaleur malgré le froid mordant.

Sophie et Madeline traversaient la foule compacte, avançant à petits pas entre les étals. Sophie observait les décorations d’un regard émerveillé, tandis que Madeline, plus pragmatique, s’arrêta devant un stand de vin chaud.

Madeline (jetant un œil à la grande marmite fumante) :
« On ne mène pas une enquête les mains vides. »

Avant que Sophie ne puisse répondre, Madeline tendit une pièce au vendeur et saisit une tasse brûlante. Elle en huma les effluves avec satisfaction.

Sophie (avec un sourire amusé) :
« Un vin chaud à 10 heures du matin ? Pas très orthodoxe pour une ex-flic, non ? »

Madeline (haussant les épaules) :
« Les fêtes, c’est déjà assez pénible comme ça. Alors si je peux tolérer un peu d’esprit de Noël grâce à ce breuvage, je ne vais pas m’en priver. »

Sophie éclata de rire et elles continuèrent leur chemin jusqu’au chalet de Marguerite, la confiseuse.

À l’intérieur, l’odeur de sucre et de vanille était presque étourdissante. Des bocaux en verre scintillaient sous les guirlandes électriques, et Marguerite, la confiseuse, leur adressa un sourire chaleureux tout en ajustant son tablier.

Sophie :
« Bonjour, Marguerite ! Vous avez entendu parler de ce qui est arrivé à Guillaume ? »

Marguerite fronça les sourcils et posa un paquet de caramels sur le comptoir.
Marguerite :
« Ah, ce pauvre garçon… Une fin si tragique. Mais vous savez, tout le monde ici ne l’appréciait pas vraiment. »

Madeline (sirotant son vin chaud) :
« Tiens donc, il avait des ennemis, notre ami Guillaume ? »

Marguerite baissa légèrement la voix, jetant un coup d’œil autour d’elle.
Marguerite :
« Il y avait des rumeurs… Et puis, cette histoire avec Paul, le vendeur de pralines. Ils se sont disputés, c’est sûr. »

Madeline hocha la tête, son regard perçant fixant Marguerite jusqu’à ce qu’elle passe la porte.

Dehors, les lumières des chalets commençaient à scintiller, malgré la lumière grise du matin. Une chorale improvisée chantait Douce nuit près d’un grand sapin décoré, attirant l’attention des passants. Madeline termina sa tasse de vin chaud et, à la surprise de Sophie, en commanda immédiatement une autre au stand voisin.

Sophie (plissant les yeux avec un sourire malicieux) :
« Encore ? À ce rythme, le vendeur va te proposer une carte de fidélité… ou te facturer au litre ! »

Madeline :
« Écoute, tout ce cirque me donne soif. Et puis, je suis à la retraite, je fais ce que je veux. »

L’odeur de caramel brûlé guida leurs pas vers le stand de Paul, le vendeur de pralines. Le bol en cuivre fumait doucement alors qu’il mélangeait des amandes brillantes de sucre caramélisé.

Sophie (souriant) :
« Bonjour, Paul ! L’odeur est irrésistible, comme toujours. »

Paul releva la tête, essuyant ses mains sur un torchon. Son expression s’assombrit en voyant Madeline, mais il répondit poliment.
Paul :
« Bonjour, Sophie. Qu’est-ce qui vous amène ? »

Sophie :
« On parle avec les commerçants. Vous avez sûrement entendu pour Guillaume. »

Paul haussa les épaules et se remit à mélanger les pralines.
Paul :
« Bien sûr. Enfin, je me comprends… Un gars comme lui, ce n’était qu’une question de temps avant que ses histoires tournent mal. »

Madeline arqua un sourcil, un sourire en coin.
Madeline :
« ‘Enfin, je me comprends.’ Vous dites ça souvent, ou seulement quand vous n’avez pas envie qu’on comprenne ce que vous voulez vraiment dire ? »

Paul s’arrêta net, visiblement pris au dépourvu.
Paul :
« Non, mais… enfin, vous voyez ce que je veux dire. Guillaume n’était pas un ange. Il vendait ses biscuits à moitié prix juste pour me faire perdre des clients. »

Madeline (avec ironie) :
« Et évidemment, ce genre de crime mérite qu’on finisse… empoisonné ? »

Paul fronça les sourcils, les joues légèrement rouges, et se replongea dans son travail. Sophie jeta un regard désapprobateur à Madeline, qui haussa les épaules, visiblement peu affectée.

En sortant du chalet, elles furent accueillies par un parfum de pain d’épices et de cannelle. Sophie, en admiration devant un stand voisin qui vendait des couronnes de Noël tressées à la main, ne put s’empêcher de commenter.

Sophie :
« Regarde ça, Madeline. C’est ça, la magie de Noël. »

Madeline (avec un sourire sarcastique, sa nouvelle tasse de vin chaud en main) :
« Si on oublie les querelles, les rumeurs et les crimes en cours, c’est un vrai paradis. »

Sophie soupira mais ne put s’empêcher de rire doucement, consciente que, sous ses airs cyniques, Madeline était une observatrice redoutable.

Chapitre 3 : : Sous le vernis des apparences

Alors que la journée avançait, le marché de Noël s’animait encore davantage. Les chalets rivalisaient de charme avec leurs guirlandes scintillantes, et une fanfare jouait des airs festifs près de la patinoire temporaire installée au centre de la place. Les voix joyeuses des enfants se mêlaient au martèlement des lames sur la glace, apportant une légèreté trompeuse à l’atmosphère.

