Interview du Dr Bernard MARC, médecin légiste

Dr Bernard MarcDocteur Bernard Marc, Profession médecin légiste

Un titre de livre sortit aux éditions Démos il y a déjà quelques années, mais aussi l’histoire d’une carrière…

Bernard MARC est médecin légiste, responsable de l’Unité Médico Judiciaire (UMJ) du centre hospitalier de Marne-la-Vallée. Il a sous ses ordres une quinzaine de personnes, d’autres médecins légistes, des psychologues, des infirmières et des secrétaires.

Malgré cette charge de travail, Bernard Marc est aussi un homme qui se donne pour porter la médecine légale au yeux de tous, que vous soyez simple lambda qui cherche à s’instruire, à comprendre ce qu’est exactement cette branche de la médecine avec des livres comme Docteur Bernard Marc, Profession médecin légiste, paru aux éditions Demos. Ou bien directement pour les personnes ayant la vocation de devenir légiste en dirigeant l’Atlas de la médecine légale.

Praticien hospitalier, homme de terrain – le médecin légiste se rend sur les scènes de crime -, écrivain et homme de média –consultant et intervenant pour plusieurs émissions radio et télé -, le docteur Bernard Marc est un homme qui ne connaît pas l’inactivité.

Docteur Bernard Marc, Profession médecin légiste

Voici un livre qui ne date pas d’hier, cet opus est paru il y a déjà quelques années. Réimprimé plusieurs fois, il est toujours au goût du jour, surtout à l’heure où la plupart des séries télévisées, des films ou autres romans font la part belle à cette profession.

Depuis quelques temps le légiste tient une part importante, dans la littérature policière par exemple, sans pour autant être le personnage principal du roman, il est un des intervenants récurrents, et grâce à cela le grand public s’intéresse de plus en plus à cette profession.

En lisant ce livre, le lecteur lambda va se rendre compte que le plus souvent, ce que vivent les légistes, comme le docteur Bernard Marc est pire que la fiction. Que notre triste réalité est plus glauque que la fiction.

Profession Medecin legiste - Bernard MarcDans ce livre, Dr Marc : Profession médecin légiste – Le quotidien d’un médecin des violences, qui est la seconde édition, revue et agrémentée de nouveaux détails, le docteur Marc explique, simplement mais avec tous les détails nécessaires les nombreuses missions qui incombent au légiste. Passant des victimes aux criminels, on le retrouve tout au long de la procédure pénal, pas forcément dans le cas d’homicide, mais de « simples » violences, de maltraitances, de viols et autres joyeusetés que l’homme aime tant à infliger à son prochain.

Le médecin légiste est un baroudeur, ce n’est pas simplement le type avec une casaque, des gants, un tablier et autre équipements de protection individuelle qui découpe une victime d’homicide dans les fins fonds d’un IML, dans l’atmosphère froide – sic – d’une salle d’autopsie médico-légales, afin de trouver LA cause du décès. Non, on le retrouve   sur les lieux des  scènes de crime les plus improbables, oui messieurs-dames, le tueur assassine n’importe où, cela peut être en pleine nature, comme dans une pièce exiguë, un véhicule…
Ensuite c’est aussi l’homme de certaines consultations hospitalières, celles pour coups et blessures qui entraîneront les ITT, les plaintes, il est aussi présent au fin fond des cellules de garde à vue.

Bref,  le légiste est partout, et contrairement à ce que le grand public pense, les trois quart de son temps il le passe à écouter, accueillir, comprendre et soigner les vivants, décrypter la morts afin que justice soit rendue, n’est qu’une partie de sa vocation. Mais quelle partie…
Le livre est découpée, comme une victime, en neuf parties, afin de mieux comprendre, on débute par les morts violentes, la scène de crime, l’autopsie et la virtopsie (de plus en plus présente), les violences du quotidiens, les violences sur mineurs, les agressions sexuelles, les violences intolérables, les toxicomanies et enfin le rapport légiste/magistrat, bref tout pour positiver !

A noter aussi la présence très enrichissante d’un lexique médico-judiciaire et d’un bibliographie intéressante sur le sujet.

