Présentation Éditeur
Nous sommes en 1864 et Lizzie Martin accepte un poste de dame de compagnie à Londres auprès d’une riche veuve qui est aussi une propriétaire de taudis.
Lizzie est intriguée d’apprendre que la précédente dame de compagnie a disparu, apparemment après s’être enfuie avec un inconnu. Mais quand le corps de la jeune fille est retrouvée dans les décombres de l’un des bidonvilles démolis récemment autour de la nouvelle gare de St Pancras, Lizzie commence à se demander ce qui s’est passé.
Elle renoue avec un ami d’enfance, devenu l’inspecteur Benjamin Ross, et commence à enquêter avec son aide, au péril de sa vie, pour découvrir la vérité sur la mort de la jeune fille dont le sort semble étroitement lié au sien.
Origine | |
Éditions | 10/18 |
Date | 20 juin 2013 |
Traduction | Delphine RIVET |
Pages | 384 |
ISBN | 9782264058737 |
Prix | 7,50 € |
L'avis de Léa D.
J’ai entendu beaucoup parler de ce roman, je trouvais la couverture très belle, il ne m’en fallait pas plus pour commencer l’aventure.
On découvre Elizabeth Martin – ou Lizzie – peu de temps après la mort de son père, un médecin de campagne. Celui-ci ayant laissé peu d’argent pour permettre à sa fille de substituer, Elizabeth accepte un travail de dame de compagnie. Elle va arriver à Londres pour prendre son poste auprès de Mme Parry, la veuve de son parrain.
Très vite, elle va apprendre que la jeune femme qui occupait sa position précédemment s’est enfui avec un homme. Mais ça, c’était avant qu’on ne découvre son corps dans un chantier de démolition ! L’inspecteur Benjamin Ross, de Scotland Yard et ancienne connaissance de Lizzie, va faire des pieds et des mains pour démasquer la personne responsable.
Parlons tout d’abord de l’enquête policière. Sans être extraordinaire, elle est intéressante et en se demande sans cesse comment l’affaire va être résolue ! Sans être sûre à 100% de l’identité du suspect, j’ai eu très vite des soupçons, ce qui ne m’a pas gâchée la lecture. J’ai été happé par les rebondissements, et surtout par les méthodes, les pensées de Ben Ross et de Lizzie, qui apporte un éclairage inattendu à l’enquête policière.
Voilà, pour l’intrigue, parlons maintenant des personnages. Sans contexte, ils sont tous plus intéressants les uns que les autres ! Les personnages secondaires sont tous très bien décrits, avec une mention particulière pour Mme Parry, qui n’est pas aussi futile ou écervelée qu’on le pense. Mais ma préférence va bien sûr aux deux personnages principaux, étant donné que le récit se partage entre ces deux-là. Ben Ross est parti de pas grand-chose pour finalement devenir un excellent inspecteur, il a du talent et de la motivation à revendre, sans compter un certain charme. Lizzie me fait penser un peu à Elizabeth Bennet (je suis la seule à qui ça fait cet effet ?) est vraiment LE personnage. Peu de moyens, elle arrive déphasée à Londres, le contraste est dur entre la vie où elle pouvait dire tout ce qu’elle pensait, et les salons où elle doit surveiller ses manières et sa façon de penser, très différente des mœurs des femmes de ce milieu. Elizabeth va faire de son mieux pour s’adapter aux conventions, à se fondre dans la masse et à ne pas choquer les hommes par son caractère entier et indépendant.
Mais ce qui m’a également particulièrement plu dans Un intérêt particulier pour les morts est le fait d’avoir ancré le récit dans l’époque victorienne, que j’apprécie décidément de plus en plus ! Mœurs, usages, relations, vêtements, décors, j’ai eu l’impression d’y être et de pouvoir vivre une nouvelle fois à cette époque fascinante. Une époque fascinante, mais très dure, évidemment. La description du travail dans les mines de charbons, les taudis dans lesquels les gens sont obligés de s’entasser, les bouges… Bref, du beau mais aussi du moins reluisant, avec un luxe de détails et de précisions qui rendent ce décor vraiment vivant et intéressant.
Un intérêt particulier pour les morts est un roman qui se lit très vite et facilement, avec beaucoup de plaisir. Je me plongerai dans la suite avec intérêt.
L'avis de Cathie L.
Ann Granger, née le 12 juillet 1939 à Portsmouth, est une romancière britannique auteur de romans policiers, de romans policiers historiques et de romans d’amour historiques. Elle a fait ses études supérieures à l’université de Londres, puis a obtenu un baccalauréat universitaire en arts, a enseigné l’anglais une année en France avant de travailler quelques années dans des consulats et ambassades britanniques au service de délivrance des visas en Yougoslavie, en Tchécoslovaquie et en Autriche.
En 1979, elle publie, sous le pseudonyme d’Ann Hulme (son nom d’épouse) le premier roman d’amour historique d’une série de quinze, non traduite à ce jour. En 1991, elle amorce une série policière avec les inspecteurs Mitchell et Markby dont seuls cinq des quinze titres sont traduits en français. Sa nouvelle série de polars historiques, commencée en 2006, a pour héroïne Lizzie Martin et celui qui deviendra son mari, l’inspecteur Benjamin Ross.