Madeline, une nouvelle tasse de vin chaud en main, suivait Sophie de chalet en chalet. Sa démarche nonchalante dissimulait cependant une attention aiguisée : chaque regard, chaque tic, chaque mot était soigneusement analysé.

Elles s’approchèrent d’un stand de décorations artisanales. La vendeuse, une femme d’une quarantaine d’années aux cheveux en chignon, disposait des boules de Noël peintes à la main. En les voyant arriver, son sourire sembla légèrement crispé.

Sophie (chaleureuse) :
« Bonjour, Claire ! Quelle beauté, ces décorations. Vous vous surpassez chaque année. »

Claire hocha la tête avec un sourire hésitant.
Claire :
« Merci, Sophie. Vous cherchez quelque chose de précis ? »

Sophie :
« Pas exactement. On discute avec les commerçants… Vous avez sûrement entendu parler de Guillaume. »

Claire devint immédiatement nerveuse, ses mains jouant avec un ruban rouge.
Claire :
« Oui, bien sûr. Une terrible tragédie. Mais je ne sais pas grand-chose… Enfin, pas plus que les autres. »

Madeline, qui observait en silence, décida d’intervenir.
Madeline :
« Pas plus que les autres, dites-vous ? Pourtant, vous semblez sur le point de faire tomber cette boule de Noël tellement vos mains tremblent. »

Claire releva brusquement la tête, les joues rouges.
Claire :
« Je ne vois pas ce que vous voulez dire. Guillaume et moi, on… enfin, c’était juste un collègue comme un autre. »

Madeline (avec un sourire pincé) :
« ‘Juste un collègue’, mais suffisamment important pour que vous perdiez votre calme. Intéressant. »

Claire recula légèrement, cherchant visiblement à mettre fin à la conversation.

Sophie (calmement) :
« Merci, Claire. Si jamais vous vous souvenez de quelque chose, n’hésitez pas à venir nous voir. »

En s’éloignant du stand, Sophie jeta un regard à Madeline.
Sophie :
« Tu es un vrai bulldozer quand tu veux. »

Madeline (souriante) :
« Les bulldozers, ça déterre des choses. Et crois-moi, Claire sait quelque chose. Maintenant, il faut juste lui laisser le temps de craquer. »

Elles continuèrent leur chemin, passant devant un chalet où un artisan gravait des prénoms sur des porte-clés en bois. Plus loin, un vendeur d’huiles essentielles faisait sentir ses mélanges apaisants à des clients curieux. Le marché semblait reprendre son ambiance festive, mais l’ombre du meurtre planait toujours dans l’esprit des deux femmes.

Elles décidèrent de retourner voir Marguerite, la confiseuse, dans l’espoir d’en apprendre davantage. La boutique brillait sous les guirlandes, et l’odeur de sucre les accueillit à nouveau comme un vieux souvenir d’enfance.

Marguerite (levant les yeux en les voyant arriver) :
« Tiens, vous revoilà. Vous avez des questions, j’imagine ? »

Sophie :
« Oui. On se demandait si Guillaume avait mentionné quelqu’un ou quelque chose d’inhabituel récemment. »

Marguerite sembla réfléchir, un sourcil levé.
Marguerite :
« Rien qui me vienne à l’esprit… Mais il avait l’air tendu ces derniers temps. Comme s’il était sous pression. »

Madeline (sèchement) :
« Et vous n’avez pas pensé à lui demander pourquoi ? Vous semblez pourtant curieuse par nature. »

Marguerite se raidit, avant de hausser les épaules.
Marguerite :
« Écoutez, j’ai assez à faire avec mes bonbons. Je ne vais pas en plus me mêler des affaires des autres. »

Sophie (d’un ton plus doux) :
« Merci, Marguerite. Vous savez, parfois un petit détail anodin peut s’avérer important. »

Elles sortirent, un silence pesant entre elles.

Dehors, Madeline finit sa tasse de vin chaud et s’arrêta devant un stand proposant des écharpes en laine tricotées à la main. Elle en prit une entre ses doigts, contemplative.

Sophie (amusée) :
« Tu veux te convertir au tricot, maintenant ? »

Madeline (distraitement) :
« Pas vraiment. Mais parfois, une simple écharpe peut raconter une histoire. Tu sais, des fils qui s’entrelacent pour créer quelque chose de solide. Ça me fait penser à cette enquête. »

Sophie (intriguée) :
« Et tu penses que ces fils vont nous mener où ? »

Madeline (souriant en coin) :
« À une pelote bien emmêlée, ça, c’est sûr. »

La journée au marché touchait à sa fin, et les deux femmes décidèrent de faire une pause dans le café-librairie de Sophie. Situé dans une petite rue adjacente au marché, l’endroit attirait les amateurs de littérature et de boissons chaudes avec sa façade chaleureuse, décorée de guirlandes lumineuses et d’une couronne de sapin garnie de rubans rouges.

À l’intérieur, le rez-de-chaussée abritait un comptoir en bois sombre où les boissons étaient préparées. Deux petites tables étaient disposées près de la vitrine, entourées de chaises rembourrées qui invitaient à s’asseoir. Les murs étaient ornés d’étagères débordantes de livres, mêlant classiques du roman policier et nouveautés. Un sapin décoré d’ornements rouges et or trônait dans un coin, apportant une touche festive.

Un escalier en colimaçon, en fer forgé noir, menait à l’étage. Là, une salle cosy attendait les lecteurs, avec des fauteuils moelleux, des coussins et des petites lampes qui diffusaient une lumière tamisée. C’était l’endroit parfait pour feuilleter un livre ou participer aux cafés littéraires que Sophie organisait régulièrement.