Dans ce témoignage que nous offre le Docteur Marc, il nous explique son rôle, des tous premiers moments de l’enquête, puis tout au long de la procédure judiciaire, pourquoi ? Comment ?

Le tout ponctué d’anecdotes, mais sans voyeurisme ni complaisance, juste le ressenti de l’homme derrière la blouse.

Atlas de medecine legaleAtlas de médecine légale

Est-ce qu’un Atlas de la médecine légale peut être un livre attendu ?

Drôle de question me direz-vous, et bien toujours est-il que la réponse est oui. Oui, tout simplement parce que si je me réfère à la banque de données de la BNF, le dernier traité publié de cette science date de 1899 ! Bien sûr il y a eu d’autres livres sur la médecine légale, des livres de cours, des études,  des traités, des mémoires de légistes etc.

Mais un Atlas, et qui plus est richement illustré, nous n’avions pas. Il est certain que ce livre n’est pas à mettre entre toutes les mains, car les photos peuvent être choquantes pour un public non averti. Mais que l’on soit étudiant en médecine, en thanatopraxie, en droit,  magistrat, avocat, représentant de la force publique, ( voir auteur de polar qui recherche la perfection dans la description des scènes de crime) bref, toute profession  ce qui va toucher à un moment où à un autre aux agressions, à la mort violente, ce livre est indispensable, car c’est une véritable bible.

Toutes les illustrations de cet atlas sont issues des collections personnelles des auteurs du livre, pas de recherches de spectaculaires dans cette iconographies, non juste la mort, dans toute sa violence, des photos explicites, accompagnées des textes explicatifs. Comme le vantait une célèbre revue dans les années 80 : Le poids des mots, le choc des photos.

Le livre est divisé en quatre grandes parties :

  • Médecine légale Post Mortem
  • Médecine légale du vivant
  • Médecine légale du mineur
  • Médecine légale sexuelle

Tous ces chapitres sont ensuite divisés en une quinzaine de sous-sections chacun, suivi d’un glossaire de plus de six-cent entrées.

Cinq auteurs ont travaillés d’arrache-pied pour faire naître ce projet, le docteur Bernard Marc en est le coordonnateur, assisté des docteurs : Agnès Barthès, Armel Gaith, Olivia Toulouse et  Charles Vangenderhuysen. Ils ont réussi à faire ce qu’ils voulaient, un livre qui est une véritable référence dans la médecine légale.

Tous sont des médecins légistes expérimentés, exerçant dans différentes unités médico-judiciaires.

Rencontre avec le Docteur Bernard Marc

Sébastien MOUSSE : Bonjour Docteur, tout d’abord merci de m’accorder un peu de votre temps pour le site ZONELIVRE.FR. Ma première question, on peut être passionné par la médecine légale, car pour autant officier avec elle, il faut avoir la passion en soi ?

Docteur Bernard MARC : La passion est indissociable de cet exercice particulier qu’est la médecine légale. C’est elle qui nous fait trouver toujours de l’intérêt à apporter notre concours sur une scène de décès banale tout autant que sur une scène de crime qui intéressera les média, comme celle de cette nuit. C’est cette passion qui nous fait lutter avec nos armes et nos moyens contre les violences faites aux femmes ou les violences sexuelles chez les mineurs.

SM : Vous êtes chef de service en médecine légale au Centre hospitalier de Marne la Vallée, expert judiciaire, vous avez écrit ou dirigé plus d’une dizaine d’ouvrages de médecine légale en langue française et l’un des co-éditeurs de l’Encyclopedia of Forensic and Legal Medicine. Vous intervenez aussi sporadiquement dans les média, soit pour des émissions de criminologie, soit lorsque l’actualité le demande. Les journées ne sont pas un peu trop courtes ?

DBM : La passion d’un métier peut devenir envahissante ! Demandez à mes proches, leur confirmation sera sans appel. Mais chaque activité liée à la médecine légale est une source de rencontres, d’enrichissement, de réflexion future. Et cela sert beaucoup lors qu’il faut vulgariser, au sens noble du terme, un savoir technique pour l’expliciter comme je le fais avec vous.

Dr Bernard MarcSM : Quel est le rôle exact d’un chef de service en UMJ ?