Un intérêt particulier pour les morts, A Rare Interest in corpses dans la version originale parue en 2006, traduit par Delphine Rivet, a été publié par les éditions 10/18, dans la collection Grands détectives, en 2013. Le style d’Ann Granger est fluide, agréable à lire. La construction originale du roman selon un chassé-croisé entre la version et l’interprétation des faits d’Elizabeth et celles de l’inspecteur Ben Ross amène la répétition de certaines scènes mais d’un point de vue différent, celui de la jeune femme complétant celui de l’inspecteur, et vice-versa. Procédé inhabituel qui permet au lecteur de combler certaines lacunes du récit, les deux narrateurs ne participant pas à toutes les scènes, avec pour inconvénient d’inévitables répétitions, écueil que l’auteur évitera de plus en plus dans les aventures suivantes.
Après le décès de son père, médecin de campagne, Lizzie arrive à Londres pour devenir la dame de compagnie de madame Parry, épouse de son défunt parrain. Originaire du Derbyshire, sans famille et sans le sou, la jeune femme découvre un monde qu’elle était loin d’imaginer.
Au cours du trajet qui la conduit de la gare jusqu’au domicile de sa bienfaitrice, le cadavre d’une femme, revêtue de vêtements de bonne qualité, est découvert dans les décombres d’un chantier de démolition par les ouvriers alors qu’ils jetaient un oeil à l’intérieur de la maison avant de l’abattre, une de « ces maisons étroites, construites à la hâte avec des matériaux bon marché, qu l’on jugeait bien suffisants pour des pauvres… », dans le quartier d’Agar Town, quartier de « sinistre réputation dans cette ville qui ne manquait pourtant pas de taudis. » (Page 50). Quartier où madame Parry possédait des terrains qu’elle avait vendus à la Compagnie de Chemin de Fer. La mort de la malheureuse aurait-elle un lien avec la construction de la nouvelle gare et les intérêts financiers de madame Parry ?
Pourquoi avoir caché le cadavre dans une maison en démolition ? Il se doutait bien qu’il serait découvert tôt ou tard… Dans ce cas, pourquoi ne pas l’avoir jeté dans la Tamise, son homicide aurait eu alors toutes les chances de passer pour un suicide ? Pourquoi avoir signalé sa disparition deux mois avant sa découverte alors que, selon le médecin légiste, la jeune femme avait été tuée seulement deux semaines plus tôt ? Avait-elle été retenue prisonnière avant d’être assassinée ? Lizzie, émue par le sort subi par la pauvre jeune fille, décide de mener ses propres recherches afin d’en avoir le cœur net, sans se douter des dangers qu’elle aura à braver…
Londres de 1864. Une capitale grouillante et insalubre, belle et laide à la fois, offrant quelques beaux quartiers réservés à l’élite de la bourgeoisie et de l’aristocratie, tout en étant défigurée par de nombreux autres quartiers miséreux, où s’entasse une populace sans aucune hygiène, décimée par toutes sortes de fléaux : le choléra, la typhoïde, la diphtérie, la consomption et « ces maladies qui affectent seulement les pauvres et naissent de la détresse. » Une ville qui tente de sortir de cet état sordide en se modernisant, en témoigne les travaux de démolition d’Agar Town en vue de la construction de la nouvelle gare de Saint Pancras, terminus de futures lignes nationales.
Ann Granger montre ce contraste prononcé en décrivant d’une part la maison de madame Parry, luxueusement meublée au goût du jour : des tapis turcs, une profusion de plantes vertes, des murs recouverts de tableaux, éclairée au gaz, confort moderne fort coûteux à l’époque… Et d’autre part, un décor à mille lieues de ce que peuvent imaginer les nantis, de petites rues étroites où « les maisons étaient entassées les unes sur les autres » et où « les petites échoppes en tout genre exhibaient leurs marchandises aux passants, sur des étals montés dans la rue… Des nuées de mouches et l’odeur écœurante du sang séché et de la chair morte s’échappaient des boucheries… Il y avait aussi des boutiques qui ne se contentaient pas de vendre mais achetaient également. Vêtements, bijoux, livres et ustensiles ménagers si vieux et usés que je me demandais qui pourrait bien en vouloir. » (Pages 190-191).
Ce premier opus de la série consacrée aux enquêtes de Lizzie Martin et de l’inspecteur Ross bénéficie d’une reconstitution minutieuse de la société victorienne dans laquelle évoluent nos héros: de nombreux détails de la vie quotidienne illustrent une mise en scène très réussie, donnant au roman son cachet délicieusement britannique et 19e siècle.
Un intérêt particulier pour les morts pose les jalons des épisodes suivants en présentant les deux principaux protagonistes, leurs origines géographiques et familiales, mais également le milieu social dans lequel ils évoluent et leurs personnalités si différentes, les rendant d’emblée intéressants et attachants: la recherche de la vérité, sans se préoccuper des conséquences parfois dramatiques ou dangereuses qui pourraient en résulter, sera le terreau qui nourrira le lien profond qui les liera l’un à l’autre…Le lecteur aura grand plaisir à les retrouver pour des enquêtes passionnantes, dénonçant les diverses facettes de cette société bourgeoise hypocrite, mue plus par le profit que par la solidarité et la bienveillance. Pas si éloignée de la nôtre…
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