Madeline posa sa dernière tasse de vin chaud sur une des tables du rez-de-chaussée.

Madeline (s’installant avec un soupir de satisfaction) :
« On réfléchit toujours mieux avec une tasse de vin chaud… surtout que le tien est délicieux, Freyja. Tu pourrais faire fortune avec ça. »

Sophie (amusée, en ramenant deux parts de tarte aux pommes qu’elle avait préparées le matin) :
« Merci pour la pub, mais je doute que les éditions policières soient prêtes à s’incliner devant un verre de vin épicé. »

Madeline haussa les épaules, un sourire en coin, avant de piquer dans sa part de tarte.

Madeline :
« Alors, qu’est-ce qu’on a ? Tout le monde semble avoir un problème avec Guillaume. C’est presque trop simple, non ? »

Sophie s’installa face à elle, son carnet de notes ouvert devant elle. Elle y avait griffonné des bribes d’informations tout au long de la journée.

Sophie :
« Oui, mais il y a quelque chose qui m’échappe… Marguerite a dit qu’il avait l’air tendu ces derniers temps, mais Claire, elle, semblait vraiment mal à l’aise quand on a parlé de lui. »

Madeline (prenant une gorgée de vin chaud) :
« Tu veux mon avis ? Claire et Guillaume avaient une liaison. Ce genre de malaise ne trompe pas. »

Sophie (surprise) :
« Tu crois ? Mais elle a l’air si discrète, si réservée. »

Madeline (sèchement) :
« Les apparences, ma chère Freyja, ne sont jamais fiables. On ne devient pas flic pendant trente ans sans apprendre ça. »

Sophie hocha la tête, réfléchissant.

Sophie :
« Si c’est vrai, ça pourrait expliquer son comportement. Mais pourquoi être aussi nerveuse si leur histoire est terminée ? À moins qu’il y ait autre chose… »

Madeline (en posant sa tasse) :
« Peut-être qu’elle savait quelque chose sur lui. Une histoire qu’il aurait préféré garder secrète, et qu’elle aurait pu révéler. Dans ce cas, elle pourrait être soit une suspecte, soit une prochaine victime. »

Le silence s’installa un instant

Sophie leva les yeux vers le sapin décoré près du comptoir, pensant à ce que Guillaume aurait pu cacher. Les guirlandes dorées scintillaient doucement, mais elles semblaient presque incongrues à la lumière de leurs réflexions.

Sophie :
« Un secret. Tout tourne autour de ça. Reste à savoir si c’est lié à son travail, à ses relations, ou à quelque chose de plus personnel. »

Madeline :
« Peut-être qu’un des chalets contient plus que des cadeaux et des douceurs. Si tu veux mon avis, on devrait commencer par celui de Claire. Mais discrètement, évidemment. »

Sophie (souriant) :
« Discrètement ? Avec toi ? J’ai hâte de voir ça. »

Madeline lui jeta un regard amusé, mais ne répondit rien.

La journée touchait à sa fin, Madeline consulta sa montre et se leva avec une certaine lenteur, ses articulations semblant protester contre le froid extérieur qui l’attendait.

Madeline (d’un ton nonchalant) :
« Bon, il est temps que je rentre. Cette enquête ne se résoudra pas ce soir, et moi, j’ai besoin de repos. Tu devrais en faire autant. »

Sophie hocha la tête, un sourire en coin. Mais avant que Madeline ne franchisse la porte, elle attrapa une petite thermos argentée sur une étagère derrière le bar.

Sophie (avec un clin d’œil malicieux) :
« Attends. Je sais que tu ne peux pas résister. Tiens, du vin chaud maison, pour tenir jusqu’à chez toi. »

Madeline la fixa un instant, puis éclata d’un rire sec.

Madeline :
« Tu sais me parler, toi. Si tu n’étais pas libraire, tu aurais fait un malheur comme sommelier. »

Sophie ne s’arrêta pas là. Elle sortit une assiette recouverte d’un papier sulfurisé, révélant une généreuse part de tarte aux pommes.

Sophie :
« Et ça, pour éviter que tu ne cèdes à une tentation douteuse en chemin. On ne sait jamais avec toi et les stands du marché. »

Madeline haussa un sourcil, amusée par la remarque.

Madeline (prenant la thermos et la tarte) :
« Tu sais, tu commences à sérieusement me gâter. Si je prends trop goût à ça, tu pourrais bien ne plus te débarrasser de moi. »

Sophie (riant doucement) :
« Je prends le risque. Bonne soirée, Madeline. »

Madeline (lui lançant un dernier regard en coin) :
« À demain. Et ne te couche pas trop tard à cogiter. Les libraires fatiguées ne sont pas très efficaces, même pour résoudre des meurtres. »

Sophie la regarda s’éloigner, la silhouette emmitouflée de Madeline disparaissant dans la nuit glacée, une légère vapeur s’échappant de la thermos qu’elle tenait fermement.

Dans la rue, Madeline huma les effluves épicés du vin chaud, un sourire discret aux lèvres.

Madeline (murmurant pour elle-même) :
« Pas mal, la libraire… Pas mal du tout. »

Cahpitre 4 : : Entre les lignes du mystère

Le lendemain matin, le café-librairie s’éveilla doucement sous une lumière hivernale. Sophie avait ouvert plus tôt que d’habitude, souhaitant profiter d’un moment de calme avant l’afflux des clients. Elle ajusta les guirlandes lumineuses du sapin et prépara une cafetière d’un mélange rare qu’elle réservait aux grandes occasions.

