leïla ou la fin d’un rêve de libraire

Leila-Leïla, que représentait ton métier de libraire ?

En fait, être libraire ce n’était pas vraiment prévu au programme … Lorsque j’ai du arrêté mes études pour des raisons financières, il a fallu que je trouve un emploi très rapidement. Sur les conseils de mon compagnon, j’ai postulé dans diverses librairies. Etant un vraie rat de bibliothèque depuis toute petite, c’est vrai que c’était logique ! Et puis, finalement, ce qui au départ n’était qu’un petit boulot alimentaire est devenu une passion. Pas seulement le fait de conseiller des livres mais aussi tout ce que le client ne voit pas. La manière dont cela fonctionne en amont. Sans exagérer, je peux vous dire que lorsque on recevait les « offices » (nouveautés) de la semaine, à chaque fois c’était un peu Noël. Tel livre avait l’air chouette ou passionnant, tel autre serait assurément un bide … Par ailleurs, je fais partie de la catégorie « j’aime ranger », donc, le rangement des livres, l’organisation des tables, reclasser encore et toujours les livres ont toujours été des vraies sources de satisfaction pour moi.

Peux-tu nous présenter ta librairie ?

En fait, malheureusement, je n’ai jamais pu travailler dans des « librairies indépendantes ». J’ai donc été conseillère de vente puis vendeuse et pour finir vendeuse polyvalente dans 3 grands groupes de vente de produits culturels. 3 désignations pour un même objectif : vendre des livres. Même si les réalités et l’organisation étaient différentes dans ces 3 commerces, elles m’ont toutes apporté quelque chose. Dans la première (gilet jaune), il y avait beaucoup de contact avec les clients mais une vraie déconnexion par rapport au monde de l’édition et une pression des objectifs permanente. Ensuite, j’ai enfilé un gilet bleu et ai découvert (brièvement) le public des centres commerciaux. C’était épuisant, plein de dysfonctionnements mais passionnant. Enfin, chez les gilets rouges, j’ai vraiment pu m’affirmer et apprendre des tonnes de choses sur mon métier. Le rythme était très différent de ce que j’avais pu connaître puisque nous étions situé dans une grande gare mais il y a eu quelques petits moments de grâce. Mais le point commun à toutes mes expériences est que j’ai toujours travaillé en équipe de maximum 8 personnes et c’est quelque chose de très appréciable.

Étais-tu spécialisée dans un domaine particulier ?

Lors de ma deuxième expérience, j’étais spécialisée en littérature jeunesse / BD / manga mais j’ai surtout fait de la jeunesse et du manga et peu de BD. Dans mes autres expériences, je n’ai jamais eu de spécialisation officielle mais plus officieuse. Dans mon dernier poste, j’étais mademoiselle littérature jeunesse. Je m’occupais aussi beaucoup du (petit) rayon sciences humaines que nous possédions et bien souvent également du rayon mal aimé, autrement dit vie pratique.

Peux-tu nous présenter une journée type ?

Évidemment, en librairie, toutes les journées ne se ressemblent pas et dépendent des réalités du terrain. Par exemple, le fait que l’entreprise emploie des gens pour s’occuper de la réception de la marchandise change beaucoup les choses. Néanmoins, je vais essayer de te répondre en prenant comme exemple un mercredi à peu près classique. Normalement, le mercredi, c’est le jour des office du groupe Hachette, donc beaucoup de références. Si tout va bien, tu as reçu ta ou tes palettes de colis la veille et tu as tout réceptionné informatiquement puis rangé dans des bacs par thème/rayon. Le mercredi, en arrivant, le premier objectif, c’est la mise en rayon de tout ça. Trouver de la place, retrier, ranger par ordre alphabétique lorsqu’il s’agit de petites quantités …. Ensuite, il s’agit de s’occuper des clients, de les encaisser (si l’on est « polyvalent »), de les conseiller, de faire des papiers cadeaux en période de fête. Bref de faire vivre le magasin, tout en n’oubliant pas de régulièrement ranger car les clients sont loin d’être tous précautionneux ! L’après midi, bien souvent, tu mets en rayon ton réassort et tu continue à t’occuper des clients en même temps. De toute façon, ce sont toujours eux qui passent en priorité.

Quel est ton parcours professionnel ?

J’ai passé et obtenu un bac littéraire. Ensuite, je suis allée en fac de sociologie. Tout le monde me conseillait de faire lettres mais j’avais peur qu’à force de décortiquer les livres, cela en diminue la magie. Avec le recul, j’ai peut-être fait une erreur (en tout cas du point de vue insertion professionnelle). Après mon DEUG de sociologie, j’ai continué dans une filière passionnante : l’anthropologie . Mais comme je l’ai expliqué au début, j’ai du tout arrêté à 2 mois des partiels de fin de licence pour travailler. Très râlant je l’avoue !

Comment tout a basculé pour toi du jour au lendemain ?