DBM : On voudrait que ce rôle soit celui d’un animateur, d’un concepteur d’idées, d’un organisateur, d’un formateur au sens de la formation clinique, d’un créateur de passerelles avec d’autres professionnels impliqués (police, gendarmerie, justice, services funéraires, associations de victimes, etc.) .

Aujourd’hui,  être chef de service c’est aussi répondre aux contraintes que les réorganisations nationales ou les contraintes budgétaires nous imposent, avec l’obligation éthique d’un service de qualité pour les victimes.

SM : L’Atlas de la médecine légale  est un livre très fournit et détaillés, par forcément pour les futurs médecins légistes, mais aussi pour les thanatopracteurs en devenir, et même ceux officiants depuis longtemps. Un livre plus orienté vers un public professionnel. Dans Profession médecin légiste, l’ouverture est plus vers le grand public. Mais malgré tout, on sent poindre au fil des pages outre le témoignage, une envie de transmettre le savoir. La pédagogie, apprendre à l’autre, lui faire comprendre son métier, sa vocation, c’est important pour vous ?

DBM : Rendre le savoir accessible, le vulgariser, encore une fois, a été un des objectifs majeurs des grands scientifiques et médecins de la fin du 19ème siècle et de la première moitié du 20ème. Les grands noms de la médecine légale, de Brouardel à Martin, de Lacassagne à Locard, d’Orfila à Simonin, n’ont jamais négligé cet aspect. Je viens d’ailleurs de coordonner la partie « Urgences médico-légales, médico-psychologiques et psychiatriques » de la 2ème  édition du Guide infirmier des urgences qui paraît en octobre chez Elsevier-Masson.

SM : On entend parler de plus en plus de virtopsie, est-ce l’avenir de la médecine légale du cadavre ? Y-a-t-il de grands changements à venir à courts termes dans cette discipline ?

DBM : L’imagerie virtuelle, scanner ou IRM, avec ses possibilités de reconstruction en 3D, son aide à la traumatologie, à la balistique s’impose comme un standard. Je suis très fier d’avoir été l’un des premiers à y croire, dès 2005, et malgré des oppositions parfois féroces. Aujourd’hui, personne ne nie son importance. Quelles sera la nouvelle technique pour la médecine légale ? Je ne sais pas. Mais il faut être curieux de tous les progrès, de toutes les avancées y copris en dehors de nos domaines et de savoir les intégrer à notre pratique. Un certain Steve Jobs y a particulièrement bien réussi.

SM : Vous avez publié plusieurs ouvrages : à caractère historique ; certains pour le grand public ; d’autres réservés aux initiés, à quand une fiction ? Avec vos connaissances, votre vécu, le médecin légiste flirte souvent avec ce qu’il y a de plus vil dans notre société, vous pourriez transposer cela dans un roman. Soit un polar, voir même un roman noir sociétal. L’aventure ne vous tente pas ?

DBM : J’ai une formation d’historien en parallèle, ce qui explique ces ouvrages. Pour la fiction, j’ai co-écrit avec Maryse Rivière un roman paru chez Calmann-Levy en 2011 : «  le fracas des hommes » sur l’itinéraire d’un jeune médecin au début du 20ème siècle et lors de la Grande Guerre. Je suis aussi son conseiller lorsqu’elle écrit en solo, ce qui lui a pas mal réussi cette année, avec le Prix du quai des orfèvres ! Mais j’ai aussi de jolis projets bien avancés…

SM : Avez-vous une prochaine publication à paraitre ?

DBM :  Celle qui me tient plus qu’à cœur, c’est le mois prochain la parution de l’ouvrage international « Encyclopedia of Forensic and Legal Medicine » pour sa deuxième édition, celle de 2015, dix ans après la première. Avec les médecins et une psychologue de mon service, nous avons rédigé pas moins de 11 chapitres de ce traité international de référence, en 4 imposants volumes, dont des questions majeures comme les violences sur enfants ou le suicide. La confiance que nous ont accordée les éditeurs anglo-saxons, avec leur professionnalisme, est en soi une source de fierté.

SM : Docteur, je vous remercie de m’avoir accordé un peu de votre précieux temps.

DBM :  C’est moi qui vous en remercie.

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