Madeline arriva peu après, emmitouflée dans une écharpe qu’elle portait presque comme une armure contre le froid. Ses joues rouges et l’odeur de vin chaud qui semblait l’accompagner trahissaient un passage matinal au marché.

Madeline (déposant un petit sachet sur le comptoir) :
« Pralines pour toi et ton arpette. Et pas celles de Paul, rassure-toi, je les ai achetées ailleurs. »

Sophie (amusée) :
« Quelle délicate attention. J’en déduis que tu veux que je te prépare une autre tasse de mon vin chaud maison ? »

Madeline (d’un ton faussement indigné) :
« Qu’est-ce que tu insinues ? Je ne fais pas ça pour le vin chaud… mais si tu insistes. »

Sophie roula des yeux en souriant et se mit à la tâche.

Une demi-heure plus tard, les deux femmes étaient à nouveau plongées dans l’affaire, assises à la table près de la vitrine. Sophie passait en revue ses notes, tandis que Madeline, le menton posé sur sa main, observait les passants dans la rue.

Sophie :
« Alors, reprenons. Claire semble nerveuse à propos de Guillaume, mais ça reste une supposition. Marguerite dit qu’il était tendu, et Paul, avec son ‘enfin je me comprends’, nous a donné un indice sur son comportement parfois opportuniste. Mais rien de tout ça ne nous explique pourquoi quelqu’un aurait voulu l’empoisonner. »

Madeline (fronçant les sourcils) :
« On ne tue pas quelqu’un de façon aussi méthodique pour une simple querelle. Cet empoisonnement, c’est personnel. Soit il a trahi quelqu’un, soit il savait quelque chose qu’il n’aurait pas dû. »

Sophie :
« Et si c’était lié à son travail sur le marché ? Peut-être qu’il faisait du tort à d’autres commerçants. Ça expliquerait certaines rancunes. »

Madeline (secouant la tête) :
« Oui, mais ça ne colle pas complètement. Empoisonner quelqu’un demande du temps, de la préparation. Ce n’est pas un acte impulsif. Ça veut dire que cette personne avait une vraie motivation. »

Sophie poussa un soupir en se laissant tomber contre le dossier de sa chaise.

Sophie :
« Et si on retournait voir Claire ? Peut-être qu’elle a réfléchi et qu’elle acceptera de parler. »

Madeline (haussant un sourcil) :
« Si tu penses qu’un sourire et une tasse de vin chaud suffiront à délier sa langue, je suis curieuse de voir ça. Mais d’accord, allons-y. »

Sophie et Madeline se préparaient à quitter le café-librairie pour retourner au marché de Noël. Sophie attrapa son manteau et se tourna vers son jeune adjoint, Arvid, un étudiant passionné de littérature qu’elle avait embauché pour l’aider.

Sophie (avec un sourire rassurant) :
« Je ne devrais pas en avoir pour longtemps. Garde un œil sur le bar, d’accord ? Si quelqu’un demande après moi, dis-leur que je reviens vite. »

Arvid (enjoué, mais un peu inquiet) :
« Pas de souci, chef ! Mais… tu es sûre que tout va bien ? »

Sophie (éludant légèrement) :
« Tout va bien, ne t’inquiète pas. Et si tu as un moment, range les livres du rayon ‘Classiques’. Ils ont besoin d’un peu de… discipline. »

Arvid hocha la tête, bien qu’il sentît que quelque chose se tramait. Sophie et Madeline quittèrent le café, laissant derrière elles l’odeur apaisante du café fraîchement préparé et des épices de Noël.

En retournant au marché, elles retrouvèrent l’agitation festive qui masquait toujours la tension de l’affaire. Le stand de Claire était encore plus lumineux que la veille, avec des boules de Noël scintillant sous un rideau de neige artificielle. La vendeuse était occupée avec un couple, mais son regard s’assombrit lorsqu’elle aperçut Sophie et Madeline approcher.

Claire (tentant un sourire maladroit) :
« Oh, vous revoilà. Vous avez trouvé ce que vous cherchiez hier ? »

Madeline (croisant les bras) :
« Pas encore. Mais on espérait que vous pourriez nous aider un peu plus aujourd’hui. »

Claire semblait sur le point de répondre quelque chose, mais une voix derrière elles interrompit la conversation.

Voix masculine :
« Claire, tout va bien ? »

Les deux femmes se retournèrent pour découvrir un homme grand, au visage anguleux, vêtu d’un manteau sombre. Il les observait avec une méfiance mal dissimulée.

Claire (hésitante) :
« Oui, Fred. Ce sont juste… des clientes curieuses. »

Sophie :
« Curieuses, peut-être, mais pas sans raison. Vous avez l’air tendue, Claire, et ce monsieur, lui, semble un peu trop intéressé par votre tranquillité. Vous nous présentez ? »

Fred (froidement) :
« Fred Fournier. Et je ne vois pas pourquoi ma présence vous intrigue. »

Madeline (sèchement) :
« Peut-être parce qu’on enquête sur un meurtre, et que vous avez l’air de vouloir garder certaines choses sous silence. »

Fred (serrant la mâchoire) :
« Et vous êtes ? »

Madeline (d’un ton sec) :
« Une ancienne flic et une libraire. Vous auriez quelque chose à cacher ? »

Claire pâlit, et Fred fit un pas en avant, comme pour protéger la vendeuse.