En fait mes ennuis de santé ne se sont pas déclenchés d’un seul coup. J’ai commencé par avoir un peu mal au dos, des petits lumbagos, des torticolis … Rien de grave malgré tout. Et puis, un jour, après avoir du soulever une énième caisse de livres qui était en hauteur, j’ai ressenti une grande douleur au niveau des cervicales. J’ai souffert en silence un petit moment et puis finalement, j’ai téléphoné à ma responsable pour lui demander l’autorisation de quitter mon poste et d’aller chez le médecin. Diagnostic : entorse aux cervicales. Après quinze jours de repos complet, je ne pouvais toujours pas bouger mon cou et pire encore, mon bras droit ne m’obéissait plus. Il était comme lesté par du plomb et je ne pouvais absolument plus le lever. Après toute une batterie d’examen très agréables, le diagnostic définitif est tombé : l’entorse caché une hernie discale au niveau des cervicales. Même les infiltrations et les anti inflammatoires ne me soulageait pas. Au bout de 2 mois 1/2, j’ai quand même décidé de reprendre le travail en accord avec les médecins. Et là le coup de semonce lors de mon entretien à la médecine du travail : inaptitude médicale. Au bout de quinze jours, le licenciement a suivi … puis la déprime, le questionnement sur son avenir. Finalement la vie continue, il faut juste faire le deuil de ses projets et passer à autre chose, mais je l’avoue les petites baisses de moral ne sont pas rares !Mais bon, mon cou me laisse tranquille maintenant …

Quelle profession aimerais-tu et pourrais-tu exercer maintenant ?

Je suis assez ouverte professionnellement. Il est vrai que je souhaiterai travailler dans le secteur culturel mais ensuite j’ai conscience de ma jeunesse professionnelle. En ce moment je cherche à faire une formation d’assistante de direction et j’aimerais me spécialiser ensuite dans l’édition ou l’organisation d’évènements culturels. Je suis également chroniqueuse pour un site spécialisée dans la littérature jeunesse et si cela pouvait déboucher sur un travail rémunéré, je serais ravie !

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui voudrait exercer le métier de libraire ?

Je crois qu’aimer lire ne suffit pas pour exercer le métier de libraire. Même si mon expérience en librairie n’ a duré que quelques années, il est des choses que j’ai vite intégré. Tout d’abord, il faut avoir une vraie fibre commerciale, beaucoup de patience, de rigueur et d’organisation. Ensuite, il faut être curieux selon moi et s’intéresser vraiment au produit que l’on vend. Le livre n’est pas un objet comme un autre, il possède une vraie âme. Enfin, il faut savoir que travailler en librairie signifie également pénibilité. Toute la journée debout, de la petite manutention en permanence, et régulièrement des bacs de livres à porter … Tout cela est parfois physiquement difficile à supporter.

Quels sont tes livres cultes ?

J’ai des dizaines de livres cultes ! Plus sérieusement, mon vrai livre culte est un livre pour enfants. Il s’agit de L’oeil du loup de Daniel Pennac. J’ai l’habitude de dire que Pennac m’a fait découvrir la littérature avec un grand L. Je le lis une fois par an depuis l’âge de 10 ans. Faites le calcul ! J’ai une véritable passion également pour la littérature classique anglaise mais si je ne en retenir que 3, ce serait la Foire aux vanités, Orgueil et préjugés et La femme en blanc. Mais j’aime tellement de livres et d’auteurs : Jean teulé, Joyce Carol Oates, Agatha Christie, Minette Walters, Fabrice Colin, Maupassant, Stephen King, Thomas Hardy, Clavel, Ellroy,PD James… et j’en oublie des tonnes ! mais il est également un roman que j’aime passionnément, c’est Manon Lescaut de l’Abbé Prevost, je sais ça fait un peu regard mais je l’aime ce livre voilà tout. Ma curiosité intellectuelle n’a pas de limites et j’adore qu’on me raconte des histoires.

Tu as ton propre site et tu chroniques également sur un second site : peux-tu nous les présenter ?

Je suis chroniqueuse pour le site Les Histoires Sans Fin ainsi que chargée de la section manga. Ce site est spécialisé dans la littérature jeunesse et est une vraie référence du genre pour moi. J’y fais régulièrement des critiques de romans mais aussi d’album et j’ai crée une section manga donc je gère à la fois les contacts avec les éditeurs, le démarchage et évidemment, je fais les critiques des mangas que l’on m’envoie. J’ai également un blog personnel qui s’appelle Idées de Lecture. Mon objectif est de faire partagé mes lectures à ce que j’appelle les non spécialistes. Je suis ravie d’avoir des connaisseurs à la fois du web et de la littérature dans mes lecteurs, mais j’aimerais toucher surtout les lecteurs occasionnels, ce qui hésitent à demander des conseils en librairie mais qui ont une vraie gourmandise par rapport à la lecture.


Il y a une alchimie qui parfois apparait au fil des échanges sur le net. J’ai eu le plaisir de faire la connaissance de Leïla lors d’un échange sur le métier de libraire et le courant est bien passé. Et j’ai eu la joie de vraiment la rencontrer au moment du salon du livre de Paris. Merci à Leïla de nous avoir consacré du temps pour faire découvrir son histoire ainsi que tous les aspects du métier de libraire (les bons côtés… mais également les risques).

Leïla cherche un emploi à domicile avec déplacements ponctuels ou un emploi dans la région toulousaine.

Si un employeur est intéressé par le profil de Leïla qu’il n’hésite pas à nous contacter, nous ferions suivre le message à l’intéressée.


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Jérome PEUGNEZ
Jérome PEUGNEZ
Co-fondateur de Zonelivre.fr. Il est le rédacteur en chef et le webmaster du site.

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