- Éditions Critic le 2 septembre 2016
- Pages : 222
- ISBN : 9791090648715
- Prix : 17,00 €
PRÉSENTATION ÉDITEUR
Après l’accident de sa fille, Mai se prostitue dans les rues de Bangkok pour le compte de Petchai, un boxeur raté qui croule sous les dettes de jeu de son père. Quand un tueur implacable s’en prend à eux, Petchai s’arrange pour faire entrer dans la danse Prachya Srimonju, un lieutenant de police corrompu jusqu’à l’os. Il est loin de se douter que ses actes ont enclenché une mécanique implacable, dont nul ne sortira indemne. On ne danse pas impunément avec le diable…
L’AVIS DE CATHIE L.
Une danse avec le diable a été publié par les éditions Critic en 2016. Le style simple de Christophe Sémont est redoutablement efficace: les phrases sont bien construites, avec juste ce qu’il faut de mots : « Il encaissa le premier coup de pied en grognant de douleur sans baisser sa garde. Le garçon en décocha un autre, puis un autre. Petchaï le laissa s’épuiser. Il encaissa, encore et encore, jusqu’à ce qu’il sente ses frappes devenir moins puissantes. Alors, il passa à l’offensive. » (Page 25)… dans des chapitres courts, sans bla-bla inutiles, des formules percutantes qui illustrent parfaitement le contexte de l’intrigue : « La ville les happait, dévorait leur jeunesse et ne recrachait que quelques os desséchés. » (Page 101)
Les thèmes
Corruption des policiers : « C’est un officier réputé pour son efficacité sur le terrain. Il est proche de ses hommes, notamment du sergent Chaiyon avec qui il a braqué notre marchandise. Il semble avoir la main sur quelques restaurants, des joueurs et des dealers qu’il rackette en échange de sa protection. Plus quelques détournements occasionnels, de petites saisies de drogue ou d’armes. » (Page 123).
Trafic de drogue: établi depuis des dizaines d’années, Thaïlandais, Chinois, toutes sortes de marchandises : opium, amphétamine, héroïne, cocaïne => Des réseaux solidement implantés sur la capitale et dans quelques provinces.
Prostitution : « …c’était celle de la plupart des prostituées à Bangkok. Des filles de la campagne qui venaient en ville avec l’espoir de décrocher un emploi stable et de gagner suffisamment d’argent pour subvenir aux besoins de leur famille restée au village. Il ne leur fallait généralement que quelques semaines pour découvrir l’envers du décor et il était déjà trop tard. » (Pages 100-101).
L’intrigue
Une livraison de drogue entre Laotiens et Thaïlandais qui tourne au carnage. Petchaï, ancien boxeur reconverti en proxénète, doit régler les dettes de jeu de son père au clan Sukapatana. 50 kilos d’héroïne très pure circulent, impliquant les Laotiens, les flics corrompus et le clan de Dao : « 50 kilos de China White coupés et reconditionnés, un millier de petits sachets allaient perturber le marché pendant quelques jours, voire plusieurs semaines. Il faudrait s’attendre à des représailles, mais Dao Sukapatana savait ce qu’elle faisait. » (Page 54) => Guerre des gangs violente et impitoyable.
Dans le même temps, deux prostituées appartenant au même réseau sont assassinées. Hasard ? Tueur en série? Règlement de compte ? Après l’agression de sa jeune sœur aveugle, le capitaine de police Prachya devient une véritable bombe à retardement, aveuglé par la haine, cherchant à venger la jeune femme.
Christophe Sémont utilise ses connaissances du contexte géographique, social et historique pour asseoir solidement son intrigue :
« Li n’envisageait pas la possibilité d’une agression aussi frontale. La police et l’armée représentaient en Thaïlande deux institutions auxquelles on ne s’attaquait jamais, à aucun prix. Cependant, la position de Dao Sukapatana s’affirmait de minute en minute. Elle ne lâcherait rien. Jusqu’où était-elle prête à aller ? » (Page 120).
Les lieux
Le personnage principal de ce roman est sans conteste la ville de Bangkok elle-même qui nous montre, au fur et à mesure du déroulement de l’histoire, ses multiples visages, les plus laids comme les plus poétiques, que nous parcourons sur les traces des antagonistes.
Patpong est l’un des pires quartiers, supermarché du sexe à ciel ouvert, étalage de tout ce qu’on peut acheter et consommer sur place : hommes, femmes, enfants, travestis se croisent dans les gogo bars, saunas, salons de massage, bars à karaoké ou les ab ob nuat.
Bangkok est une ville surprenante, aux secrets multiples, tentaculaire, dépravée et magnifique; une véritable boîte de Pandore, puits de luxure, zone franche « où l’on pouvait assouvir à peu près tous ses fantasmes, servis sur un plateau d’argent avec des kilos de drogue et d’alcool en prime. N’importe quelle pute gagnait trois à quatre fois plus que le moindre fonctionnaire de police. »
Mais Bangkok offre également « une vue imprenable sur le Chao Praya qui serpentait à travers la ville. La résidence se situait à l’ouest du fleuve, sur la rive Thonburi, du nom de la première capitale du pays et de la partie la plus ancienne de la cité. Le quartier semblait appartenir à une autre époque. Loin des principaux temples pris d’assaut par les touristes et des quartiers d’affaires continuellement engorgés par un flot ininterrompu de voitures, Fang Thon abritait quelques-uns des plus luxueux hôtels privés… » (Page 53).
En conclusion
Une véritable ambiance de films noirs avec les triades chinoises, les luttes entre les différents clans de mafieux qui se partagent la ville, des décors à faire froid dans le dos où l’on sent le pouls de la ville battre au rythme des règlements de compte, des passages à tabac, des rêves brisés et des rancœurs…
Le + : une évocation très réaliste de la vie souterraine et interlope de Bangkok jusque dans le vocabulaire et les coutumes. Remarquable reconstitution des milieux de la drogue et de la prostitution, comme si on y était. Des scènes de combat et d’action précises et crédibles, des dialogues bien construits, des ripoux vraiment ripoux participent à l’attrait puissant de ce roman qui vous invite dans Une danse avec le diable particulièrement angoissante mais tellement captivante.
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