Fred :
« Je pense que vous devriez partir. Claire n’a rien à voir avec tout ça. »

Sophie (calmement) :
« Vous avez raison, monsieur Fournier. Claire n’a peut-être rien à voir avec tout ça… mais alors pourquoi ce malaise ? Peut-être devriez-vous nous expliquer. »

Le silence qui suivit sembla durer une éternité. Claire baissa les yeux, tandis que Maxime jetait un regard furieux aux deux femmes.

Claire (dans un souffle) :
« Guillaume et moi… nous avions une relation. Mais ce n’est pas ce que vous croyez. »

Madeline (sèchement) :
« Expliquez-nous alors ce qu’on devrait croire. »

Claire resta silencieuse un moment, triturant nerveusement un pendentif en argent qu’elle portait autour du cou. Fred – à l’expression désormais indéchiffrable – croisa les bras, se plaçant légèrement entre elle et les deux enquêtrices improvisées, comme un bouclier silencieux.

Claire (d’une voix brisée) :
« Guillaume et moi, on… on était proches, oui. Mais ce n’était pas une histoire d’amour, pas vraiment. »

Madeline (la coupant) :
« Pas vraiment ? C’est un concept intéressant, ça. Expliquez-moi comment on est ‘pas vraiment amoureux’ d’un homme qu’on fréquente en secret. »

Sophie posa une main légère sur le bras de Madeline, tentant d’adoucir l’atmosphère.

Sophie :
« Prenez votre temps, Claire. Ce n’est pas facile, mais ça pourrait nous aider à comprendre. »

Claire leva des yeux rougis vers Sophie, cherchant un semblant de réconfort.

Claire (à voix basse) :
« Guillaume et moi avions un accord… Il avait des soucis d’argent. Je l’aidais quand je pouvais, et en échange, il… il faisait des choses pour moi. »

Madeline (haussant un sourcil sceptique) :
« Des choses ? Vous êtes assez vague pour qu’on imagine le pire. »

Fred intervint brusquement, son ton cinglant.

Fred :
« Ça suffit. Claire n’a rien à voir avec sa mort. Vous cherchez des réponses là où il n’y en a pas. »

Madeline (le fixant froidement) :
« Et vous, vous êtes quoi, exactement ? Le chevalier servant ? Le garde du corps ? Parce que jusqu’ici, tout ce que vous faites, c’est semer du mystère. »

Fred serra les poings, mais avant qu’il ne puisse répondre, Claire le devança.

Claire :
« Fred n’a rien à voir avec ça. Il m’aide à gérer le chalet, c’est tout. Et… et je crois qu’il essaie juste de me protéger. »

Un silence tendu s’installa. Sophie jeta un coup d’œil autour d’elle, observant les passants qui semblaient insouciants sous les décorations lumineuses du marché. Mais elle sentait que quelque chose de plus sombre se cachait sous la surface.

Sophie :
« Claire, est-ce que Guillaume avait des ennemis ? Quelqu’un à qui il aurait fait du tort ? »

Claire hésita, mordillant sa lèvre inférieure.

Claire (hésitante) :
« Il… il avait des dettes. Je sais qu’il avait des problèmes avec certains fournisseurs. Et peut-être avec d’autres commerçants du marché. Mais je ne pensais pas que ça pouvait aller aussi loin… »

Madeline :
« Des dettes, des relations ambiguës, des pratiques douteuses… On dirait que Guillaume avait le don de se mettre dans de beaux draps. »

Alors qu’elles s’apprêtaient à poser d’autres questions, une voix familière retentit derrière elles.

Paul (avec son tic habituel) :
« Ah, vous êtes encore là, enfin je me comprends ! Je me demandais si vous aviez trouvé quelque chose d’intéressant sur notre… regretté ami. »

Sophie et Madeline échangèrent un regard. L’artisan praliner semblait en savoir plus qu’il ne voulait l’admettre, et son apparition soudaine à ce moment précis n’était pas anodine.

Madeline (d’un ton sarcastique) :
« Paul, toujours aussi discret, hein ? Vous avez l’air d’aimer traîner là où ça chauffe. »

Paul (souriant avec nervosité) :
« Moi ? Pas du tout ! Je suis juste… curieux. Enfin, je me comprends. »

Sophie :
« Curieux, peut-être. Mais vous êtes aussi un homme qui semble tout entendre sur ce marché. Alors, Paul, qu’est-ce que vous savez ? »

Paul, appuyé contre le comptoir de son chalet, balaya les deux femmes du regard avec un sourire qui ne faisait qu’accentuer sa nervosité. Il ajusta sa toque, comme s’il cherchait une échappatoire.

Paul (d’un ton presque innocent) :
« Moi ? Je ne sais rien de plus que ce que vous avez déjà découvert. Guillaume, c’était un client régulier. On a échangé quelques mots ici et là, mais rien de plus, enfin… je me comprends. »

Madeline croisa les bras, un sourire en coin, comme si elle avait vu à travers son jeu. Elle n’aimait pas les faux-semblants, et Paul en était plein.

Madeline (avec un air amusé) :
« Ah, c’est ça, vous ne savez rien… C’est étrange que vous soyez toujours là quand les choses deviennent intéressantes, Paul. D’ailleurs, vous m’avez dit une fois qu’on entendait beaucoup de choses, quand on tenait un stand ici. Vous en avez entendu des trucs, récemment ? »

Paul esquiva son regard, jetant des coups d’œil nerveux à Claire, comme s’il attendait son feu vert pour répondre. Mais Claire, visiblement perdue dans ses pensées, ne semblait pas prête à l’aider.

