PRÉSENTATION ÉDITEUR
Un peu partout en Suède, des jeunes mettent fin à leur vie. Une vague de suicides étrange, selon des mises en scène horriblement méticuleuses… On charge l’inspecteur Jens Hurtig d’enquêter. Bientôt la police découvre qu’au moment de passer à l’acte les victimes écoutaient une cassette, une mixtape unique créée pour l’occasion par un obscur musicien underground.
Puis c’est une série de meurtres bestiaux qui vient faire déborder les casiers de la criminelle. Quand Hurtig finira par comprendre que ces crimes ont un lien avec les suicides, il sera peut-être déjà trop tard…
Les Corps de verre est un thriller troublant dans lequel la musique scande les impasses du désir, les souffrances de l’amour et les affres de la vengeance. À travers les parcours d’adolescents à fleur de peau, Erik Axl Sund donne à voir la singulière atrocité de notre monde.
L’AVIS DE SOPHIE PEUGNEZ
Suicide. Suicide. Une vague de suicides qui va amener la police à se poser des questions. Surtout que chacune des victimes avait sur elle une cassette audio (véritable vestige musical à l’heure actuelle) avec une bande son des plus étranges.
Hurtig est placé sur cette enquête mais les faits ont pour lui une résonance toute particulière : sa jeune soeur s’est suicidée il y a plusieurs années et il n’a pas vu les signaux qui auraient pu la sauver. Ce sentiment de culpabilité, son meilleur ami l’artiste Isaac, le vit brutalement car une des jeunes artistes du centre auquel il appartient fait partie de cette « marée sombre ». Comment trouver le bouton stop pour arrêter cette mélopée mortuaire et surtout comment identifier le chef d’orchestre de cette étrange mécanique ?
Erik Axl m’avait déjà bluffé en écrivant la trilogie « Les visages de Victoria Bergman (Persona, Trauma, Catharsis), je suis encore sous le choc et le charme du premier opus de cette nouvelle trilogie Mélancolie Noire.
Il y a quelque chose de très original dans leur écriture. Je dis « leur » car sous le pseudonyme Erik Axl Sund, il y a un formidable duo formé par les suédois Jerker EriKsson et Hakan Axlander Sundquist. Hazan est ingénieur du son, musicien et artiste. Jerker est producteur du groupe électro-punk de Hakan, iloveyoubaby ! Et si je précise c’est parce que je pense avoir compris la force et la différence de leur travail.
Ce texte, comme les précédents, est construit comme un puzzle. Le lecteur n’a en mains que certaines pièces et il peut parfois s’interroger sur le lien qui existe entre elles. Il admire cependant l’esthétisme de chaque fragment. Puis tout bouge, tout s’accélère, les morceaux s’emboitent pour laisser apparaitre une oeuvre, une révélation que m’a laissé à chaque fois sans voix car je n’ai à aucun moment imaginé le tableau final.
Mais c’est surtout construit comme une partition musicale. Chaque personnage est un instrument, le flic Hurtig est comme la batterie qui donne le tempo et manque ainsi le récit. Or derrière tout ça, il y a une guitare qui joue des notes presque inaudibles dès les premiers instants. Des sons qui s’amplifient pour être à la limite du supportable entre le plaisir et la torture. Le musicien fou fait vibrer la corde de son instrument comme si il était une Parques sachant qu’il peut rompre le fil de l’existence de sa victime à tout moment.
« Les corps de verre » est une poésie sombre même si le texte est écrit en prose. Une esthétique de la mort qui m’a fait pensé dès les premiers mots (dès les premiers morts) aux Romantismes du XIX°s, cette impression est confirmé à la page 74 lorsque Erik Axl Sund évoque « Les souffrances du jeune Werther » de Goethe.
Il y a quelque chose de très viscéral dans cette écriture « Ecrire c’est comme vivre » (p 80). Un livre écrit avec un scalpel avec l’envie de parfois de le lancer très loin puis de se jeter dessus pour reprendre la lecture avec une tonalité poussée avec l’extrême qui rappelle certains auteurs japonais comme Ryu Murakami et son roman « Les bébés de la consigne automatique. Un univers border-line qui fascine et qui effraie en même temps tout en ayant un aspect complètement addictif.
Ce thriller a une véritable dimension artistique : la musique, la reliure (des passages magnifiques sur la transformation d’un livre), la peinture notamment via le personnage d’Isaak, ses créations et son attachement très profond à la ville de Berlin. Ville culturelle qui bouge, se métamorphose sans cesse où l’art se coir, se vit également dans les rues avec la « East Side Gallery » morceau du mur qui sert de galerie à ciel ouvert.
« Les corps de verre » est le premier volet indépendant d’une nouvelle trilogie. Un clin d’oeil à une des héroïnes de la précédente trilogie « Les visages de Victoria Bergman » est faite. Vous pourrez parfaitement vous immerger directement dans « Mélancolie Noire » mais je n’ai aucun doute que vous ayez envie de vous précipiter chez le libraire le plus proche pour dévorer les précédents feuillets si vous ne les connaissez pas encore.
Erik Axl Sund est (/sont) sans nul doute parmi mes auteurs cultes. Et je suis certaine qu’au fil des mois, cet (/ces) auteur de romans policiers suédois va (/vont) s’imposer comme un des grands noms du roman policier international. Originalité des scénarios, qualité de l’écriture, puissance et esthétisme de chacun de ses textes tout en rappelant qu’il est plutôt réservé à un lectorat averti car la note qu’il joue est à la limite du supportable mais ô combien jouissive « Mélancolie Noire ».
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