Sophie (en prenant la relève) :
« Paul, on sait tous les deux que ce marché, c’est un peu une petite ville en soi. Les commerçants ont des oreilles et des yeux partout. Si Guillaume avait des problèmes, vous devez savoir de quoi il s’agissait. Qui lui en voulait ? »

Paul soupira, les épaules s’affaissant légèrement sous la pression. Après un moment d’hésitation, il sembla finalement céder.

Paul :
« Je suppose que… je suppose qu’il y avait des tensions, oui. Il avait des dettes chez plusieurs commerçants du marché. Mais ce n’était pas qu’une question d’argent, il y avait aussi cette histoire de… je sais pas, d’ambiguïtés, disons. »

Madeline se pencha légèrement en avant, l’air intéressé, mais elle ne lâchait pas Paul du regard.

Madeline :
« Des ambiguïtés, dites-vous ? Vous sous-entendez qu’il aurait eu des relations un peu plus… tendues avec certains ? »

Paul sembla se raidir, mais se sentit sans doute acculé à répondre.

Paul :
« Disons qu’il avait des affaires qui n’étaient pas tout à fait en règle. Il faisait parfois des affaires avec des gens qui… comment dire… n’étaient pas exactement des modèles de vertu. »

Sophie prit une profonde inspiration, réfléchissant aux implications. Des dettes, des relations douteuses, des affaires louches… Tout cela devenait de plus en plus compliqué. Et pourtant, quelque chose dans l’attitude de Paul laissait penser qu’il savait plus qu’il n’en disait.

Sophie (calmement, mais avec insistance) :
« Vous évoquez des gens louches, Paul. Vous avez un nom, peut-être ? Ou même une description ? Qui étaient ces personnes ? »

Paul, visiblement mal à l’aise, recula d’un pas, comme s’il se préparait à prendre la fuite. Mais avant qu’il ne puisse répondre, un cri strident déchira l’air.

Claire (criant) :
« Arrêtez, Paul ! C’est trop ! Vous ne pouvez pas tout dire maintenant ! »

Claire s’approcha en courant, le visage marqué par une profonde angoisse. Fred se précipita à son côté, posant une main protectrice sur son épaule.

Claire :
« Vous ne pouvez pas faire ça, Paul. Vous ne pouvez pas nous accuser tous comme ça ! »

Madeline se tourna vers Claire, son regard dur, mais empreint de compréhension.

Madeline :
« Calmez-vous, Claire. Personne n’accuse personne. Mais il est clair que votre… ami Guillaume avait des ennemis. On est juste en train de découvrir lesquels. »

Fred sembla sur le point d’intervenir, mais se figea, voyant que les choses se compliquaient rapidement. Claire, quant à elle, se laissa tomber sur le banc à côté de son chalet, le visage marqué par une douleur évidente.

Sophie (doucement) :
« Claire, on ne vous demande pas de tout révéler, mais si vous savez quelque chose, ça pourrait faire la différence. Ce qui est arrivé à Guillaume, ce n’était pas un accident. Ce n’était pas un simple empoisonnement, c’était prémédité. »

Claire baissa la tête, ses mains tremblantes serrant la lanière de son sac. Elle soupira profondément avant de relever les yeux vers Sophie, une décision semblant se dessiner dans son regard.

Claire :
« Je vais vous dire ce que je sais… Mais après, il faut que vous compreniez… Je ne veux pas que tout ça détruise ce que nous avons ici, sur le marché. Il y a des secrets qui sont plus dangereux que l’on ne croit. »

Madeline et Sophie échangèrent un regard. Cela commençait à prendre une tournure bien plus sérieuse. Et elles étaient prêtes à entendre toute la vérité.

Claire, les mains serrées autour de son manteau. Elle fixa un instant l’horizon, comme si elle cherchait ses mots dans l’air froid. Claire inspira profondément avant de commencer à raconter.

Claire :
« Vous devez comprendre que ce marché, ce n’est pas juste un endroit où on vend des guirlandes et du vin chaud. Il y a des gens derrière, des gens qui… dirigent tout ça. Ils contrôlent tout ici. Et Guillaume, il l’a su un peu trop tard. »

Sophie et Madeline se rapprochèrent, attentives. Claire marqua une pause, comme pour trouver la bonne manière de décrire les choses sans tout effrayer d’un coup.

Claire :
« Guillaume savait que ce n’était pas juste des dettes. Il y avait un réseau, un réseau qui… s’infiltre dans tout. Dans chaque transaction, dans chaque étal. Si tu veux vendre, t’es obligé de jouer selon leurs règles. »

Madeline (à voix basse) :
« Alors pourquoi avoir continué à jouer avec le feu ? »

Claire leva les yeux, son regard marqué par une forme de tristesse mêlée à de la colère.

Claire :
« Parce que Guillaume était quelqu’un de… de droit, dans un monde qui ne l’était pas. Il ne supportait pas de se laisser manipuler. Mais ce qu’il ne comprenait pas, c’est que ce n’était pas lui qui décidait. »

Elle se tut un instant, perdue dans ses pensées. Madeline hocha lentement la tête, son regard perçant fixant Claire.

Madeline :
« Alors il a parlé, c’est ça ? Il a révélé ce qu’il savait ? »

Claire (hésitante, mais forcée de continuer) :
« Oui. La soirée où tout a basculé, il était ivre. Très ivre. Et au lieu de se taire, comme il aurait dû le faire, il a tout dit. Tout haut. »

Un long silence s’installa, et Sophie, après avoir jeté un coup d’œil vers l’endroit où Guillaume avait été retrouvé, se tourna vers Claire.

Sophie :
« Racontez-nous, Claire. Qu’est-ce qui s’est passé cette nuit-là ? »

Chapitre 5 : : La soirée fatale

La neige tombait doucement cette nuit-là, recouvrant le marché d’un voile d’innocence. Mais à l’intérieur des chalets, les choses étaient loin d’être aussi paisibles. Guillaume avait passé une soirée à trinquer avec les commerçants, de plus en plus bruyant au fur et à mesure que les verres de vin chaud se succédaient. L’alcool l’avait libéré de ses inhibitions, et ce qu’il avait sur le cœur ne tarda pas à éclater.

Il s’arrêta devant un groupe de commerçants, un verre à la main, son regard déjà un peu trouble.

Guillaume (riant) :
« Alors, comment ça va les petits malins ? Vous êtes toujours aussi cachotiers, à faire tourner ce marché comme vous le voulez ? »

Les commerçants échangèrent des regards gênés, mais personne ne répondit. La tension se fit plus palpable.

Guillaume (en haussant le ton) :
« Vous vous croyez malins avec vos petites magouilles, mais tout le monde le sait, hein. Vous avez beau faire les gentils avec vos pralines, vos guirlandes, tout ça, vous êtes tous dans le même panier ! Et moi, je commence à en avoir marre de faire semblant ! »

Les yeux de certains commerçants s’étaient élargis sous l’effet de la surprise et de la crainte. Mais aucun n’osa l’arrêter. Parmi eux, Paul, le vendeur de pralines, détourna la tête, semblant ne rien entendre, mais son visage s’était durci.

Guillaume (d’un ton plus menaçant, en s’approchant du groupe) :
« Et vous, les petites frappes qui traînent par ici, vous croyez qu’on ne vous voit pas ? Vous faites du sale boulot pour un peu d’argent, mais vous n’êtes rien à leurs yeux. Rien ! »

Un silence pesant s’abattit sur le groupe. La fête autour d’eux continuait, mais les paroles de Guillaume résonnaient comme une menace dans l’air glacé. Un homme, grand et costaud, qui se tenait à l’ombre du chalet, s’avança doucement, son regard sombre.

L’homme (d’une voix basse mais menaçante) :
« Tu ferais bien de fermer ta bouche, mon vieux. Tu ne sais pas à qui tu t’attaques. »

Mais Guillaume, trop imbibé de vin et d’arrogance, secoua la tête, défiant celui qui venait de parler.

Guillaume :
« J’ai plus peur de vous, bande de lâches. Vous croyez qu’on va laisser tout ça traîner indéfiniment ?! »

Il se tourna brusquement, titubant, avant de s’éloigner du groupe, murmurant des paroles inaudibles dans la neige tombante.

Quelques heures plus tard, Guillaume était retrouvé sans vie, allongé dans l’allée du marché, le visage pâle, les yeux grand ouverts, comme s’il avait voulu crier sans y parvenir.

Le poison avait agi rapidement, silencieusement. Peut-être un toxique mélangé dans l’un des vins chauds qu’il avait consommés cette nuit-là, ou bien un ingrédient plus subtil, placé discrètement dans son verre… Ce qui était certain, c’était que quelqu’un avait voulu lui faire payer son imprudence.

Claire, les yeux encore embués de larmes, termina son récit dans un murmure.

Claire :
« Ce n’était pas un accident, vous le savez bien. Il a été tué pour avoir parlé. Pour avoir révélé ce que tout le monde savait mais refusait de dire. »

Sophie et Madeline se regardèrent, les pièces du puzzle commençant enfin à se mettre en place. Le marché de Noël n’était pas simplement un lieu de commerce, mais le théâtre d’un pouvoir souterrain, d’un réseau de manipulations et de menaces, où ceux qui se rebellait finissaient écrasés sous le poids de la vérité.

Madeline (d’un ton froid mais déterminé) :
« Alors, on a une idée de qui pourrait être derrière tout ça ? »

Claire secoua la tête, son regard fuyant.

Claire :
« Je ne sais pas… Mais je suis sûre d’une chose : Guillaume n’a pas dit tout ce qu’il savait. Et certains n’aiment pas qu’on fouille dans leur passé. »

Sophie et Madeline échangèrent un long regard. Aucun mot n’était nécessaire : elles comprenaient maintenant la profondeur du drame qui se jouait ici, au cœur des chalets illuminés et des effluves de cannelle. Le marché de Noël, si chaleureux en apparence, cachait des ombres bien plus menaçantes.

Sophie (d’un ton grave) :
« On ne peut pas laisser ça continuer. Ce marché, ces commerçants… Ils méritent mieux. »

Madeline (d’un ton ferme, le regard perçant) :
« Ces informations doivent être transmises à la police, Freyja. Ce n’est pas seulement une question de justice, c’est une question de sécurité. La police a les moyens d’agir, de creuser là où nous ne pouvons pas, de rassembler les preuves nécessaires. Ce réseau a déjà fait une victime, et crois-moi, il ne s’arrêtera pas là. »

Sophie poussa un soupir, ses pensées tournées vers Claire et les autres commerçants qui vivaient sous cette pression invisible mais étouffante.

Sophie :
« Le marché doit retrouver sa quiétude. C’est un endroit fait pour les rires, les rencontres, pas pour la peur. »

Madeline (esquissant un sourire en coin) :
« Et toi, Freyja, tu veux aussi retrouver ton café-librairie paisible, non ? »

Sophie (souriant malgré elle) :
« Pas faux. Mais, disons que les enquêtes ajoutent un certain… piquant à la saison. »

Elles quittèrent le marché, la neige commençant à tomber plus intensément, transformant les rues de Caen en un tableau hivernal. Leurs pas les menèrent instinctivement vers le café-librairie de Sophie.

Une amitié naissante

Dans le café-librairie de Sophie, l’ambiance était douillette et feutrée. Les guirlandes lumineuses scintillaient, projetant des reflets dorés sur les étagères remplies de livres, tandis que l’arôme sucré d’un gâteau aux épices flottait doucement dans l’air. Dehors, la neige tombait en silence, effaçant les traces du marché effervescent de la journée.

Arvid, l’adjoint de Sophie, essuyait tranquillement les verres derrière le comptoir, observant discrètement les deux femmes attablées. Il connaissait bien le caractère piquant de Madeline et l’enthousiasme de Sophie, mais ce soir, il y avait une harmonie inattendue dans leurs échanges, teintée de cette complicité propre aux nouveaux alliés.

Madeline, confortablement installée près du bar, savourait lentement une tasse de vin chaud, son troisième depuis leur arrivée.

Madeline (avec un soupir satisfait) :
« Tu sais, Freyja, je crois que j’ai enfin trouvé ma religion. Elle s’appelle ‘Vin Chaud’, et tu en es la grande prêtresse. »

Sophie (en riant) :
« Eh bien, fidèle dévote, je te préviens : si tu continues sur cette lancée, je vais devoir engager Arvid comme moine brasseur pour produire assez de vin chaud. »

Arvid, qui rangeait quelques tasses dans un coin, releva la tête avec un sourire amusé.

Arvid :
« Moine brasseur ? Ça m’irait bien, mais à une condition : pas d’habit monastique, ça gratte. »

Madeline (le regard malicieux) :
« Tu pourrais toujours remplacer la bure par un pull moche de Noël. Histoire de rester dans l’esprit de cette ‘magie’ qu’on m’impose. »

Sophie secoua la tête, amusée, tandis qu’Arvid, faussement indigné, leva les yeux au ciel avant de reprendre son travail.

Sophie (amusée) :
« Tu es incorrigible. Tu critiques Noël, mais tu passes ton temps à profiter de tout ce qui en fait le charme. »

Madeline leva un sourcil, jouant avec sa cuillère.

Madeline :
« Correction : je profite des quelques éléments supportables de cette mascarade. Ton vin chaud, ta tarte aux pommes, et… peut-être, à dose homéopathique, ta compagnie. »

Sophie (souriant, feignant l’indifférence) :
« Touchant. Je vais m’empresser d’ajouter cette déclaration à ma collection de compliments marquants. »

Madeline haussa les épaules, se réinstallant plus confortablement sur sa chaise.

Madeline :
« Tu peux. Mais, pour être honnête, je n’aurais jamais cru que résoudre un meurtre entourée de guirlandes clignotantes pourrait être aussi… stimulant. »

Sophie s’appuya contre le bar, son regard pétillant.

Sophie :
« Tu vois ? Tu t’adoucis. La magie de Noël opère enfin sur toi. »

Madeline (secouant la tête avec un sourire en coin) :
« Ne pousse pas trop loin ta chance, ma grande. Noël et moi, on est comme une dinde et une farce trop épicée : on cohabite, mais c’est toujours tendu. »

Elles éclatèrent de rire, l’écho réchauffant encore l’atmosphère déjà conviviale.

Avant de partir, Sophie disparut brièvement dans l’arrière-boutique, sous l’œil interrogateur de Madeline. Elle revint un instant plus tard, un grand sourire aux lèvres, tenant une thermos et une part généreuse de tarte aux pommes emballée dans du papier kraft.

Sophie :
« Tiens, je ne voudrais pas que tu restes sur ta faim. »

Madeline (lèvres pincées, amusée) :
« Et voilà. Non seulement tu corromps mon foie, mais tu encourages aussi ma gourmandise. Si je finis par rouler plutôt que marcher, ce sera ta faute. »

Arvid (passant derrière elles avec un plateau) :
« Et je parie que tu diras que c’est uniquement pour la science. »

Madeline éclata de rire en hochant la tête.

Madeline :
« Exactement, jeune homme ! Le vin chaud de Freyja mérite une étude approfondie. D’ailleurs, si jamais elle se reconvertit, tu pourrais ouvrir une ‘Taverne des Délices’. »

Sophie (souriant) :
« Très flatteur. Mais je préfère rester ici, au chaud, avec ma librairie et mes enquêtes improvisées. »

Madeline empoigna la thermos et la tarte, un éclat malicieux dans les yeux.

Madeline :
« Et moi, je vais rentrer, méditer sur cette enquête et peut-être songer à des excuses pour ton stock de vin chaud. Parce que je reviendrai, Freyja. L’esprit de Noël ou pas, ton café-librairie pourrait bien devenir mon refuge préféré. »

Sophie (malicieuse) :
« Attention, Madeline, c’est comme ça qu’on finit par aimer Noël. »

Elles échangèrent un regard complice, tandis qu’Arvid, derrière le comptoir, secouait la tête avec un sourire amusé.

Et sur cette note légère, elles se séparèrent, emportant chacune une part de cette enquête intrigante et, surtout, la promesse d’une amitié qui, sous les guirlandes de Noël, venait de naître.

Et, quelque part, dans une ruelle enneigée, les cloches d’une église sonnèrent, marquant peut être le début d’une nouvelle enquête…

Ce texte est une œuvre de fiction ; toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé serait purement fortuite… ou presque.

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